Vives réactions au PS face au système d'évaluation des ministres

Les réactions sont vives au PS après l'annonce de la mise en place d'un système d'évaluation des ministres. Les critères d'évaluation, pour la plupart chiffrés, sont un prolongement de la feuille de route qui leur avait été adressée à leur prise de fonctions en juillet. Cette annonce relance également des rumeurs de remaniement ministériel, que le gouvernement s'empresse de démentir.

Les déclarations socialistes contre le système d'évaluation des ministres fusent ce vendredi. Dans cette démarche plutôt inhabituelle pour le milieu politique, chaque ministre sera évalué dans son action selon une grille de critères chiffrés. Jeudi, Le Monde avait révélé que les ministres seraient évalués selon des batteries d'indicateurs de résultats mis au point avec l'aide d'un cabinet de consultants privés, ce qui a ensuite été confirmé par le porte-parole du gouvernement, Laurent Wauquiez.

Julien Dray, député de l'Essonne (PS), note dans un communiqué que "le seul qui échappe à la notation est Nicolas Sarkozy". Il poursuit en conseillant au "président de la République de faire évaluer l'action gouvernementale en fonction" de ses promesses et "des vraies attentes des Français, en matière notamment de pouvoir d'achat, d'emploi et de croissance".

L'eurodéputé socialiste Benoît Hamon estime, lui, que "les politiques sont évalués, à la différence des grands managers, aux élections", et donne rendez-vous "aux prochaines élections municipales, c'est le meilleur baromètre".

Aurélie Filippetti, députée de Moselle et porte-parole du groupe PS à l'Assemblée nationale, juge cette initiative "grotesque". Elle dénonce la volonté du gouvernement de vouloir "réaliser un coup de communication en faisant miroiter aux Français l'image d'un gouvernement actif, seulement mobilisé sur les résultats".

Elle insiste ensuite sur certains critères d'évaluation, trouvant notamment "intolérable que le ministre de l'Identité nationale soit bien noté parce qu'il aura renvoyé assez d'immigrés clandestins", ou bien "tout aussi ridicule" d'évaluer la ministre de la Culture sur la fréquentation des musées alors que la politique culturelle "doit avant tout favoriser la création". "Nicolas Sarkozy et François Fillon transforment Matignon en un cabinet d'audit," conclut-elle.

Des critères d'évaluation pour les ministres

De son côté le porte-parole du gouvernement, Laurent Wauquiez, estime que "la politique est un domaine comme les autres, qui doit rendre des comptes à nos concitoyens". Il a expliqué jeudi matin que cette initiative tend vers trois objectifs: "ajuster le tir", "rendre des comptes sur ce qui change concrètement" et "évaluer chaque ministre".

Les "tableaux de bord" pour chaque ministère ont été établis en prenant pour référence la feuille de route qui leur avait été adressée en juillet. Un cabinet privé en stratégie, Mars & Co, a apporté son aide à Matignon pour formaliser l'outil d'évaluation, mais ne participera pas aux consultations. Ce sera François Fillon qui recevra individuellement ses ministres dans les prochains jours. Cette démarche s'inspire du projet de loi de finances 2006, prévoyant la mise en place d'objectifs et indicateurs, souvent chiffrés, pour toute mission gouvernementale.

"C'est une grande nouveauté. Ces indicateurs sont dans la droite ligne de la feuille de route" envoyée au ministre de l'Education, Xavier Darcos, début juillet, note le ministère. "Cela ne nous fait pas peur, au contraire. Cela permet d'évaluer l'action, de mettre en oeuvre ce qu'on nous demande de mettre en oeuvre", a-t-on commenté dans l'entourage du ministre.

Les critères d'évaluation pour le ministère de l'éducation portent notamment sur le "nombre d'heures supplémentaires réalisées par les enseignants", "l'accueil des élèves handicapés" ou encore la "progression de l'assouplissement de la carte scolaire".

Christine Boutin, ministre du Logement et de la Ville, a semble-t-il découvert l'évaluation ce jeudi. "Je ne savais pas que j'allais être évaluée, je l'ai appris à la sortie du conseil" des ministres. Puis, elle a pris ses distances par rapport à cette initiative : "que tous les hommes et les femmes qui cherchent à se loger puissent le faire le plus rapidement possible, c'est le critère principal que je me donne pour m'évaluer moi-même".

Dans les autres ministères, Bercy confirme avoir reçu une trentaine d'indicateurs, comme l'indice des prix dans la grande distribution. La ministre de la Culture sera jugée sur l'"évolution de la fréquentation totale des lieux culturels" et celle de "la fréquentation des musées quand ils sont gratuits". Quant au ministre de l'Immigration, il sera notamment évalué suivant le "nombre d'étrangers admis au titre de l'immigration de travail".

Selon des sources gouvernementales, on relève d'autres critères comme le "taux de consultation ne donnant pas lieu à une prescription de médicaments" pour la Santé, le nombre de brevets déposés pour la Recherche ou le "nombre de dossiers de surendettements" pour le Haut-commissaire aux Solidarités actives. La Garde des Sceaux sera évaluée sur le taux d'application de la loi sur la récidive, ou encore sur le nombre d'aménagements de peine, d'après une source judiciaire.

Rumeurs de remaniement ministériel

Cette annonce a relancé les rumeurs de remaniement ministériel. Nicolas Sarkozy et François Fillon s'efforcent depuis ce jeudi à les démentir. "Vous serez déçus", a déclaré le Premier ministre, François Fillon, à des journalistes. "Quand un remaniement se produit, c'est en général au moment où on n'en parle pas."

Laurent Wauquiez a insisté sur le fait que le chef de l'Etat a "renouvelé sa confiance totale, pleine et entière au gouvernement" lors de ses voeux, et a conclu à l'adresse de ses ministres par ces mots : "faites du bon boulot et ne soyez pas fébriles". Il a indiqué que les indicateurs "permettront de juger des progrès qui sont faits dans chacun des domaines de l'action gouvernementale (...) pour savoir qu'est-ce qui a changé concrètement à la suite des mesures prises par le gouvernement".

Il a souligné que "le sujet le plus intéressant" n'était pas de savoir si les ministres ainsi visés devraient démissionner mais "d'essayer d'améliorer les points sur lesquels on n'a pas été bon". "Après, la question se posera éventuellement, selon que les ministres sont bons ou pas bons. Mais la saison des évaluations n'est pas venue de ce point de vue", a-t-il ajouté.

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