Graves incidents à Mossoul, première réunion de l'opposition à Nassiriyah

Alors que la calme s'installe sur le front militaire en Irak - seule information notable mardi, la reddition du commandement de l'armée irakienne dans l'ouest du pays -, de graves incidents se sont produits à Mossoul, la grande cité pétrolière du nord de l'Irak. Les versions présentant ces évènements divergent: alors qu'une foule importante s'était réunie sur une place de la ville pour écouter le nouveau gouverneur, les esprits se seraient échauffés quand ce dernier a appelé les Irakiens à coopérer avec les Etats-Unis. D'après certains témoignages, les troupes américaines auraient alors tiré sur la foule faisant au moins 10 morts et une centaine de blessés. Un porte-parole de l'armée américaine à Mossoul a démenti cette version en affirmant que les forces de la coalition avaient essuyé des tirs avant de riposter, en prenant soin d'éviter la foule. A un degré bien moindre, des tensions étaient également perceptibles à Bagdad. Ce matin, la capitale irakienne a été le théâtre d'une manifestation dans le centre-ville. Deux cents à trois cents personnes ont crié leur mécontentement devant l'hôtel Palestine, où l'armée américaine a installé un centre d'opérations. Les manifestants demandent le rétablissement des services publics et le déploiement de la police dans la capitale. Cinq jours après l'effondrement du régime, la vie retrouve progressivement son cours normal dans la capitale irakienne. L'électricité est le problème central de Bagdad où vivent plus de cinq millions d'habitants. Ni les commerces, ni les entreprises, ni les institutions publiques comme les hôpitaux ne peuvent fonctionner sans courant et la vie quotidienne en est considérablement affectée.C'est dans ce contexte que s'est déroulée la première rencontre entre différentes factions de l'opposition irakienne. Cette réunion initiée par les Etats-Unis s'est tenue à Ur, près de Nassiriyah dans le sud du pays. L'objectif avoué de cette rencontre est de faire émerger dans un délai de quelques semaines une nouvelle autorité civile pour l'Irak, prélude à un gouvernement démocratique. Environ 80 déléguéés ont participé à cette réunion, ils ont estimés à sa conclusion que le nouveau système de gouvernement irakien devra être "un système fédéral démocratique" sur la base d'une "consultation nationale". Les parties ont décidé de se revoir dans dix jours. La délégation américaine à cette réunion sera conduite par le représentant spécial de la Maison Blanche auprès de l'opposition irakienne, Zalmay Khalilzad.Cette rencontre n'a cependant pas fait l'unanimité parmi les opposants à Saddam Hussein. Près de 20.000 manifestants, majoritairement des opposants chiites ont d'ailleurs manifesté ce matin à Nassiriyah pour dénoncer cette rencontre. "Oui, oui à la liberté !", "Oui, oui à l'islam !", "Non à l'Amérique, non à Saddam !", répétait en choeur la foule, rassemblée dans le centre-ville. Le principal groupe d'opposition chiite, l'Assemblée suprême de la révolution islamique en Irak (Asrii), a pour sa part boudé la rencontre, refusant par la voix de son numéro deux Abdel Aziz al-Hakim de se "mettre sous la férule des Etats-Unis ou de tout autre pays, car cela n'est pas dans l'intérêt des Irakiens". Le plus visible des opposants irakiens à l'étranger, Ahmad Chalabi, le chef du Conseil national irakien (CNI), n'est pas venu mais s'est fait représenter. La Syrie dans l'oeil du cyclonePar ailleurs, les forces de la coalition ont débuté en Irak la fouille de tous les sites susceptibles de recéler des armes de destruction massive, dont l'éventuelle détention par le régime déchu a servi de principale justification à l'intervention armée américano-britannique. "C'est un processus très long et méticuleux", a précisé le major américain Rumi Nielson-Green au quartier général de la coalition (Centcom) au Qatar. Pour sa part, le général Vincent Brooks, également du Centcom, a estimé "inapproprié" d'inviter l'Onu à ces recherches. Mais désormais, Américains et Britanniques tournent leurs regards vers Damas, qu'ils accusent de détenir des armes chimiques et de donner asile à des dignitaires irakiens ayant fui l'offensive de la coalition. Le porte-parole de la Maison Blanche Ari Fleischer a qualifié le régime de Damas d'"Etat voyou" et le secrétaire d'Etat américain Colin Powell a évoqué la possibilité de sanctions "de nature diplomatique, économique ou autre" contre Damas. Le secrétaire à la Défense américain Donald Rumsfeld a affirmé que les Américains avaient "vu des tests d'armes chimiques en Syrie au cours des 12 à 15 derniers mois", alors que la Syrie dément formellement détenir ce type d'armes. Allant dans le même sens, le chef de la diplomatie britannique Jack Straw a indiqué au Qatar que la Syrie doit "répondre à des questions très importantes" dont celles portant sur des armes chimiques ou l'accueil de fugitifs irakiens. Pour sa part, le Premier ministre israélien Ariel Sharon a souligné que le président syrien Bachar al-Assad était "dangereux". Damas a réfuté en bloc ces accusations. Une porte-parole du ministère syrien des Affaires étrangères, Boussaïna Chaabane, a rejeté les "allégations infondées" adressées à son pays et plaidé pour "un dialogue constructif" avec Washington. Pour leur part, la France comme la Turquie ont indiqué ne pas avoir de preuve des accusations de Washington contre la Syrie. Le secrétaire général des Nations unies Kofi Annan a averti qu'il ne fallait pas que des déclarations sur la Syrie viennent déstabiliser le Proche-Orient, sans toutefois s'en prendre explicitement aux accusations lancées par Washington, Londres et Israël. Au Caire, la Ligue arabe a exprimé sa "vive inquiétude" et un conseiller du président égyptien Hosni Moubarak a mis Washington en garde contre la tentation de "viser un pays arabe après l'autre". A Moscou, un vice-ministre des Affaires étrangères a appelé les Etats-Unis "à plus de retenue dans leurs déclarations" concernant la Syrie. Les ministres des Affaires étrangères de l'Union européenne réunis à Luxembourg pour parler de l'après-guerre en Irak ont aussi lancé des appels à la modération.
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