Sarkozy assure que la France ne baissera pas la garde, Morin confirme que les armées vont maigrir

A Cherbourg, le chef de l'Etat s'engage sur le budget de la Défense. Le ministre Hervé Morin a confirmé préparer un plan prévoyant une réduction des effectifs. L'heure est aux économies et le second porte-avions devrait être retardé.

Le lancement en grande pompe du sous-marin Le Terrible (SNLE, sous-marin nucléaire lanceur d'engins, de nouvelle génération), ce vendredi à Cherbourg, en présence du chef de l'Etat, risque d'être l'arbre qui cache la forêt. Car les armées s'attendent à un sérieux coup de vis sur leurs effectifs et leurs équipements.

Pourtant Nicolas Sarkozy a déclaré vendredi qu'il excluait "absolument de baisser la garde" et de réduire le budget de la Défense même si celui-ci est face à un "mur" financier. "Le budget de la Défense est le deuxième budget de l'Etat, il le restera, il ne baissera pas", a-t-il martelé. "Mais je proposerai des choix trop longtemps occultés propres à concilier la protection des Français, l'indépendance du pays et sa souveraineté financière", a aussi ajouté le président.

"J'ai trouvé à mon arrivée une situation financière plus que difficile (...) Pour atteindre le modèle d'armée 2015, il aurait fallu selon les perspectives financières de la Défense, augmenter de 6 milliards d'euros par an son budget d'équipement, soit une hausse de 40%. Qui peut me dire que cet objectif est seulement crédible?", s'est interrogé le chef des armées. "Ces perspectives financières représentent un mur incompatible avec l'engagement que j'ai pris auprès des Français et auprès de nos partenaires européens de redresser les finances de la Nation".

Nicolas Sarkozy a cependant annoncé que "pour la composante aéroportée, le nombre d'armes nucléaires, de missiles et d'avions sera réduit d'un tiers". La composante aéroportée est actuellement assurée par des Mirage 2000-N équipés de missiles nucléaires ayant vocation à être remplacés d'ici quelques années par des Rafale.

Mais, au-delà des propose présidentiels, un plan prévoyant une réduction des effectifs de la Défense sera bien présenté dans quelques mois après le Livre blanc précisant la doctrine et les missions des armées, a confirmé ce vendredi Hervé Morin. Invité sur RTL, le ministre de la Défense a précisé qu'un rapport - qui est en fait la partie Défense de la "révision générale des politiques publiques" (RGPP) lancée le 12 décembre dernier - prônait des coupes destinées à dégager des "marges de manoeuvre" permettant le renouvellement de l'équipement militaire.

"Nous sommes en train de renouveler la totalité ou presque de nos équipements, les avions, les frégates, les futurs sous-marins nucléaires d'attaque, les hélicoptères", a-t-il expliqué. "C'est une évolution énorme parce que nous voulons mutualiser, supprimer les doublons (...) être en quelque sorte plus efficaces", a-t-il dit, sans plus de détail.

"Il faut qu'on soit un peu moins nombreux, un peu plus efficaces encore", a ajouté Hervé Morin. "Nous présenterons cela après le Livre blanc parce qu'il faut qu'on ait aussi les conclusions du Livre blanc." Ce Livre blanc, dont la parution est désormais attendue pour mai, précisera la doctrine et les missions des armées.

Selon des extraits publiés par Le Point, l'armée perdrait 34.966 emplois militaires entre 2008 et 2014, auxquels s'ajouteront 16.829 emplois civils qui seront confiés à des entreprises extérieures. Dans le même temps, 53 implantations nationales seront fermées et 45.000 emplois supprimés, tandis que 109 sites seront "allégés", c'est à dire qu'ils verront leurs effectifs se réduire, et 51 autres "densifiés".

Aujourd'hui, l'armée française compte 347.903 militaires, toutes entités confondues, selon le ministère de la Défense. S'y ajoutent 80.000 personnels civils (fonctionnaires, ouvriers d'Etat et contractuels).

Un équipement emblématique des armées, le second porte-avions, pourrait faire les frais de ces coups de ciseaux prévisibles. Non qu'il soit annulé, mais il devrait, selon plusieurs sources, être sérieusement retardé. "Nous aurons bien un second porte-avions, après...", reconnaît en privé un officier général, qui n'est pas marin. De son côté, un membre de la commission pour le Livre blanc lève les yeux au ciel quand on lui parle de second porte-avions: "il v ya avoir des pleurs et des grincements de dents...", se borne-t-il à commenter.

Le chef de l'Etat n'a pas encore tranché sur ce programme majeur, d'un coût d'au moins 3 milliards d'euros, qui est indispensable pour la permanence à la mer de ce type de bâtiment, dit "de souveraineté". Le Charles-de-Gaulle est actuellement immobilisé, pour entretien et réparation, depuis fin juillet 2007 et ne devrait pas reprendre la mer avant mai 2009. Une illustration de la nécessité impérieuse de construire rapidement un second porte-avions si la Marine veut être capable d'assurer l'intégralité de ses missions.

Avec le retard prévisible de ce programme, c'est un trou capacitaire important qui s'ouvre pour la défense.

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