Deux pieds dans la tombe

A la différence d'un être humain, une banque classique, généraliste, dispose de trois pieds. Elle s'appuie d'abord sur des activités dites de banque de détail : prêts et crédits, aux particuliers et aux entreprises, secteur lié à l'évolution de la conjoncture, à l'envie de consommer en s'endettant et d'investir pour produire. En la matière, malgré les ralentissements sensibles dans les différents pays occidentaux, cette activité bancaire fait encore bonne figure. Certes, on peut noter une montée des risques, tant auprès des entreprises que des particuliers. Mais mis à part quelques gros sinistres bien identifiés, on reste bien loin de la zone d'alerte.Et puis, les établissements financiers vivent sur deux autres pieds : la banque d'investissement d'une part, la gestion d'actifs de l'autre, tous deux très liés aux marchés financiers (actions et obligations), à l'évolution du secteur de l'épargne, des placements mais aussi des fusions et acquisitions, des financements structurés, de l'ingénierie financière. Or, ce sont des domaines actuellement sinistrés. Le plongeon des marchés, le doute croissant sur la santé, la valeur et l'honnêteté comptable des entreprises entraîne l'atonie de ces grands domaines d'activité.Pour une banque, l'équation est redoutable. Aussi puissant soit-il, son secteur de détail suffira-t-il à soutenir les deux autres ? Ou lui faudra-t-il, comme le font certaines groupes américains, réduire massivement les coûts en supprimant des milliers d'emplois qui sont autant de talents que l'on risque de ne pas voir revenir le jour où la croissance sera de retour?Certes, on ne compte guère d'optimistes qui envisagent une reprise solide des marchés avant 2003. En attendant, il faut faire le gros dos. Et prier très fort pour que le client de la banque de détail continue à faire fructifier les fonds propres de la banque, privée de ressource sur ses deux autres pieds. On imagine le drame que représenterait pour les établissements financiers un brutal coup de frein à la croissance qui fragiliserait leur seul pied encore valide. D'où la nécessité pour eux de continuer à soutenir la croissance en prêtant à des clients par ailleurs dégoûtés peut-être durablement des placements boursiers. Mais qui dit crédit dit risque. Gare à ceux qui ne se seront pas dotés des outils ad hoc pour bien les gérer. Le retour de bâton sera immédiat.
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