Les e-voyagistes affûtent leurs stratégies sur un marché en croissance

Pour les e-voyagistes, le 11 septembre n'est plus qu'un mauvais souvenir. Si les attentats du World Trade Center ont effectivement plombé les chiffres de l'hiver 2001, la croissance est de retour depuis janvier et pour de bon. Les agences de voyage en ligne préfèrent rester discrètes sur leurs résultats, mais elles affichent un moral au beau fixe. Les résultats enregistrés par Lastminute-Degriftour pour son deuxième trimestre 2002 (clos au 31 mars) en attestent, avec un profit de 281.500 euros dans l'Hexagone. Un an plus tôt, le site affichait 786.700 euros de pertes. Encore déficitaire au niveau global, le groupe, qui va reprendre Travelprice (lire ci-contre) prévoit d'être dans le vert début 2003. Idem pour eBookers dont la perte d'exploitation (Ebitda négatif) a diminué de 56% en séquentiel au premier trimestre à 1,3 million de livres, grâce à une forte croissance de l'activité.Ces ventes croissantes reflètent les efforts faits par les sites pour diversifier leurs offres afin de s'adapter à une demande qui change. "On constate que les voyages de proximité, vers la Croatie par exemple, séduisent de plus en plus et pour l'offre Week End, c'est carrément l'explosion avec 400% d'augmentation", se réjouit Laurent Briquet, directeur général adjoint d'eBookers. Serait-ce là le fameux effet 35 heures ? Toujours est-il que les touristes se rendent là où on ne les attendait pas : "New York est notre destination phare et les compagnies aériennes constatent une augmentation des vols vers les Etats-Unis", affirme Petra Friedman, directrice générale d'Opodo.Naturellement, la haute saison est loin de démentir cette tendance à la hausse. Au contraire. Le voyagiste anglais eBookers revendique une augmentation de 85,3% de son chiffre d'affaires pour juin. La Tunisie, la Turquie et le Maroc restent les favoris des voyageurs internautes qui apprécient l'exotisme à portée du portefeuille de ces destinations moyen courrier. A noter toutefois que "90% des Français partent en vacances en France et cette tendance est légèrement accentuée depuis le 11 septembre", explique Denis Philipon, directeur général de Lastminute-Degriftour France. Courageux mais pas téméraires.Pour profiter de la manne représentée par les internautes voyageurs, les e-voyagistes affûtent leurs stratégies. Jusqu'à présent, la tendance était à la concentration et à la consolidation à l'échelle européenne. Ainsi en avril dernier, Lastminute a racheté Travelselect, puis il a acquis 20 % du voyagiste allemand en ligne LCC24, et vient de faire de même avec DGL. De son côté, eBookers a mis la main sur 11 sociétés entre août 1999 et mars 2001.Dans ce paysage recomposé, chacun cherche aujourd'hui à se différencier. Pour Denis Philipon, l'orientation est claire : "Nous voulons développer une pédagogie de la dernière minute, déculpabiliser ceux qui n'arrivent pas à s'organiser à l'avance pour les vacances." Lastminute-Degriftour, qui affirme avoir doublé son catalogue en un an, vend principalement des packages tout compris, prêts-à-partir. Le tout agrémenté d'offres tentantes comme un enfant gratuit pour un séjour acheté. Le succès est au rendez-vous puisque l'opération porte sur 10% des packages achetés.Du côté de Karavel, qui a racheté Promovacances en octobre 2001, les deux positionnements sont très clairs. Ludovic Pruche, directeur marketing, résume la stratégie du groupe de la sorte : "Promovacances, c'est le vieux de la vieille du voyage en ligne et la promesse du meilleur rapport qualité/prix toute l'année. Au contraire, Karavel, c'est une forte valeur ajoutée de conseil, avec un générateur d'idées qui trouve ce qui convient le mieux à vos centres d'intérêts, c'est un site multi-niches."Pour eBookers, la situation est différente. Le groupe reste un discounter avant tout. Certes, dans un communiqué de mars dernier, il annonçait vouloir insister sur "le développement de ses ventes de voyages hors-aérien en 2002". Mais après avoir fait d'importants investissements marketing pour lancer la marque qui ne bénéficiait pas, en France, de notoriété, il donne aujourd'hui la priorité à la rentabilité. La filiale française d'eBookers semblerait avoir atteint la profitabilité le mois dernier, rejoignant ainsi les quatre autres pays du groupe qui réalisent une rentabilité opérationnelle. La délocalisation des activités de back-office en Inde y a certainement contribué.Mais deux nouveaux éléments suscitent l'inquiétude des e-voyagistes. Le premier est l'arrivée en trombe d'un nouveau concurrent pas comme les autres: Opodo. Ce nouveau site qui a démarré en avril dernier est déjà numéro 5 des voyagistes en ligne avec 329.930 visiteurs connectés en juin, selon un classement Panel Nielsen/Netratings Univers Global. Sa particularité : ses neuf actionnaires sont des compagnies aériennes européennes. Petra Friedman, directrice générale d'Opodo, dément être une simple vitrine de ces compagnies : "Nous sommes indépendants. Nos actionnaires sont motivés par le développement du voyage en ligne". Il n'empêche que la situation est délicate. "Nos fournisseurs deviennent nos concurrents", précise Laurent Briquet d'eBookers. De quoi marcher sur des oeufs quand environ 75% de l'activité des voyagistes portent sur les vols secs.Autre préoccupation : l'accord signé en juin entre Air France et le Snav (Syndicat national des agents de voyage). Il stipule que les commissions pour les ventes en ligne seront ramenées à 4% contre 7% pour les agences traditionnelles. Les sites souhaiteraient renégocier cet accord. En attendant, la grogne monte.Malgré des difficultés prévisibles, les perspectives du secteur restent séduisantes. Selon les études de Jupiter MMXI, citées par eBookers, le voyage en ligne devrait connaître une progression de près de 60% cette année en Europe. Les opportunités sont donc considérables: au cours du mois dernier, 37,2% seulement des internautes français ont consulté des sites de voyage. Soit, selon cette estimation de Panel Nielsen//Netratings Univers Global, à peine 4.016.000 personnes sur 11 millions d'internautes Français.
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