OPINION : "Pourquoi je ne reviendrai pas à Paris"

Un banquier français à Londres explique pourquoi, malgré les licenciements à la City, il n'a pas prévu de rentrer de sitôt.

Cela fera bientôt cinq ans que ma femme et moi avons quitté la France pour nous installer à Londres. La raison principale de notre déménagement, c'est que nous en avions assez de vivre dans un pays où un tiers de la population active travaille dans la fonction publique.

Évidemment, les services publics sont d'excellente qualité en France : les trains sont à l'heure (certains roulent même à 300 km/h depuis 1981) et lorsque vous allez à l'hôpital, il y a toujours un médecin prêt à vous soigner. Le revers de la médaille, c'est que ces services publics représentent une réelle charge pour l'économie. Jamais je ne pourrai me faire à l'idée qu'il faudra que j'attende 67 ans avant de partir en retraite alors qu'un chauffeur de bus peut partir à 50 ans, grâce à la générosité des caisses de retraite du privé dans lesquelles le gouvernement puise pour subventionner les caisses de retraite déficitaires du public.

Depuis que nous sommes à Londres, nous avons fait de notre mieux pour nous intégrer durablement. J'ai toujours travaillé pour des sociétés "anglo-saxonnes" et décliné les offres de chasseurs de têtes pour des entretiens avec des banques françaises implantées à Londres. Ces derniers pensaient pourtant que je serais ravi de passer ce genre d'entretien. Ce doit être à cause de mon fort accent français que je n'ai jamais perdu.

Rétrospectivement, je prends conscience que je déteste réellement l'approche française du travail. Dans l'Hexagone, j'avais l'habitude d'arriver en retard au bureau même quand je n'avais aucune raison de l'être, de même qu'il était mal vu de partir tôt. Quand un travail est terminé, les Français aiment passer du temps à discuter pour savoir s'il convient de fêter l'événement ou bien plutôt de rentrer chez soi pour aller dormir.

Ils ont toujours tendance à juger autrui en fonction de l'endroit où il a étudié et non pas en fonction de ses compétences professionnelles. J'ai mis un certain temps avant de comprendre que plusieurs des meilleurs éléments avec qui je travaillais au Royaume-Uni sortaient d'universités dans lesquelles je n'aurais pas jugé digne d'y envoyer mon chien. En France, tout au mieux auraient-ils pu occuper une fonction administrative, à moins d'être relégués dans le secteur public.

En résumé, c'est un vrai gâchis de talents qui peut conduire à des catastrophes financières comme cela s'est passé au Crédit Lyonnais, où tout le monde semblait venir des mêmes écoles avec les mêmes a priori sur la gestion des risques.

C'est avec une certaine délectation, donc, que je suis depuis Londres le feuilleton de la crise de la Société Générale et les théories françaises sur la conspiration. La dernière fois que j'ai passé autant de temps à surfer sur les sites Internet français, c'était quand Zidane a perdu la finale de la Coupe du Monde. Il m'a bien fallu deux mois pour m'en remettre. Il faut dire que le fait d'être entouré par trois Italiens qui aimaient retourner le couteau dans la plaie ne m'a pas vraiment facilité la tâche.

Revenons à la crise de la SocGen. Ils ont tellement majoré mon prêt étudiant que c'est tout juste si Jérôme Kerviel a réussi à me battre toutes ces années plus tard. Cette crise n'a cependant rien de comparable avec celle du Crédit Lyonnais : les contribuables n'auront pas à régler la note.

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