Skype, le téléphone sur Internet bientôt payant ?

Souvenez vous, il y a un presque un an (le 17 septembre 2004), nous avions intitulé cette chronique, "Skype, ou la fin du téléphone payant". Le petit logiciel qui permet de téléphoner gratuitement, d'ordinateur à ordinateur, créé par les inventeurs du système d'échange peer-to-peer Kazaa, venait de fêter son premier anniversaire, et revendiquait déjà 9,5 millions d'inscrits. Skype n'était encore qu'un bon tuyau qu'on s'échangeait entre amis. Mais déjà, les déclarations de l'un de ses inventeurs, Niklas Zennström, selon lesquelles "l'idée de faire payer les appels appartient maintenant au siècle dernier", sonnaient comme une menace pour les opérateurs de télécommunications et leurs revenus tirés de la voix... Un an plus tard, Skype a conquis 51 millions d'utilisateurs dans le monde. Il veut sortir du PC pour s'attaquer aux communications vers les terminaux mobiles. Les entreprises qui ont compris toute l'économie qu'elles pouvaient en tirer sur leur facture téléphonique, équipent de plus en plus systématiquement les postes de leurs salariés, et incitent leurs interlocuteurs extérieurs à communiquer avec elles via Skype. Le petit jeu entre amis est devenu outil de rationalisation des coûts. Sa capacité à bouleverser l'économie du secteur des télécoms n'est plus une simple vue de l'esprit.L'organe américain de régulation des télécommunications, la Federal Communications Commission (FCC), s'en inquiète. Elle vient de publier une proposition pour taxer la voix sur IP (VoIP), c'est à dire les communications utilisant le protocole Internet. Skype, et les systèmes équivalents, en plein essor comme MSM Messenger et autres Google Talk, lancé dernièrement, sont dans le collimateur. Objectif de la taxe: financer l'accès à tous au service téléphonique traditionnel, le fameux Service Universel. Il y a un an, la FCC pensait tout autrement. Elle considérait la VoIP comme un service Internet, au même titre que l'e-mail et le peer-to-peer, et estimait donc qu'elle n'avait pas à être régulée. Aujourd'hui, le régulateur américain estime que "la forte baisse du trafic filaire longue distance sur les réseaux téléphoniques commutés (RTC), le déploiement des réseaux IP et la forte augmentation du nombre d'utilisateurs de la VoIP, changent la donne". Le projet émane de Robert Nelson, ancien commissaire des services publics du Michigan. On ignore s'il consisterait à taxer à la durée ou selon un montant forfaitaire, à chaque communication. Quoi qu'il en soit, il sonnerait le glas de la téléphonie gratuite. Scandaleux, s'insurgent déjà les "skypeurs", qui dénoncent la contre-offensive d'un lobby du secteur télécoms aux abois, cherchant à faire perdre aux nouveaux arrivants un atout concurrentiel imparable, celui de la gratuité. Mais face à un service offert gratuitement, il faut toujours se demander qui le finance; Skype, par exemple, a commencé à recruter des abonnés (2 millions déjà) payants, qui l'utilisent pour communiquer - à faible coût - vers les fixes et les mobiles. Son service gratuit sur PC est un produit d'appel pour cette activité commerciale. Il utilise un réseau financé par les abonnements Internet. Si ce réseau devait définitivement supplanter le vieux réseau commuté, il faudrait bien pouvoir garantir à chacun un accès universel, des appels vers les numéros d'urgence, des cabines au coin des rues... Qui doit mettre la main à la poche pour cela? Les utilisateurs de Skype et autres services de VoIP, les pouvoirs publics, les opérateurs qui perçoivent l'abonnement Internet? La proposition de la FCC a le mérite d'ouvrir le débat. La réponse apportée n'est pas forcément satisfaisante.
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