EADS : la polémique enfle sur le rôle de l'Etat

La Caisse des dépôts et consignations (CDC) a répété samedi ne pas avoir demandé ou reçu d'autorisation de l'Etat pour procéder à l'achat de titres EADS vendus par Lagardère en avril 2006. La ministre de l'Economie, Christine Lagarde, a ordonné une enquête interne afin "d'examiner l'action des services du ministère en ce qui concerne EADS entre fin 2005 et juin 2006".

Depuis la révélation mercerdi dernier de la note de l'Autorité des Marchés Financiers (AMF) sur un éventuel délit d'initiés au sein d'EADS, le rôle de l'Etat dans ce scandale suscite des interrogations croissantes. Dans son édition datée de samedi-dimanche, le journal Le Monde révèle que Bercy aurait donné son feu vert au rachat par la Caisse des dépôts d'une partie des actions du groupe européen, contrairement aux affirmations de Thierry Breton vendredi devant les sénateurs.

"Dans le cadre des dispositions prévues par le pacte d'actionnaires" d'EADS, "l'Etat a autorisé la Caisse des dépôts à procéder à cette acquisition", selon le procès-verbal d'une réunion de la commission de surveillance de la CDC en date du 12 juillet 2006, cité par Le Monde. Or l'ex-ministre des Finances Thierry Breton, entendu vendredi par la commission des Finances du Sénat, avait affirmé que l'Etat n'avait pas été informé des modalités de vente par le groupe Lagardère de 7,5% du capital d'EADS en avril 2006, et qu'il avait appris "par la presse" l'acquisition d'un partie de ces actions (2,25%) par la CDC.

Le procès-verbal précise toutefois, selon le quotidien, que "l'Etat n'a à aucun moment demandé à la Caisse des dépôts de se porter acquéreur des titres concernés", cette dernière "ayant fait part de son intérêt pour l'opération sur la base de critères purement financiers". Contestant l'information publiée par Le Monde, la Caisse des dépôts (CDC) affirme dans un communiqué qu'elle n'avait "ni demandé ni reçu d'autorisation de l'Etat pour l'achat de titres EADS" en avril 2006 lors de la vente d'actions du groupe européen par le groupe Lagardère.

Dans son communiqué, la CDC indique également que dans le procès-verbal de la Commission de surveillance, le directeur finances et stratégie de la CDC, Dominique Marcel, a d'emblée précisé que "l'Etat n'a, à aucun moment, demandé à la Caisse des Dépôts de se porter acquéreur des titres concernés pour préserver l'équilibre franco-allemand". "La Caisse des Dépôts a fait part de son intérêt pour l'opération sur la base de critères strictement financiers, son engagement dans EADS étant notoirement sous-pondéré", dit-elle encore.

Pour tenter de faire la lumière, et alors que la gauche demande la constitution d'une commission d'enquête parlementaire, la ministre de l'Economie, Christine Lagarde, a ordonné une enquête interne afin "d'examiner l'action des services du ministère en ce qui concerne EADS entre fin 2005 et juin 2006". Les doutes portent sur deux points essentiels: le gouvernement de l'époque était-il informé lors des ventes d'actions par les principaux dirigeants et actionnaires privés d'EADS, fin 2005 et début 2006, des difficultés du groupe qui allaient faire plonger le titre en Bourse au moment de leur révélation, à la mi-juin? Il pourrait alors être accusé d'avoir couvert un éventuel délit d'initiés. Par ailleurs, le gouvernement est-il intervenu pour le rachat par la CDC, considérée comme le bras financier de l'Etat, d'une partie des actions vendues par Lagardère au prix fort?

Christine Lagarde a demandé à l'inspection générale des Finances de se pencher sur "les relations entre les services du ministère de l'Economie et des Finances et la Caisse des Dépôts et Consignations". Elle a promis que le rapport serait remis et rendu public dès jeudi. Entre temps, l'actuel directeur général de la Caisse, Augustin de Romanet, aura été entendu par les commissions des Finances de l'Assemblée nationale, mardi, puis du Sénat mercredi.

La ministre veut aussi connaître "les conditions" dans lesquelles l'Agence de participations de l'Etat (APE) "a exercé ses fonctions pendant cette période". Vendredi, l'actuel directeur général de l'APE, Bruno Bézard, a reconnu que l'agence avait, dans une note du 20 janvier 2006, recommandé la cession d'une partie des actions de l'Etat, qui détient depuis la création d'EADS 15% du capital. Cette suggestion n'a pas été suivie par le gouvernement. Il a assuré que la note ne faisait "à aucun moment état de difficultés" du programme A380, qui n'ont été communiquées à l'Etat que le 18 mai.

Quant à Thierry Breton, il a affirmé n'avoir été prévenu d'un nouveau retard dans la livraison de l'avion géant que "la veille" de l'annonce officielle par les dirigeants d'EADS, le 13 juin 2006.

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.