La Chine se rebiffe face au FMI

Le Fonds Monétaire International a annoncé récemment sa décision de s'intéresser de plus près aux politiques de changes des pays, surtout si elles créent des déséquilibres internationaux. La Chine, qui se sent visée au premier chef, exprime ce matin ses réserves.

Le FMI a beau avoir déclaré que ses nouvelles recommandations en matière de change ne visaient pas spécialement la Chine, Pékin ne peut que se sentir concerné. Par le biais de la Banque centrale, la Chine a ce matin exprimé "ses réserves", les nouvelles règles du FMI ne "reflétant pas totalement le point de vue des pays en développement". En outre, la banque centrale chinoise met en garde contre des mesures qui seraient préjudiciables "à la stabilité intérieure" des pays membres du FMI et donc à "l'équilibre extérieur" puisque un problème de croissance intérieure, par exemple, ne manquerait pas de se répercuter sur le reste du monde.

Il y a quelques jours, l'Institution multilatérale a déclaré qu'elle renforçait sa surveillance vis-à-vis des politiques de change des pays membres. Selon les principes de base du FMI, ces politiques ne doivent pas être un "facteur d'instabilité externe", pas plus que les taux de change ne doivent être manipulés pour conférer un avantage compétitif au pays qui pratique cette manipulation.

La Chine, dont la monnaie, le yuan, est arrimée à un dollar qui baisse, a en effet toutes les raisons de se sentir visée. Certes, sous la pression de Washington, les autorités chinoises ont bien accepté d'élargir le corridor de fluctuations du yuan. La monnaie chinoise flotte autour d'un cours pivot calculé chaque jour, dans une fourchette allant de +0,5% à -0,5% seulement. Même s'il s'agit d'une amélioration par rapport au taux fixe d'il y a quelques mois, les fluctuations, dont l'ampleur est encore trop faible, empêchent de fait le cours du yuan de s'apprécier fortement par rapport au dollar, comme il devrait le faire compte tenu d'autres facteurs économiques.

L'avantage compétitif des Chinois, dont les produits à l'exportation sont forcément moins chers puisque les prix sont libellés en yuan faible, est donc clair. Il suffit de regarder l'évolution de la balance commerciale chinoise vis-à-vis des Etats-Unis, par exemple, pour s'en convaincre. Selon les derniers chiffres, ceux d'avril, le déficit commercial américain vis-à-vis de la Chine s'est encore creusé. A 19,4 milliards de dollars, c'est même son plus haut niveau depuis janvier. En mars, il s'était établi à 17,2 milliards de dollars. Depuis le début de cette année, ce fossé s'est creusé de 19% par rapport à l'an dernier. Sachant que le déficit commercial avec la Chine a atteint un nouveau record l'an dernier, et ce, pour la cinquième année consécutive, l'évolution semble inéluctable...

Pas étonnant donc, que le Congrès américain menace de plus en plus fort de sanctionner les produits chinois, en imposant des surtaxes par exemple, pour contrer l'avantage de change. Et il n'est pas étonnant non plus que le FMI ait choisi de relayer la position des élus américains en s'intéressant de plus près aux monnaies.

Reste que la Chine est coincée. Elle hésite à laisser filer le yuan vers le haut pour la bonne raison que si elle le faisait, les produits agricoles importés de l'étranger seraient du coup moins chers que les produits locaux. Ils envahiraient le marché, mettant ainsi en péril le niveau de vie de la paysannerie chinoise. Et si quelque 500 ou 600 millions de paysans chinois crient famine, c'est tout le pays qui peut s'embraser politiquement. Les spécialistes font d'ailleurs valoir que ce sont, au cours de l'Histoire, souvent des jacqueries paysannes qui ont fait tomber les dynasties au pouvoir...

La Chine tente de freiner ses exportations
Alors que les pressions s'intensifient pour que Pékin essaie de limiter son excédent commercial, la Chine a décidé de baisser ou de supprimer, à partir du 1er juillet, les rabais de taxes à l'exportation dont bénéficiaient certains produits. Ils sont très nombreux, puisque ce sont près de 3.000 articles au total, qui vont des montres aux produits en acier en passant par les motocyclettes, soit près de 37% des différents types de produits exportés, qui verront ces avantages disparaître. Si les experts en commerce mondial notent l'ampleur de la gamme de produits touchés, ils restent cependant sceptiques sur les effets bénéfiques de cette décision en matière de balance commerciale: les prix chinois, même un tout petit peu plus élevés, sont encore imbattables....

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