Règles anti-tabac : la responsabilité des employeurs lourdement engagée

La nouvelle réglementation anti-tabac prévoit de nouvelles sanctions à l'égard des employeurs. Un non-respect des mesures les expose notamment à la fameuse jurisprudence amiante.

Dès le 1er février, les chefs d'entreprise feront bien de ne pas négliger la nouvelle réglementation anti-tabac. Le décret du 15 novembre 2006 sur l'interdiction de fumer dans les lieux affectés à un usage collectif accroît en effet les sanctions pénales à leur égard. Les dirigeants ne respectant pas ou ne faisant pas respecter cette nouvelle réglementation sont à la merci d'une amende forfaitaire de 135 euros par infraction constatée.

Les nouvelles contraintes sont importantes et concernent aussi les bureaux individuels dans les entreprises. Sous peine de l'amende forfaitaire, le dirigeant doit notamment avoir mis des panneaux de signalisation d'interdiction de fumer dans les locaux de sa société. Il lui est possible de prévoir un emplacement réservé aux salariés fumeurs. Mais la mise en place et l'entretien de ce local fumeur doivent respecter des règles strictes: consultation du CHSCT (comité d'hygiène,de sécurité et des conditions de travail), attestation par l'installateur ou la personne chargée du renouvellement d'air du local fumeur, installation de fermetures automatiques sans possibilité d'ouverture non intentionnelle,...

Surtout, le décret impose qu'aucune tâche d'entretien ne peut y être exécutée sans que l'air ait été renouvelé, en l'absence de tout occupant, pendant au moins une heure. La moindre insuffisance technique ou de maintenance risque d'engager la responsabilité de l'employeur. "Je pense qu'il n'y aura pas beaucoup d'entreprises qui mettront en place le local fumeur", estime l'avocat parisien Michel Ledoux.

Comme le rappelle le décret, l'employeur est tenu à une obligation de résultat en matière de sécurité de son personnel, un héritage de la fameuse jurisprudence amiante de la Cour de cassation. "Nous sommes en train de passer d'une obligation de sécurité de résultat à une obligation plus large de santé de résultat", avance l'avocat.

Un parallèle pourrait être effectué avec les affaires amiante. Rien n'interdit de penser qu'un salarié atteint d'un cancer broncho-pulmonaire tente de faire reconnaître sa maladie comme maladie professionnelle. Par exemple, en démontrant que son employeur n'a pas respecté le décret du 15 novembre 2006. Si le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles donne suite à sa demande, le salarié risque de saisir la justice civile sur le terrain de la faute inexcusable de l'employeur afin d'obtenir réparation de son préjudice.

Au-delà de l'amende forfaitaire de 135 euros, le dirigeant de société voire sa société en tant que personne morale peuvent se trouver engagés sur le terrain pénal. Le salarié subissant toujours le tabagisme de ses collègues est susceptible de porter plainte pour mise en danger d'autrui. Simple rappel, des employés victimes de l'amiante (ou leurs héritiers) ont déjà engagé ce type de contentieux. Le CHSCT ou les délégués du personnel d'une société ont aussi la possibilité d'informer le parquet.

Enfin, le salarié non fumeur peut décider de constater la rupture de son contrat de travail en raison des atteintes portées à sa santé du fait de la fumée de ses collègues. Dans un arrêt du 29 juin 2005, la chambre sociale de la Cour de cassation n'avait pas hésité à considérer cette rupture comme un licenciement abusif aux torts de l'employeur.

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