Pascin, des Années Folles d'ennui

La Fondation Dina Vierny rend hommage à Pascin, reconnu en son temps comme l'un des maîtres de l'Ecole de Paris, sous-estimé depuis sa mort en 1930.

"Lazare et le mauvais riche" (1923-1925). La toile, gigantesque, réalisée par Jules Pascin, fourmille d'hommes et de femmes aux formes débordantes avachis sur des canapés, croqués comme l'aurait fait un caricaturiste. S'agit-il d'une orgie? D'une fête des Années Folles? Nul ne sait vraiment. Mais il semble évident que tous ces personnages profitent allégrement de l'argent de Lazare, le maître de maison. Lui a d'ailleurs préféré se retirer, seul, sur le balcon. Le monde et les ouvriers à ses pieds.

Trait vif, humour féroce, tons crépusculaires parcimonieusement rehaussés d'une touche nacrée... Tout Pascin se trouve dans cette toile actuellement présentée aux côtés de 180 autres dessins, tableaux, sculptures et gravures au Musée Maillol. L'occasion d'une rétrospective d'envergure, la première consacrée à ce maître de l'Ecole de Paris depuis vingt ans.

Chose étrange, il émane de cet ensemble déroulé dans un ordre plus ou moins chronologique, ponctué d'oeuvres majeures, une forme d'ennui. Un ennui non pas provoqué par l'oeuvre de l'artiste ou par l'accrochage de l'exposition, mais plutôt cette lassitude de la vie qui habitait Pascin.

Injustement oublié aujourd'hui, le peintre n'en était pas moins une star en son temps. Fils de riches marchands de grain, né en 1885 dans l'actuelle Bulgarie, il s'est formé aux Beaux-arts de Munich, Berlin ou Vienne avant de débarquer à Paris en 1905.

La Ville Lumière est alors aux mains des Fauves. Pascin, lui, n'appartient à aucune école. Il se passionne pour les corps de femme, convoque régulièrement Eros, garde une palette assez sombre jusque son voyage à Cuba en 1917-18, dont il rapporte des toiles d'une beauté à couper le souffle.

En 1920, à son retour des Etats-Unis où il a passé la guerre, l'artiste connaît la gloire avec ses toiles nacrées. La galerie Bernheim-Jeune lui signe un contrat exceptionnel, en lui demandant de faire du Pascin. C'en est trop pour le peintre. Persuadé d'avoir perdu son âme avec la gloire, il se suicide le 2 juin 1930.


Pascin. Musée Maillol, 61 rue de Grenelle, 75007 Paris. Tél: 01 42 22 59 58. Ouvert tous les jours de 11h à 18h sauf le mardi. Métro Rue du Bac. Jusqu'au 4 juin. Catalogue: Pascin, coédition Musée Maillol - Gallimard, 240 pages, 35 euros.

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.