Romano Prodi relance le débat sur l'élargissement

Alors qu'elle devient de plus en plus homogène politiquement, l'Europe se tourne vers son avenir, c'est-à-dire vers son élargissement. A la veille d'un sommet de Séville qui s'annonce en grande partie réservé aux discussions budgétaires et au durcissement de la politique d'immigration, Romano Prodi a relancé le débat sur l'élargissement en souhaitant que le calendrier prévu jusqu'ici soit respecté.Le calendrier de l'élargissement respecté. Le président de la Commission s'est ainsi dit "optimiste" quant à l'achèvement des négociations avec les dix pays candidats d'ici à décembre prochain. L'adhésion à l'Union européenne de ces pays devrait donc intervenir le 1er janvier 2004. Le respect de ce calendrier a été confirmé par le président du gouvernement espagnol, José Maria Aznar, dont le pays assure jusqu'au 1er juillet la présidence de l'Union européenne et par le Premier ministre danois Anders Fogh Rasmussen qui prendra le relais. Selon José Maria Aznar, "la décision sur l'élargissement sera prise par la présidence danoise et c'est à celle-ci de dire quels pays candidats sont prêts à entrer dans l'UE". Anders Fogh Rasmussen a confirmé qu'il "n'y avait pas de retard dans le calendrier de l'élargissement à l'heure actuelle" et que la volonté du Danemark était de faire entrer dans l'UE les dix candidats : Slovénie, République tchèque, Slovaquie, Hongrie, Pologne, Lettonie, Lituanie, Estonie, Malte et Chypre. Le problème agricole. Le Premier ministre danois a cependant convenu qu'il demeurait des problèmes en suspens. Au premier chef, il s'agit du dossier agricole. De nombreux pays redoutent que les aides financières directes aux paysans des nouveaux entrants ne se fassent au détriment de la compétitivité de leur propre agriculture et ne réduisent les aides apportées à leurs propres paysans. Pour Anders Fogh Rasmussen, il est certain qu'on trouvera une "clarification de ce problème en temps utile et avant le sommet de Copenhague en décembre". Selon lui, la présidence espagnol a réglé 95% du dossier agricole sur l'élargissement. On peut cependant en douter à entendre les protestations de certains pays. Ainsi, mercredi, la Lettonie a mis en doute "l'honnêteté de l'UE dans les discussions sur l'agriculture". Le ministre letton des Finances, Gundars Berzins, considère en fait que l'UE n'arrive pas à gérer son élargissement.Questions en suspens. Les deux chefs d'Etat n'ont pas évoqué les autres problèmes majeurs qui restent en suspens dans le cadre de cet élargissement. On peut citer notamment celui de Kaliningrad, enclave russe au coeur de la future UE. Les Russes souhaiteraient que les habitants de l'ancienne Königsberg puissent passer en Lituanie sans visa comme actuellement, ce que les autorités européennes refusent toujours, pour cause de renforcement général des règles d'immigration. Reste en suspens également la question chypriote, non réglée depuis 1974 et qui fait l'objet d'interminables négociations. L'an dernier, la Turquie avait menacé de proclamer unilatéralement l'annexion de la République turque de Chypre du nord, ce qui aurait provoqué un grave conflit géopolitique entre l'UE et Ankara. Une nouvelle Commission. Enfin, le dernier problème issu de l'élargissement, et non des moindres, est celui des institutions. On sait qu'une convention chargée d'élaborer une future "constitution européenne" se réunit actuellement sous la présidence de Valéry Giscard d'Estaing. Mais ses travaux semblent traîner en longueur et son fonctionnement trop lourd est souvent critiqué. Du coup, Romano Prodi a préparé une réforme du fonctionnement de la Commission. Réforme qu'il soumettra demain à ses collègues et, s'il obtient leur agrément, qu'il proposera au sommet de Séville. Pour Romano Prodi, la Commission ne peut survivre en ne modifiant pas son fonctionnement actuel lorsque l'UE comptera 25 à 30 membres. Il propose donc de créer des "blocs" de compétence sous la charge de vice-présidents de la Commission. Chaque bloc déléguera une compétence propre à un commissaire. Ainsi, Romano Prodi a définit trois blocs possibles : l'un comprendrait les relations extérieures, le commerce internationel, l'aide au développement et l'humanitaire, le second l'emploi, les affaires sociales, la formation et la recherche et le dernier l'industrie, les transports et l'énergie. L'organe central de décision deviendrait ainsi le "cabinet" qui regroupera le président de la Commission et les vice-présidents. Pour rassurer les petits pays, Romano Prodi a affirmé que seule la compétence, et non le passeport, devrait présider au choix des vice-présidents.Reste à savoir si les chefs d'Etat accepteront de valider une réforme sans attendre les propositions concrètes de la convention et surtout, sans avoir réglé l'épineux problème du fonctionnement du Conseil européen. Car, à 25 ou 30, la règle de l'unanimité risquerait d'entraîner l'UE dans une paralysie mortelle.
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