La promesse de Bush

C'est entendu, la portée symbolique des mesures préconisées hier par George W. Bush est importante. Pour la première fois depuis son installation dans le bureau ovale, au début 2001, le quarante-troisième président des Etats-Unis fait une double concession, de taille: un, le creusement du déficit budgétaire est un problème; deux, il faut prendre des mesures pour le contenir.Il joint le geste à la parole, adressant au Congrès un projet de budget 2006 incarnant une rigueur sans précédent sous son règne. Hors défense et sécurité intérieure, les dépenses discrétionnaires de l'Etat fédéral sont appelées à baisser de près de 1%. 150 programmes gouvernementaux seront réduits ou supprimés, permettant d'économiser 15 milliards de dollars.Résultat: le déficit budgétaire de l'année fiscale qui s'achèvera le 30 septembre 2006 est projeté à 390 milliards de dollars (3% du PIB), après 427 milliards attendus l'année précédente.Il n'y a qu'un seul problème: aux Etats-Unis, aucun économiste, aucun expert des finances publiques ne croit à ce scénario. Et il est vrai que les raisons de douter ne manquent pas.Précisons d'abord que la rigueur préconisée par la Maison Blanche est relative. Les 2.570 milliards de dollars de dépenses publiques prévues constituent un record. La réduction projetée du déficit repose davantage sur l'impact espéré de la croissance sur les recettes fiscales (attendues en hausse de 6,1% sur un an) que sur l'effort de maîtrise des dépenses publiques (en progression de 3,5% par rapport à 2005).La première raison de douter est la suivante: même si le projet de budget était adopté tel quel, il n'aurait aucune chance de réduire durablement le déficit. Ce ne sont pas 15 milliards d'économies qu'il faut réaliser, estime les experts, mais au moins 50 par an.La deuxième raison est qu'il n'a de toute façon aucune chance d'être adopté en l'état. Comme chaque année, les parlementaires du Congrès vont le passer à la moulinette et seront d'autant moins tentés par la rigueur que 2006 est une année électorale (la totalité de la Chambre des Représentants et un tiers du Sénat seront renouvelés). L'expérience de l'an dernier est éclairante : le président Bush avait appelé à la suppression de 65 programmes publics devant permettre 4,8 milliards d'économies; le Congrès a voté le retrait... de quatre programmes générant 200 millions de dollars d'économies.La troisième raison prend la forme d'une longue liste. Celle de toutes les dépenses que le projet de budget présidentiel n'a pas recensé. Des exemples? Les conflits en Irak et en Afghanistan (80 milliards de dollars de "rallonge" réclamés cette année, au moins autant l'an prochain); le trou gigantesque qui apparaîtra bientôt dans le régime public des retraites (2.000 milliards de dollars sur dix ans); la réforme projetée de l'"impôt alternatif minimum" qui fait en sorte que les entreprises et les particuliers aisés ne puissent complètement échapper à l'impôt en multipliant les déductions (500 milliards de dollars sur dix ans); enfin, la pérennisation des baisses d'impôts de 2001 et 2002 (au moins 1.300 milliards de dollars sur dix ans).La plupart de ces échéances ne sont pas imminentes. Mais aucune n'est évitable. En attendant, il a suffi au président Bush de manifester de bonnes intentions pour que le marché des changes se remette à acheter du dollar. Il lui reste à présenter un réel effort de redressement budgétaire pour éviter la rechute.
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