"Le bilan économique de Tony Blair devrait peser dans la balance"

latribune.fr - Quel est l'état de santé de l'économie britannique à quelques semaines des élections législatives ? Renaud Châteauvieux - En dépit d'un léger ralentissement de l'activité au cours du second semestre, l'économie britannique, qui a enregistré un taux de croissance de 3,1% en 2004, reste particulièrement dynamique. Depuis l'accession des Travaillistes au pouvoir, le Royaume-Uni a connu une période de croissance ininterrompue de trente trimestres. La progression moyenne du PIB a été de 0,7% par trimestre et de 2,8% par an depuis 1997. A titre de comparaison, sur la même période, la croissance moyenne de la zone euro s'est élevée à 2,1% par an. A un peu moins de trois semaines des élections législatives outre-Manche, qui se tiendront le 5 mai, cette bonne santé de l'économie britannique devrait peser dans la balance et jouer en faveur du gouvernement travailliste de Tony Blair. Quels sont les facteurs de soutien de l'économie outre-Manche ?La consommation des ménages a constitué le principal moteur de l'économie l'année dernière. Elle devrait à nouveau être le principal support de la croissance cette année, même si l'effet richesse lié à la formidable augmentation des prix immobiliers enregistrée en 2004 (+18,9% selon la banque Halifax) devrait être moins fort. En effet, après les sommets atteints l'année dernière, au cours de laquelle la consommation des ménages a progressé de 3,3%, leurs dépenses devraient rester soutenues même si elles devraient ralentir légèrement cette année. Outre le fait que les Britanniques se montrent toujours globalement confiants dans la situation économique générale du pays, cette frénésie de dépenses devrait être également soutenue par la situation de plein emploi et par la hausse des salaires qui, selon nous, progresseront de plus de 4% environ cette année. Quelles sont les réformes qui ont été engagées par le gouvernement travailliste pour faire chuter le taux de chômage ?Le gouvernement travailliste a décidé de mettre l'accent sur les incitations au retour à l'emploi en réduisant notamment les allocations chômage. Et ça marche! Grâce à cette politique volontariste baptisée "welfare to work", qui s'est également traduite par une forte progression des embauches dans le secteur public - plus de 920.000 sur la période - le taux de chômage au sens du Bureau International du Travail n'a cessé de se réduire pour atteindre 4,7% de la population active. Au total, depuis 1997, l'économie britannique a créé plus de 2,1 millions d'emplois et le taux d'emploi atteint désormais 75%, contre 63% en France. Cette demande intérieure toujours soutenue, ainsi que la rentabilité élevée des entreprises (13,4% au quatrième trimestre 2004 pour les entreprises privées non financières), devraient également stimuler l'investissement, le second moteur de la croissance. Quant à la construction, dopée par l'insuffisance de l'offre de logements par rapport à la demande, elle devrait représenter un soutien important à l'activité. Ce recul du taux de chômage a-t-il provoqué une augmentation du travail précaire (CDD, intérim) ?En effet, cette progression du nombre de postes s'est accompagnée d'un développement important des formes atypiques d'emploi, le temps partiel, qui représente environ un quart de l'emploi total, ayant plus rapidement augmenté que l'emploi total (+11% contre +8%). Mais ce phénomène doit être relativisé. Selon l'Office National des Statistiques, 75% des personnes travaillant à temps partiel le font de manière volontaire. Par ailleurs, l'emploi temporaire a diminué de plus de 302.000 personnes sur la période et ne représente plus que 6% de l'emploi total, contre 7% en 1997.Ce dynamisme n'est-il pas paradoxal alors que la désindustrialisation de l'économie britannique se poursuit ? En effet. C'est le secteur tertiaire qui tire désormais la croissance, l'industrie restant à la traîne. Dans le pays qui fut le berceau de la révolution industrielle, les services représentent désormais 70% du PIB. Et les perspectives du secteur secondaire ne sont guères réjouissantes. En témoigne la mise en faillite récente du dernier constructeur automobile britannique, MG Rover. Une hausse de 1,5% de la production industrielle en 2005 apparaîtrait comme un maximum. La consommation des ménages n'est-elle pas menacée par le risque d'éclatement de la bulle immobilière ?Le relèvement du taux directeur de la Banque d'Angleterre (BoE), entamé en novembre 2003, semble faciliter un atterrissage en douceur du marché immobilier qui a touché un plus haut en 2004 (+22,3% en juin en glissement annuel). A cause du renchérissement du coût du crédit - le taux directeur a été porté à 4,75% en août dernier -, le marché commence à s'apaiser et la hausse des prix ralentit progressivement. Le marché immobilier est très important outre-Manche. En effet, parce que les ménages britanniques recourent très souvent à l'endettement pour consommer et apportent aux banques et autres organismes de crédit leurs biens immobiliers comme gage de solvabilité, un écroulement du marché de la pierre pourrait peser sur la consommation des ménages. Et, par conséquent sur la croissance britannique. Quelles sont vos prévisions de croissance pour 2005 et 2006 ?Le "miracle économique britannique" devrait se poursuivre, même si la tendance est actuellement au ralentissement. Les perspectives de croissance restent en effet favorables. Nous anticipons une croissance de 2,7% cette année et un léger rebond de 0,2 point en 2006, au dessus du potentiel de croissance qui oscille entre 2,6% et 2,7%.
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