Avec la crise, les grands brokers peuvent gagner de l'argent

Les dépréciations d'actifs attendues lors de la présentation des résultats des grands brokers ne doivent pas masquer le fait que la crise leur permet de réaliser de beaux coups financiers.

A l'exception de JPMorgan, dont la capitalisation boursière s'est accrue de 11 milliards de dollars en séance (l'actif net comptable de Bear Stearns), les valeurs financières et les titres des grands brokers ont décliné lundi. La grande peur de la crise de liquidité a frappé les esprits et pour la première fois depuis l'ère Volcker, la Réserve fédérale (Fed) n'est plus apparue infaillible.

Le sauvetage de Bear Stearns par la Réserve fédérale et JPMorgan est l'illustration de la doctrine "Too big to fail" (trop grosse pour faire faillite), de l'aléa moral érigé en système économique. Pour y parvenir, la Fed a quitté, sans doute provisoirement, ses habits de prêteur en dernier ressort pour se grimer aux atours d'acheteur en dernier ressort de n'importe quel actif financier. Et voila qui fait peur, même s'il fallait sauver Bear Stearns pour éviter un choc systèmique sur les marchés, notamment sur les dérivés de crédit et les dérivés de taux d'intérêt.

Parallèlement, en maintenant une déprime continue sur les actifs financiers, la crise s'auto-alimente. Car qui dit baisse des prix des actifs dit nouvelles provisions pour dépréciation d'actifs et nouvelle baisse de la valeur comptable. Tout se passe comme si les banques d'affaires, si puissantes il y a encore un an, s'étaient transformées en châteaux de cartes branlants.

Pourtant, elles ont des munitions, notamment des lignes de crédit à long terme et gageons qu'elles n'ont plus fait de bêtises depuis l'automne 2007. Mieux, elles sont en position de bénéficier d'opportunités d'achat sur certains secteurs.

Un exemple ? "La semaine dernière, trois "hedge funds" spécialisés dans les obligations municipales sont venus nous voir, confie ce responsable d'une table de trading pour compte propre d'une grande banque américaine. Tous avaient pris des positions longues sur les obligations municipales, compensés par des positions courtes sur les emprunts du Trésor". Voilà ce qu'on appelle un "hedge", dans la jargon de Wall Street, c'est-à-dire une protection.

Et, dans le cas présent, elle a fonctionné totalement à l'inverse de ce qui était prévu. Avec la crise, les titres des obligations municipales ont baissé (leur taux d'intérêt ont augmenté) tandis que les prix des emprunts du Trésor, très recherchés par les investisseurs, ont monté (leur taux d'intérêt a baissé). Ce n'est pas la première fois que ce type de position éclate à la figure des "hedge funds". En 1994, pendant la crise mexicaine, de nombreux spéculateurs avaient perdu leur chemise.

Or, dans une situation comme celle-ci, la banque qui a du capital peut faire son prix. Pareil pour une banque des particuliers qui possède un bon matelas de dépôt. Elle peut modifier la composition de son bilan en achetant des actifs dépréciés qui fourniront un bon flux de marge d'intérêt.

Qui plus est, elle réalisera une plus-value le jour où les obligations municipales seront remboursées (elle les aura achetées à un prix inférieur à la valeur faciale). Cela finira par se voir dans le compte de résultat mais, pour l'instant, les marchés sont incapables d'imaginer une telle évolution favorable.

Commentaire 0

Votre email ne sera pas affiché publiquement.
Tous les champs sont obligatoires.

Il n'y a actuellement aucun commentaire concernant cet article.
Soyez le premier à donner votre avis !

-

Merci pour votre commentaire. Il sera visible prochainement sous réserve de validation.