La faute au plombier polonais

Le plombier polonais, c'est la victime expiatoire de cette fin de campagne pour le référendum du 29 mai. Celui que le camp du "non" jette en pâture à chaque meeting ou devant chaque micro. Le plombier polonais, c'est l'ennemi. La Constitution européenne, c'est le sésame qui lui ouvre grand les portes du marché français, où il viendra voler le travail des plombiers français pour une bouchée de pain (le SMIC polonais est à peine supérieur à 200 euros par mois, le salaire moyen de l'ordre de 550 euros).Le plombier polonais aurait pu connaître une carrière médiatique éphémère, mais l'ex-commissaire européen Frits Bolkestein, ci-devant auteur de la directive éponyme sur les services, s'est plaint de ne pouvoir trouver un plombier quand il en avait besoin pour sa résidence secondaire du nord de la France.Il n'en fallait pas plus pour que les limiers de la presse française se mettent en chasse. Conclusions: 1) plusieurs plombiers officient dans un rayon de quelques kilomètres de la résidence de M. Bolkestein; 2) ils se déplacent même les jours fériés; 3) cependant, peut-être l'ex-commissaire européen aurait-il dû attendre un peu car... la France manque de plombiers. Elle en a 180.000, il lui en faudrait 6.000 de plus, estime la chambre syndicale du métier...L'acharnement sur le plombier polonais est ridicule. Mais ce n'est pas une raison pour l'ignorer. Pas plus qu'il ne faut balayer d'un revers de main les préoccupations de nouveau exprimées hier par les transporteurs routiers de la FNTR qui ont perdu en treize ans 20% de leur part de marché du transport international transitant par la France, et font face aujourd'hui à la concurrence de chauffeurs venus de l'Est dont les salaires sont trois fois moins élevés.Ce n'est pas la révélation, la semaine passée, que des poteaux téléphoniques de France Télécom ont été installés par les salariés portugais d'une entreprise originaire de ce même pays, Visabeira, qui a contribué à la sérénité du débat sur le sujet. Peu importe que le Portugal soit membre de l'Union Européenne depuis bientôt vingt ans et que son adhésion ait largement profité à ses partenaires, y compris la France.Devant de telles inquiétudes, défenseurs du "oui" et partisans du "non" sont au moins d'accord sur un point: la Constitution n'offre pas la parade miracle contre les risques de délocalisation ou d'immigration. Mais alors que les premiers expliquent que ce n'est tout simplement pas son rôle, les seconds pensent le contraire. Ils leur reste à expliquer en quoi consiste cette parade miracle, et en quoi voter non favorisera son avènement.Les électeurs exigeront-ils cette explication? C'est peut-être là que réside la principale clé du scrutin.
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