Fin de l'euphorie pour les foncières

Depuis trois ans, le marché des foncières cotées ne cesse de se consolider, marqué par les rachats successifs de Sophia, Bail Investissement et Gecina, tout récemment acquise par l'Espagnol Metrovacesa. "Ces opérations de consolidation sont la conséquence mécanique de la revalorisation des actifs nets des foncières après l'adoption du nouveau statut SIIC fin 2003", explique Scander Bentchikou, analyste chez Groupe ETC Pollak Prebon.En effet, la loi sur le nouveau régime fiscal permet d'obtenir l'exonération d'impôt sur les revenus et les plus-values des foncières à condition que celles-ci distribuent 85% du résultat courant et 50% des plus-value. Dès lors, la décote historique qui était appliquée en Bourse sur l'actif net réévalué des foncières françaises s'est fortement réduite. "On est passé d'une décote de l'ordre de 40% à une décote proche de zéro", constate Benoît Faure-Jarrosson, analyste chez Fideuram Wargny, qui ajoute: "de décembre 1998 à l'été 2004, les foncières ont vu leurs cours de Bourse progresser de 60% alors que le CAC 40 pour sa part reculait de 10%".Du coup, les actionnaires principaux des foncières ont trouvé une bonne raison de céder leurs participations. "Les grands actionnaires étaient bloqués car la décote qui pesait sur les actifs nets des foncières dont ils détenaient des participations se serait traduite en moins-values dans leurs comptes s'ils avaient choisi de les céder", explique Scander Bentchikou. A l'inverse, les revalorisations ont permis d'obtenir des "sur-cotes" motivant d'autant plus les sorties d'actionnaires... Une situation qui explique que le groupe AGF ait vendu Sophia puis sa participation dans Gecina, ou encore que le groupe Aviva ait mis en vente la Société Foncière Lyonnaise. "En outre, le statut SIIC permet au repreneur de céder des actifs pour se désendetter sans payer d'impôt sur la plus-value", ajoute Benoît Faure-Jarrosson. En somme, tous les ingrédients étant réunis pour favoriser les opérations de fusions et acquisitions, les foncières françaises se voient rachetées les unes après les autres, le plus souvent par des étrangères, séduites à la fois la diversification de leurs revenus, un meilleur rendement et un avantage fiscal conséquent. Du coup, "il ne reste plus grand-chose à faire en termes de consolidation du secteur", reconnaît Benoît Faure-Jarrosson.Appauvrissement de la coteAinsi, après une période d'euphorie boursière portée par la spéculation, le secteur semble s'essouffler, faute de participants. Car, si quelques possibilités d'opérations subsistent, comme Klépierre, détenue en partie par BNP Paribas, Silic, filiale de Groupama, ou encore Unibail, dont la taille est le seul rempart à une OPA, ces possibles rapprochements contribueraient à l'appauvrissement - déjà bien avancé- du secteur asséché des foncières cotées.Les analystes financiers se montrent d'ailleurs sceptiques vis-à-vis de l'avenir boursier du secteur. Car, si la loi sur le régime SIIC avait pourtant prévu un dispositif visant à favoriser la création de nouvelles foncières cotées par le biais de l'externalisation des actifs immobiliers des entreprises, le résultat est loin d'être probant.Ces nouvelles mesures fiscales incitent certes les groupes à faire renaître des coquilles vides cotées, comme Tour Eiffel, Massena ou Mines de Lucette pour y loger leurs actifs immobiliers. Mais "il est difficile d'envisager la cotation de ces actifs immobiliers directement car le patrimoine doit être très important pour ce faire. Hormis des grands distributeurs tels que Carrefour, c'est peu envisageable", regrette Scander Bentchikou. "Je crois plus à des apports à des foncières déjà cotées qu'à la création de nouvelles foncières", confirme de son côté Olivier Delval, analyste chez Fortis.Et le salut du secteur n'est pas à attendre du côté des foncières étrangères, qui peuvent profiter du régime SIIC sans pour autant être tenues de se faire coter à Paris en place principale, ce qui rend du même coup peu intéressante leur présence sur le marché français des actions.Conséquence : en Bourse, l'avenir du secteur foncier coté semble morose. "Nous aimerions que ces mesures fiscales du régime SIIC se traduisent positivement pour les foncières, mais cela risque de ne pas être le cas", estime Scander Bentchikou. "Le marché des foncières cotées va être encore plus étroit qu'il y a deux ans", ajoute-t-il."Les fusions et acquisitions sur l'immobilier coté en France ont effacé de la cote entre 5 et 7 milliards d'euros au cours de ces cinq dernières années (le montant définitif dépendant de l'offre sur Gecina). Il est peu probable de voir l'émergence de nouveaux acteurs et l'apport d'actifs compenser ce montant gigantesque", ajoute Olivier Delval, analyste immobilier chez FortisUne situation qui rend le secteur de moins en moins attrayant sur le plan boursier, d'autant que la hausse des taux longs joue en défaveur de la rentabilité des actifs des foncières et de leurs investissements. Les beaux jours des foncières semblent décidément derrière elles...
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