Coronavirus : Des chercheurs chinois ont identifié des anticorps prometteurs

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Coronavirus: des chercheurs chinois ont identifie des anticorps prometteurs[reuters.com]
(Crédits : Kim Hong-Ji)

par Martin Quin Pollard

PEKIN (Reuters) - Une équipe de chercheurs chinois a isolé plusieurs anticorps qu'ils décrivent comme "très efficaces" pour bloquer la capacité du nouveau coronavirus à pénétrer dans les cellules cibles, ce qui pourrait à terme aider à traiter ou prévenir le Covid-19, la maladie que développent certains patients contaminés par ce virus.

A l'heure actuelle, il n'existe aucun traitement à l'efficacité avérée pour guérir cette maladie due au nouveau coronavirus SARS-CoV-2 apparu en Chine en décembre et à l'origine d'une pandémie, avec plus de 850.000 cas de contamination et plus de 42.000 morts à travers le monde.

Pour Zhang Linqi, de l'université Tsinghua de Pékin, un traitement combinant des anticorps tels que ceux identifiés par son équipe pourraient se montrer plus efficaces que certaines des approches parfois utilisées, comme l'administration de plasma de patients guéris, qu'il décrit comme un traitement "limite".

Dans cette approche, les anticorps développés contre l'agent infectieux et présents dans le plasma des patients guéris permettent d'offrir une protection à court terme aux patients nouvellement contaminés. Mais la transfusion de plasma est régie par des règles de compatibilité liées aux groupes sanguins.

L'analyse des anticorps présents dans le sang de patients guéris du Covid-19, entamée en janvier, a permis à Zhang Linqi et ses collaborateurs, avec le soutien d'une équipe d'un hôpital de Shenzhen, d'isoler 206 anticorps présentant une "forte" capacité à se lier avec les protéines présentes à la surface de l'enveloppe du SARS-CoV-2.

Ils ont ensuite mené une autre série de tests pour déterminer si ces anticorps permettaient véritablement d'empêcher le virus de pénétrer dans les cellules de l'organisme des patients contaminés, a expliqué Zhang Linqi lors d'un entretien accordé à Reuters.

Après des premiers tests sur une vingtaine d'anticorps, les chercheurs ont constaté que quatre d'entre eux étaient capable de bloquer l'entrée du virus dans les cellules, dont deux de façon "extrêmement efficace", a-t-il souligné.

Ces chercheurs tentent désormais d'identifier les anticorps les plus efficaces et la possibilité de les combiner pour tenter de limiter le risque de mutation du nouveau coronavirus.

D'AUTRES SÉRIES DE TESTS NÉCESSAIRES

Si les résultats sont concluants, des développeurs intéressés pourraient lancer la production de masse de ces anticorps (des copies obtenues par génie génétique, appelées anticorps monoclonaux) afin de pouvoir les tester in vivo, d'abord sur des animaux puis dans un deuxième temps chez l'homme.

Ces chercheurs ont lancé un partenariat avec la firme de biotechnologie sino-américaine Brii Biosciences, dans l'espoir de "proposer de multiples traitements candidats pour des approches prophylactiques (préventives-NDLR) et thérapeutiques", selon un communiqué de la biotech.

"L'importance des anticorps est avérée en médecine déjà depuis des décennies", rappelle Zhang Linqi. "Ils sont déjà utilisés dans le traitement des cancers, des maladies auto-immunes et des maladies infectieuses."

S'ils ne sont pas à proprement parler un "vaccin", les anticorps pourraient permettre de fournir une immunité passive, distincte de la réaction immunitaire naturelle de l'organisme contaminé, ce qui serait par exemple susceptible de prévenir la survenue de la maladie Covid-19 chez les personnes considérées comme à risque de développer une forme grave.

En temps normal, au moins deux années sont nécessaires avant que l'autorisation de mise sur le marché d'un nouveau traitement puisse être envisagée, mais la pandémie de Covid-19 a accéléré les procédures, explique le chercheur chinois, en précisant que des étapes traditionnellement effectuées les unes à la suite des autres sont désormais menées en parallèle.

Zhang Linqi, qui a publié sur internet les résultats de son équipe, espère que ces anticorps pourront être testés chez l'homme dans six mois. Si des essais cliniques prouvent leur efficacité, leur mise à disposition comme traitement prendrait cependant davantage de temps.

La prudence reste de mise, souligne un autre expert, qui a pris connaissance de ces résultats par l'intermédiaire de Reuters. "Il y a désormais un certain nombre d'étapes qui doivent maintenant être suivies avant de pouvoir envisager d'utiliser (ces anticorps) pour traiter les patients contaminés par le coronavirus", rappelle Ben Cowling, spécialiste des maladies infectieuses à l'université de Hong Kong.

"Mais c'est vraiment prometteur d'identifier ces traitements potentiels et ensuite d'avoir une chance de les tester. Parce que si nous trouvons davantage de traitements candidats, au bout du compte nous aurons une meilleure prise en charge", observe-t-il.

(Avec Roxanne Liu, version française Myriam Rivet, édité par Henri-Pierre André)