Raffarin, an II

C'est probablement la question la plus importante pour la suite. Jean-Pierre Raffarin ne peut se méprendre sur le sentiment des Français, sauf à vouer son passage à Matignon - et, au-delà, la législature - à l'échec.Les 49% de bonnes opinions que prête au Premier ministre le sondage Sofres publié samedi dernier par Le Figaro peuvent, au fond, s'interpréter de deux manières. La première hypothèse est que la moitié des Français est reconnaissante au chef de son gouvernement de "secouer" enfin "le cocotier" en s'attaquant aux réformes de fond : aujourd'hui les retraites, demain la santé et l'Etat. La seconde est que l'opinion - pour ne pas dire la "France d'en bas" - sait surtout gré à Jean-Pierre Raffarin de sa modération : elle apprécierait sa méthode des petits pas, sa manière de réformer sans bouleverser, son souci de la concertation et de la pédagogie, même si celle-ci frise parfois le ridicule (les fameuses "raffarinades").Ces deux hypothèses ne sont pas antinomiques. Tel est clairement, en tous les cas, le pari de Matignon : on peut mener à bien d'ambitieuses réformes sans être impopulaire. La réforme des retraites semble en passe d'en apporter une première démonstration. Elle est de taille. Même si, en laissant prudemment de côté les régimes spéciaux, le gouvernement laisse un trou béant dans un dispositif supposé rétablir l' "équité" entre tous les Français.Ce pari de la méthode est toutefois en passe de trouver ses limites. Passe encore de travailler quelques trimestres de plus pour une retraite un peu moins confortable. Mais s'il faut aussi payer plus pour se soigner, risquer son emploi chaque jour davantage, payer moins d'impôt sur le revenu pour voir s'alourdir d'au moins autant la fiscalité locale, les Français risquent de réclamer davantage au gouvernement que de la pédagogie.La première année de Jean-Pierre Raffarin à Matignon s'achève sur un constat en forme de paradoxe : le Premier ministre est - relativement - populaire parce qu'il a eu l'audace d'ouvrir de nombreux chantiers audacieux ; le Premier ministre est populaire parce qu'aucune de ses ambitions n'ayant été menée à terme, les Français n'en ont ressenti à ce jour aucun des effets potentiellement douloureux. La première de ces réalités pourra-t-elle survivre à la disparition de la seconde ? C'est toute la question de l'An II de Raffarin.(1) Titre de l'ouvrage paru en 1984, trois ans après la défaite de VGE face à François Mitterrand.
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