D'apparence, la punition sonne exemplaire: la justice américaine a condamné la famille Uzan à verser 4,26 milliards de dollars à l'équipementier Motorola, qui a ouvert une action en justice en janvier 2002. Le groupe américain et son concurrent Nokia réclamaient 3 milliards de dollars aux membres de cette famille milliardaire, qui possède l'opérateur mobile Telsim, en remboursement de sommes qu'ils avaient prêtées.Si les deux premiers équipementiers mondiaux, dans l'ordre, Nokia et Motorola, ont consenti de tels prêts - 2 milliards pour l'américain -, c'est qu'ils comptaient sur les Uzan pour développer en Turquie l'opérateur que la famille contrôle, Telsim. Les sommes étaient censées servir à acheter des équipements pour les réseaux GSM (stations relais, commutateurs et téléphones) et à régler un acompte au gouvernement pour l'acquisition d'une licence de téléphonie. Selon les accusations portées par les deux géants mondiaux des télécoms, la famille Uzan n'a jamais eu l'intention de les rembourser et a détourné une grande partie de l'argent - au moins un milliard de dollars selon les éléments de l'enquête - à des fins personnelles. Des sommes qui ont servi à renflouer d'autres sociétés appartenant au clan mais aussi à offrir des babioles de milliardaires, yachts de luxes, appartements de prestiges à Manhattan et autres hélicoptères. Devant les tribunaux américains, Motorola semble avoir eu gain de cause. Mais la satisfaction risque d'être symbolique. Car personne ne croit que les Uzan, qui défraient régulièrement la chronique médiatico-judiciaire, n'enverront de mandat-lettre à Motorola. Autre décision qui a peu de chance d'être appliquée, le juge Jed Rakoff a ordonné que différents membres de la famille soient arrêtés et incarcérés dans le cas où ils se rendraient en territoire américain. Parmi eux, le patriarche Kemal dont la fortune est estimée par Forbes à plus de 1,3 milliard de dollars, et le fils Cem, sérieux prétendant politique turc. Jed Jakoff a enfin demandé à la famille d'envoyer à la cour d'ici une semaine 73,5% des actions qu'elle détient dans Telsim, et qu'elle avait mis en garantie des prêts accordés par les équipementiers. Dans le cas contraire, les Uzan se verraient contraints de verser à Nokia une autre amende de 853 millions de dollars.Dans la péninsule anatolienne, on n'est pas disposé à se laisser impressionner. Hakan Uzan, le directeur général de Telsim a indiqué dans un communiqué que la famille ferait appel, mais que de toutes façons, le litige n'avait pas à être réglé aux Etats-Unis. "A l'instar de la plupart des contrats internationaux, l'accord avec Motorola et Nokia spécifie que tout conflit doit être réglé en Suisse", a-t-il également affirmé.

latribune.fr

20 Oct 2008, 0:36

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