Accord sur une nouvelle Politique agricole commune

Il aura fallu un an de luttes et de discussions serrées dans les couloirs de Bruxelles. Mais finalement, l'Union européenne s'est bel et bien dotée d'une nouvelle Politique agricole commune. Un accord de compromis a en effet été trouvé jeudi matin, donnant naissance à une PAC plus souple, comme le prônait le commissaire européen à l'Agriculture Franz Fischler, mais également une PAC qui préserve les aides à certaines catégories, comme les céréaliers, ce que voulaient par-dessus tout les gouvernements français et espagnols. L'accord a été adopté, selon la Commission, à "une très large majorité". Seul le Portugal a émis des réserves. Les réactions n'ont pas tardé. "Nous avons une réforme, la PAC va fondamentalement changer", s'est ainsi réjoui le porte-parole de la Commission, tandis que pour le commissaire Franz Fischler, il s'agit ni plus ni moins d'une "nouvelle ère" qui commence avec cet accord. Le ministre français du Budget, Alain Lambert, a déclaré sur RTL que cet accord était "une bonne nouvelle". Hervé Gaymard, le ministre de l'Agriculture, a estimé que ce compromis donnait "satisfaction" à la France. A Berlin, la ministre de l'Agriculture Renate Künast, qui avait rejoint voici deux semaines la position française, s'est "félicitée" de ce compromis. Mais ce concert de félicitations n'est pas unanime, notamment en France. Ainsi, l'Assemblée permanente des chambres d'agriculture (APCA) s'est inquiétée de cet accord "lourd de conséquences pour la place des agriculteurs dans notre société et pour l'avenir de l'agriculture". Elle dénonce notamment la "renationalisation rampante" et "l'absence de projet européen partagé pour l'agriculture". Quant aux Jeunes agriculteurs, ils estiment que l'accord "détruit 40 ans d'efforts pour construire une politique agricole "fondée sur l'organisation commune des marchés". Cette réforme "me fait mal et me laisse un goût amer", a affirmé le président des Jeunes agriculteurs, Jérôme Despey. Enfin, le président de la FNSEA, Jean-Michel Le Metayer, a indiqué être "profondément déçu de la nouvelle politique agricole commune, mais pas abattu". Que prévoit l'accord obtenu par les Quinze ? D'abord, la mise en place d'un paiement unique aux exploitations. Jusqu'ici, les exploitants agricoles pouvaient toucher de nombreuses aides à divers titres. Autre changement fondamental, le principe du découplage, c'est-à-dire de la déconnexion directe entre le montant de l'aide et le niveau de la production. Franz Fischler a dû faire son deuil d'un découplage total, mais la France a accepté l'idée d'un découplage partiel. Celui-ci interviendra dès 2005. Les céréaliers devraient cependant être encore très protégés. Néanmoins, des aménagements sont possibles selon les pays. Ainsi, l'Italie devrait pouvoir baisser la part de ses aides liées à la production pour obtenir des aides sur la production traditionnelle de blé dur. Concernant les prix d'intervention, c'est-à-dire les prix en deçà desquels l'UE aide les agriculteurs, un compromis a également été trouvé. Ces prix devraient substantiellement baisser pour les produits laitiers, mais rester inchangés pour les céréales. Enfin, dernière nouveauté, des critères environnementaux devraient être mis en place pour bénéficier des aides.Cette réforme pourrait satisfaire les différents pays de l'Union. La France a sauvegardé les intérêts de ses céréaliers, tandis que les petits pays ont obtenu une réduction du budget de la PAC et une vision plus "environnementaliste" de l'agriculture. C'est une modification d'importance dans un système qui fonctionnait tel quel depuis 45 ans. L'accord va désormais permettre de réouvrir le dossier agricole au sein de la l'Organisation mondiale du Commerce. Dès septembre, Franz Fischler pourra se rendre à Cancun, au Mexique, avec une vision claire de la politique agricole européenne. Ainsi, le porte-parole de la Commission considère que "cette décision historique renforce la position de l'UE dans les difficiles négociations de l'OMC". Franz Fischler, lui, a indiqué que cette réforme envoyait un "message très clair au reste du monde : notre politique est favorable au commerce". Et d'ajouter que "nous pouvons aborder avec optimisme l'échéance de Cancun". La discussion avec les Etats-Unis sur les subventions et l'ouverture des marchés agricoles peut donc s'ouvrir.
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