La Ka-shing machine

Musique tapageuse, images de ports, de gratte-ciels, de téléphones mobiles, d'usines d'eau minérale, de centrales électriques pour illustrer la liste impressionnante d'activités du conglomérat, mappemonde couverte de réseaux d'enseignes comme des tentacules se déployant depuis Hong Kong... Le clip vidéo de présentation d'Hutchison Whampoa, diffusé vendredi à la presse et aux investisseurs, aurait sans doute abasourdi, sinon épouvanté, les vendeuses de la chaîne de parfumeries Marionnaud, dont le puissantgroupe du milliardaire Li Ka-shing s'apprête à ne faire qu'une bouchée. Bienvenue dans la "world company", version mandarine. Seront-elles rassurées de savoir que ce "Monsieur Li" (Ka-shing étant son prénom) vient de Hong Kong, en mandarin "le Port des parfums" ? Qu'il est un septuagénaire autodidacte, comme le fondateur de Marionnaud, Marcel Frydman, qu'elles appellent "Papy" ? Point d'inquiétude à formuler en tous cas sur la solidité de son assise financière. "Mister Money", comme on l'appelle dans l'ex-colonie britannique pour sa capacité légendaire à transformer tout ce qu'il touche en "cash", est à la tête d'un empire: Hutchison Whampoa Limited, qui figure dans la très sélecte liste des "Fortune 500", avec un chiffre d'affaires dépassant 14 milliards d'euros, 14 fois plus que Marionnaud. Quant à sa fortune personnelle, elle est estimée à 12,4 milliards de dollars - un peu moins que Liliane Bettancourt, Madame L'Oréal... L'homme le plus riche d'Asie pointe au 19ème rang des grandes fortunes mondiales selon le classement de Forbes. Ce Donald Trump asiatique, en plus discret et plus sage, toujours affublé de lunettes d'un autre âge, se pique aussi de philanthropie... Son OPA sur Marionnaud serait-elle ces "mille et une preuves d'amour" que l'enseigne prône dans ses réclames ?Le richissime Li Ka-shing propose-t-il par charité 535 millions d'euros, hors dette bancaire, un prix "inespéré" selon les analystes ? Incrédules, les experts sont eux-mêmes bien en mal de donner une valeur à l'enseigne, première chaîne de parfumerie en France et deuxième en Europe, en l'absence de chiffres fiables depuis la révélation de 93 millions d'euros d'erreurs comptables. Les associations de minoritaires et certains gérants de fonds, agacés, craignent déjà de se faire avoir avec une OPA décidée sur la bases d'éléments dont ils ne disposent pas. Les hommes de Li Ka-shing, les pros de la distribution de sa filiale AS Watson, ont flairé la bonne affaire : ils regardaient depuis trois ans la société, à la gestion familiale inadaptée à sa croissance effrénée à coups d'acquisitions de magasins. Ils ont attendu le premier report de publication des résultats et le parfum de scandale comptable pour inviter les Frydman à négocier. Le moment parfait pour tomber "In the mood for deals"... Quand on aime, on ne compte pas, dit-on ?
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