Chronique de François Simon : chez Marcel, retour sur images

CHRONIQUE CHAUD DEVANT - François Simon a testé le restaurant Chez Marcel, à Paris. Un bistro-bouchon convivial, à la cuisine « replète et causante ».
(Crédits : DR)

Chez Marcel, retour sur images

Combien sont-ils à ainsi s'échapper du temps ? À disparaître dans les doublures des villes ? Ils sont une pincée, une poignée de clandestins à faire mine de ne plus exister, de parler en anciens francs et d'avoir des numéros de téléphone précédés de lettres : Littré 29 94. Ils comptent pour du beurre. Ils sont hors temps, vintage, limite rébus. Passeraient-ils un contrôle technique que l'examinateur se masserait le menton. Ils n'intéressent pas les guides, encore moins les influenceurs qui ont besoin de lumières, de gelée fluo, de yuzu. Et d'invitations rémunérées. Ici, chez Marcel, rue Stanislas, dans le quartier Montparnasse, à Paris, c'est une sorte d'enclave. De réserve d'Indiens. Dire que le temps s'est figé serait inapproprié car il n'y a rien de plus vivant que cette salle enserrée débutant par le zinc pour terminer quelques mètres plus loin par les cuisines que l'on traverse pour aller aux toilettes dans la cour. Les tables sont à touche-touche. Elles communiquent comme l'on faisait autrefois. On se dit bonsoir, parfois on échange sur un vin, un bout de quenelle, un bon mot. C'est une sorte de convivialité oubliée d'une époque où - si l'on s'en souvient - on chantait. On sifflait dans la rue, parfois les jolies filles, mais surtout les airs connus genre Le Pont de la rivière Kwaï (1957). La cuisine d'alors faisait corps avec l'esprit du temps. Il y avait cette continuité rassurante d'une vie ensemble, de plats partagés, d'une cuisine replète et causante. Aussi faudra-t-il venir ici le cœur en habit, l'âme offerte, le corps en perdition. Terrine maison, escargots de Bourgogne, coq au vin, very good tripes, andouillette Duval, cervelle de canut, tarte aux pralines roses, millefeuille maison à la vanille Bourbon... À le lire, c'est exactement cela, nul besoin de décrire la rondeur des plats, la profondeur des sauces, le son cristallin du feuilletage. Et puis il y a surtout Pierre, le patron, qui apporte cette touche palpable, cet émerveillement roué, cette faconde roublarde et enfantine. Lorsqu'on sort de chez Marcel, on se met à rêver d'un temps retrouvé.

Chez Marcel, 7 rue Stanislas, Paris 6 . Tél.:0145482994. Comptez 50 euros.

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