Au Louvre, le salon Musicora accueille un oud d'exception

Le salon international de la facture instrumentale accueille ce week-end un oud (luth oriental) créé par Wissam Joubran, jeune luthier palestinien.

Voir un oud (de l'arabe al-oud, le bois) exposé au salon de la facture instrumentale Musicora à côté d'un Stradivarius, voilà qui n'est pas fréquent. Mais y voir présenté un oud conçu et fabriqué par un jeune musicien et luthier palestinien, spécialisé dans la fabrication du luth oriental, c'est une grande première.

Fils, petit-fils et arrière-petit-fils de luthiers de Nazareth, Wissam Joubran fut le premier luthier arabe à intégrer à 18 ans le très prestigieux conservatoire Antonio Stradivari de Cremone en Italie. C'était en 2001. Quatre ans plus tard, il en sortait avec les félicitations du jury, et le prix 2003 du meilleur artisan luthier.

Aujourd'hui, à peine âgé de 25 ans, il rêve de créer sa propre école en Palestine. "Depuis trois ou quatre ans, je me bats pour que l'on construise les ouds comme on fabrique les violons ou les violoncelles, en suivant des mesures précises. La plupart des ouds qui sont fabriqués aujourd'hui dans le monde arabe sont destinés à un usage purement commercial et éphémère", déplore Wissam Joubran. Par ailleurs, la variété des ouds est telle qu'il est aujourd'hui impossible de les comparer entre eux et d'instaurer une saine compétition entre les luthiers. "L'oud égyptien, par exemple, est un instrument très gros, donc très sonore. En Irak et en Turquie en revanche, le son est plus proche de celui de la mandoline parce que l'instrument est beaucoup plus petit et que l'accordage est différent".

L'oud qu'il présentera ce week-end, Wissam Joubran l'a pensé, dessiné, et fabriqué dans son entier. Une merveille dont la beauté sonore et visuelle a déjà pu être admirée il y a trois semaines à Massy, lors d'un concert du Trio Joubran, qu'il forme avec ses deux frères, Samir et Adnan. Parmi ses secrets de fabrication, on trouve plusieurs ingrédients naturels, qu'il intègre ça et là au cours de la fabrication. L'ivoire, les os de chameau que son grand-père utilisait déjà, ou bien la propolis, résine miraculeuse aux vertus anti-infectieuses... Et un petit supplément d'âme, qui rend le son du oud si proche de celui de la voix humaine.

Car Wissam Joubran fabrique chaque oud en pensant à son destinataire, donnant ainsi une couleur, une forme mais surtout une personnalité particulière à l'instrument. Dans celui-ci, il a sculpté sa famille, son pays, ses souvenirs, ses traditions, et sa souffrance. "Je rêve d'une vie où je pourrai ne penser qu'à la musique et à l'art, où je n'aurais aucun combat politique à mener". Construire enfin, sans avoir à craindre les affres de la destruction. Au centre de l'instrument, une rosace posée sur une ouïe représente un poème de Mahmoud Darwish ("Sur cette terre") dédié à la Palestine, leur "première mère".

Musicora du 4 au 6 avril au Carrousel du Louvre à Paris. Tél: 01.49.53.27.00. www.musicora.net.
Concert du Trio Joubran le dimanche 6 avril, à 15h en Salle de Musique. Plus d'infos sur www.wissamjoubran.com et www.letriojoubran.com.

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