Quitter son poste : clauses et effets

Les clauses de non-concurrence et autres clauses similaires sont utilisées par les banques afin d'éviter que des banquiers de haut niveau ne quittent la banque pour rejoindre la concurrence. Les clauses standard stipulent que l'ancien employé sera sanctionné s'il décidait de travailler pour certains concurrents sur une période et une zone géographique déterminée. On trouve quelques variations sur ce thème: en particulier une clause prévoyant que l'ancien employé devra abandonner ses droits sur des titres, options et autres bénéfices, s'il décidait de partir travailler pour un concurrent. Ce type de clauses de résiliation est extrêmement fréquent, comme en témoignent les contrats de travail des seniors Tarik Meguid et Joseph Perella qui ont quitté Morgan Stanley le mois dernier. Chacun pourrait perdre près de 6,4 millions de dollars (soit 5,2 millions d'euros) s'il décidait de rejoindre avant le 31 décembre l'un des 85 concurrents de la banque, d'American Express à Goldman Sachs. Tarik Meguid et Joseph Perella devraient également renoncer à ces sommes s'ils se comportaient mal vis-à-vis de leur ancien employeur, en particulier s'ils parlaient en termes méprisants de leur ancienne banque ou s'ils s'associaient au "groupe des huit" anciens dirigeants de chez Morgan Stanley qui exigent le départ du président-directeur général Philip Purcell. Adam Chinn, expert en indemnisations au sein du cabinet d'avocats Wachtell Lipton Rosen & Katz à New York, a rédigé des contrats pour la banque. Il explique que les conditions sont généreuses mais pas nécessairement rares. "Les clauses de non-concurrence sont de plus en plus fréquentes dans la mesure où se multiplient les chaises musicales à Wall Street. Les sociétés ont pris ce phénomène en compte et réagissent plus vigoureusement," explique-t-il. Les clauses de non-dépréciation sont insérées dans la plupart des contrats des banquiers seniors travaillant chez Morgan Stanley, affirme Chinn qui s'est refusé à tout autre commentaire. Selon Joël Cohen, associé en droit du travail au sein du cabinet d'avocats McDermott Will & Emery à New York, le fait de soumettre le paiement de titres et d'options à la condition de ne pas aller travailler pour les concurrents est connu comme la doctrine du choix de l'employé. Si l'employé travaille pour la concurrence, il perdra l'argent auquel il aurait normalement eu droit. Une clause de ce type est parfois plus facile à mettre en oeuvre qu'une clause de non-concurrence standard interdisant clairement à l'employé de travailler pour un concurrent, souvent considérée comme un frein à la concurrence. Stan O'Neal et d'autres seniors de chez Merrill Lynch ont signé des clauses similaires en septembre dernier: ils perdront droit à leurs titres et options s'ils décident de quitter la banque pour la concurrence avant une date déterminée. Lazard a offert des titres assujettis à des restrictions à ses banquiers seniors avant l'introduction en Bourse du mois dernier. Charles Ferguson, avocat travaillant dans la City de Londres, explique que des clauses de ce type sont très répandues en Europe. Dans la mesure où les actions peuvent être différées jusqu'à cinq ans, les contrats utilisant ce type de clauses peuvent garder l'ancien employé à l'écart du marché plus durablement que les clauses de non-concurrence, généralement limitées de 6 à 12 mois. Souvent, un employé n'accepte de travailler pour la concurrence que si le nouvel employeur compense la perte des titres qui ne lui ont pas été payés. Pour Jonathan Baines, chasseur de tête chez Whitehead Mann à Londres, les nouveaux employeurs acceptent cette condition lorsque le coût n'est pas trop élevé. "Un nouvel employeur mettra en oeuvre un nouveau programme de titres et options correspondant à ce que l'employé a perdu dans la même période" explique-t-il. Dans le cas de Tarik Meguid et Joseph Perella, leur principale motivation à respecter leurs engagements n'est pas la perte potentielle de titres et d'options mais le paiement de leur bonus pour l'année: 5,2 millions d'euros, soit la moitié de leur bonus de l'année dernière. En général, un employé qui décide de partir volontairement ne reçoit rien. Mais pour Jack Coffee, professeur à l'université de droit de Columbia, l'arrangement proposé par Morgan Stanley représente un système de motivation positive ou une prime de politesse pour encourager Tarik Meguid et Joseph Perella à respecter leurs engagements. Les montants versés en ont surpris plus d'un. Pour Richard Bove, analyste chez Punk Ziegel & Company, cet arrangement excessif pourrait motiver les autres employés seniors de chez Morgan Stanley à faire du chantage à la banque en la menaçant de partir. "Ils récompensent ces employés qui démissionnent en leur versant 13 millions de dollars. Cela pourrait être un motif de démission pour d'autres employés et cela transforme les actionnaires en véritable caisse noire", explique Bove. Morgan Stanley s'est refusé à tout commentaire. En avril, le New York Post a annoncé que la banque offrait aux seniors en equities et banque d'investissement des titres représentant entre 5 et 7 millions de dollars à la condition que les employés bénéficiaires soient encore employés par la banque à la date déterminée trois à cinq ans plus tard. Cette offre n'a pas eu l'effet escompté dans la mesure où Raymond McGuire, ancien co-directeur du département fusions et acquisitions, a récemment quitté la banque pour rejoindre Citigroup. Un autre moyen est parfois utilisé. Quand Lazard a été introduite en Bourse, la banque a demandé aux six autres banques travaillant sur le deal de signer des contrats aux termes desquels elles acceptaient de ne pas débaucher ses employés pendant des périodes atteignant deux ans. Si Morgan Stanley fusionnait n'importe laquelle de ses activités avec un concurrent, elle pourrait faire des demandes similaires aux bénéficiaires des honoraires de conseil.
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