Chacun sa méthode

Le Premier ministre britannique n'a jamais caché qu'il admirait la trempe de celle qui le précéda au 10, Downing Street de 1979 à 2000. Mais de là à imaginer qu'il envisagerait un jour de se montrer plus radical encore que Margaret Thatcher dans la gestion des deniers publics, il y a un pas que beaucoup auraient hésité à franchir.Pourtant, selon le Financial Times, Tony Blair examine depuis quelques jours un programme qui ne fait pas dans la nuance : Sir Peter Gershon, l'un des patrons de la fonction publique britannique, lui propose tout simplement d'éradiquer 80.000 postes dans la fonction publique en simplifiant drastiquement la structure gérant les achats public: à 400 implantations locales succéderaient... quatre bureaux centralisés. Montant des économies réalisées : 10 à 15 milliards de livres (15 à 22 milliards d'euros), soit l'équivalent du déficit budgétaire attendu cette année, de l'ordre de 13 milliards de livres."La France a été obligée de renoncer à son projet de supprimer 30 000 emplois publics après les violentes réactions des syndicats et des fonctionnaires", rappelle perfidement le quotidien des affaires. Il aurait pu ajouter qu'il serait d'autant plus malvenu de mettre un tel sujet sur le tapis en année électorale.Il y a toutefois un petit souci. Le gouvernement français a promis à ses partenaires européens de faire passer son déficit public d'un peu plus de 4% du PIB en 2003 à 3,6 en 2004, puis en deçà de 3% en 2005. C'est mal parti, ne serait ce qu'en raison du creusement prévisible du déficit de la sécurité sociale. Après France Telecom, fournisseur providentiel d'une "soulte" de 5,7 milliards d'euros en 1997, EDF s'apprête donc à son tour à soutenir les finances publiques en échange de la prise en charge par le régime général des retraites de ses salariés, a rapporté le Figaro hier matin. La soulte serait de 8 à 10 milliards d'euros, soit au moins 0,3 point de PIB.Aux mauvais esprits qui voyaient là un moyen commode, quoiqu'un peu voyant, pour tenir ses promesses budgétaires, Bercy a tenu à rappeler que la manne d'EDF "n'est pas un outil de pilotage des finances publiques". Disons que c'est simplement une heureuse coïncidence.S'il suit les conseils de ses hauts fonctionnaires, Tony Blair entend pour sa part consacrer sa "soulte" au financement de la santé publique, de l'éducation ou de la police. Les deux premiers sont des domaines dans lesquels il est loin d'avoir tenu ses engagements électoraux et se sait attendu au tournant. Mais rien ne dit que l'échine des fonctionnaires britanniques sera nécessairement beaucoup plus souple que celle de leurs homologues français. Quelque 85.000 employés du ministère du Travail ont démarré hier une grève de deux jours pour réclamer de meilleurs salaires. Il s'agit de la mobilisation la plus importante en treize ans.Peut-être Tony Blair préférerait-il lui aussi avoir une soulte à sa disposition. Mais le marché britannique de l'électricité est déréglementé et concurrentiel. Et British Energy, premier producteur d'électricité nucléaire du pays, a réclamé en décembre dernier au gouvernement... un soutien financier pour supporter la forte volatilité des prix. Chacun sa méthode. Chacun ses ennuis.
Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.