Hydrocarbures : face à la chute des prix du pétrole, l'Opep+ taille de nouveau dans la production

Les efforts de réduction sont essentiellement supportés par les deux piliers de l'alliance des pays exportateurs d'or noir, l'Arabie saoudite et la Russie. Au total, les réductions supplémentaires annoncées ce jeudi s'élèvent à près de 900.000 barils par jour.
Ryad a annoncé l'extension de sa mesure de réduction d'un million de barils par jour (bpj) jusqu'à « la fin du premier trimestre 2024 ».
Ryad a annoncé l'extension de sa mesure de réduction d'un million de barils par jour (bpj) jusqu'à « la fin du premier trimestre 2024 ». (Crédits : Reuters)

[Article publié le vendredi 01 décembre 2023 à 10h37 et mis à jour à 15h00].Réduire la production de pétrole en 2024 pour enrayer la chute des cours du pétrole, c'est la décision forte prise jeudi 30 novembre par certains pays membres de l'Opep+, après plusieurs jours de discussions compliquées.

Une nouvelle fois, les efforts de réduction sont essentiellement supportés par les deux piliers de l'alliance des pays exportateurs d'or noir, l'Arabie saoudite et la Russie. À l'issue d'une réunion des ministres du groupe, Ryad a ainsi annoncé l'extension de sa mesure de réduction d'un million de barils par jour (bpj) jusqu'à « la fin du premier trimestre 2024 ».

Moscou va abaisser sur la même période ses exportations de brut et de produits pétroliers de 500.000 barils quotidiens. Parmi les 23 membres, d'autres pays, comme les Emirats arabes unis, l'Irak, le Koweït, le Kazakhstan, l'Algérie ou Oman, vont également procéder à des diminutions de moindre ampleur, a précisé l'alliance pétrolière dans un communiqué. Au total, les réductions supplémentaires annoncées jeudi s'élèvent à près de 900.000 barils par jour.

Après ces annonces, le pétrole se stabilise malgré le fait qu'elles aient toutefois été accueillies avec scepticisme par les investisseurs. Vers 11 heures 45, heure de Paris, le prix du baril de Brent de la mer du Nord pour livraison en février, dont c'est le premier jour d'utilisation comme contrat de référence, a pris 0,10% à 80,94 dollars. Son équivalent américain, le baril de West Texas Intermediate (WTI), pour livraison en janvier, a gagné 0,20% à 76,11 dollars.

Jeudi, les marchés ont également réagi avec déception devant l'absence d'accord collectif de l'Opep+, le WTI américain fléchissant temporairement de 3%. « Il s'agit d'une victoire au goût amer pour les Saoudiens qui n'ont pu convaincre que sept membres », estime Jorge Leon, analyste chez Rystad Energy.

Plusieurs pays africains contre cette décision

Initialement prévue dimanche dernier à Vienne, la réunion avait été repoussée sur fond de discorde. L'Arabie saoudite, désireuse de partager le fardeau, s'est en effet heurtée aux réticences des pays africains. Parmi les réfractaires, l'Angola et le Nigeria voulaient « augmenter leurs quotas » afin d'accroître leur manne pétrolière, source de précieuses devises étrangères, d'après une source proche des discussions.

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Ces deux pays n'ont pas digéré les conclusions de la réunion de juin dernier, qui actaient une baisse de leurs objectifs de production, après des années de sous-investissement.  Les différends n'ont pas été complètement réglés, Luanda rejetant son nouveau volume de production attribué par le groupe, a rapporté l'agence Bloomberg.

Après les coupes de production claires de la pandémie, l'alliance avait rouvert les vannes en janvier 2021 avant de les resserrer de nouveau fin 2022 sur fond d'incertitude économique. Elle garde actuellement sous terre environ 5 millions de barils par jour, jouant sur la raréfaction de l'offre pour tenter de faire remonter les cours.

Une stratégie qui ne fonctionne pas vraiment

Mais cette stratégie peine à porter ses fruits. Les deux références du brut ont dévissé au cours des semaines passées, tout en restant au-dessus de la moyenne des cinq dernières années. Les prix évoluent désormais autour de la barre symbolique des 80 dollars le baril, après une éphémère envolée du Brent à près de 100 dollars fin septembre, et loin des 140 dollars atteints à la suite de l'invasion russe de l'Ukraine.

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En cause, une demande qui apparaît toujours fragile, entre préoccupations autour de l'économie de la Chine, premier importateur de brut au monde et dont la reprise post-Covid-19 s'avère beaucoup plus poussive que prévu, et signaux mitigés venant de l'Europe et des Etats-Unis.

Montée en puissance du Brésil

De son côté, la production de brut des Etats-Unis et du Brésil a atteint des niveaux records, provoquant un changement des rapports de force. L'Opep+, qui compte pour environ la moitié de la production mondiale, « n'a plus la mainmise sur le marché qu'elle avait autrefois », souligne Neil Wilson, analyste chez Finalto.

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L'alliance, née en 2016 en réaction aux défis posés par la concurrence américaine, espère toutefois être rejointe par le Brésil dès janvier 2024. « C'est un moment historique pour le Brésil, qui ouvre un nouveau chapitre du dialogue et de la coopération internationale sur l'énergie », a salué le ministre brésilien des Mines et de l'Energie Alexandre Silveira, présent à la réunion. Son ministère de l'Energie a cependant tempéré cette annonce, précisant dans un communiqué transmis à l'AFP qu'il « analysait la question ».

La fin du pétrole au cœur de la COP28

Jeudi, la 28e conférence de l'ONU pour le climat s'est ouverte à Dubaï aux Emirats arabes unis. Au menu des négociations figure la question épineuse des énergies fossiles, parmi les principales responsables du dérèglement climatique. Deux camps s'opposent : d'un côté, des pays producteurs et/ou exportateurs d'hydrocarbures, pour certains membres de l'Opep+, qui n'envisagent pas la fin de fossiles. De l'autre, la société civile (ONG, experts du climat, certains décideurs économiques et politiques), qui appelle à l'abandon de ces énergies, ou a minima, une réduction significative.

À l'origine opposé à cette dernière revendication, le président émirati de la COP28, (aussi patron de la compagnie pétro-gazière nationale des Emirats), s'est montré plus ouvert sur le sujet. Dans sa première allocution à l'ouverture du sommet ce jeudi, Sultan al-Jaber a ainsi appelé à mentionner « le rôle des combustibles fossiles » dans l'accord final. « Nous devons faire en sorte d'inclure le rôle des combustibles fossiles. Je sais qu'il existe des opinions fortes sur l'idée d'inclure des formules sur les énergies fossiles et renouvelables dans le texte négocié », a-t-il déclaré.

(Avec AFP)

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Commentaires 5
à écrit le 02/12/2023 à 9:43
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Ils sont sympas de penser aux petits producteurs qui eux ne peuvent pas se permettre de tenir des prix aussi élevés car ils n'ont pas le volume pour compenser.

à écrit le 01/12/2023 à 13:51
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Notre nouvel ami Maduro du Venezuela va nous tirer d'affaire.

à écrit le 01/12/2023 à 10:47
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Au final, on ne sait pas ce qu'on veut ? Est-ce qu'il faut plus de pétrole ? Moins de pétrole ? Plus cher ? Moins cher ? Ce qui est sûr, c'est que c'est pas demain la veille qu'on arrêtera la consommation de pétrole

le 01/12/2023 à 12:02
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que penser de nos visionnaires qui défendent leur propre intérêt personnel avant tout face au déclin de l occident ,?

le 01/12/2023 à 15:05
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Même en 2035, sauf changement interdisant tout ancien véhicule, on consommera encore des carburants, mais à quel prix ? Combien faudra-t-il de raffineries pour les véhicules (avions compris) actifs et dont le nombre baissera au fil des années ? C'es...

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