La fin des négociations causera de nouvelles pertes, assurent les taliban

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Afghanistan: trump dit mettre fin aux negociations avec les taliban[reuters.com]
(Crédits : Joshua Roberts)

par Abdul Qadir Sediqi et Hamid Shalizi

WASHINGTON (Reuters) - La fin des négociations entre les taliban afghans et les Etats-Unis, annoncée dans la nuit par Donald Trump alors qu'elles étaient sur le point d'aboutir, va entraîner de nouvelles pertes de vie humaines, a promis dimanche la milice islamiste.

Le président américain a annulé samedi soir l'entretien secret prévu à Camp David avec "d'importants dirigeants" du mouvement armé, après sa revendication de l'attentat qui a fait douze morts, dont un Américain, la semaine dernière à Kaboul.

"Les deux parties préparaient l'annonce et la signature de l'accord de paix, mais le président américain a mis fin au dialogue (...) Cela entraînera de nouvelles pertes pour les Etats-Unis", assure Zabihullah Mujahid, porte-arole des talibans, dans un communiqué.

"Sa crédibilité sera affectée, son hostilité à la paix sera exposée au grand jour, les pertes humaines et matérielles vont s'alourdir.

"Nous sommes toujours décidés à suivre la voie de la négociation si elle est préférée à celle des combats (...) Nous ne serons pas satisfaits tant que l'occupation étrangère de notre pays n'aura pas pris fin", ajoute-t-il.

L'émissaire américain Zalmay Khalilzad négociait depuis des mois à Doha avec les représentants des Taliban. Le projet d'accord qu'ils ont élaboré au terme de neuf "rounds" de négociations à Doha prévoyait le retrait graduel des 14.000 militaires américains présents en Afghanistan en échange de garanties de sécurité et de l'ouverture à terme d'un processus de paix "interafghans".

"S'ils ne peuvent pas convenir d'un cessez-le-feu pendant ces négociations de paix très importantes et sont même prêts à tuer 12 personnes innocentes, ils n'ont probablement pas autorité pour négocier un accord d'importance de toute façon. Combien de décennies supplémentaires sont-ils prêts à se battre ?", a écrit Donald Trump sur Twitter

"GUERRE CIVILE TOTALE"

Le président afghan Ashraf Ghani, qui briguera un deuxième mandat le 28 septembre dans le cadre d'un scrutin reporté à plusieurs reprises, a exhorté les talibans à déposer les armes et à négocier directement avec son administration, après la décision de son homologue américain, mais la milice s'oppose à toute discussion avec un pouvoir qu'elle juge illégitime et aux ordres des Etats-Unis.

Malgré le projet d'accord sur lequel les deux parties se sont entendues la semaine dernière, les talibans, dont le territoire n'a jamais été aussi étendu, ont lancé de nouvelles offensives à Kunduz et Pul-e-Khumri, dans le Nord. Ils ont en outre revendiqué deux attentats-suicides majeurs commis à Kaboul.

La milice semble convaincue que ses gains territoriaux lui permettent de négocier en position de force. Certains de ses chefs militaires s'opposeraient même à toute idée de cessez-le-feu si près de la victoire.

Neuf anciens ambassadeurs américains avaient averti la semaine dernière que l'Afghanistan risquait de s'enfoncer dans une "guerre civile totale", si les Etats-Unis décidaient de mettre fin à leur présence militaire en l'absence d'accord de paix entre Kaboul et les talibans.

Près de 4.000 civils ont été tués ou blessés au cours du premier semestre 2019 et les pertes dues aux opérations des forces gouvernementales ou du contingent étranger sont en forte augmentation, selon l'Onu.

(Avec Orooj Hakimi; Jean-Philippe Lefief pour le service français)