Dans le cadre du projet de loi de finances (PLF) 2024, le gouvernement tient à maintenir les aides à l'apprentissage en l'état. Une prime de 6.000 euros pour les patrons, en plus du paiement des frais de scolarité, qui accueillent un jeune, et ce, quel que soit son niveau d'études. Une formule qui, selon Olivier Dussopt, le ministre du Travail, a fait ses preuves. Et pour cause, on compte 853.500 apprentis, à fin août 2023, soit un effectif en hausse de 8,8 % par rapport à fin août 2022, selon les données de la Dares.
Pas question de toucher aux aides
Mardi 31 octobre, en fin de journée, alors qu'il avait été auditionné par la commission des Finances de l'Assemblée nationale, le ministre du Travail l'a redit devant les députés : « Le gouvernement ne souhaite pas modifier les paramètres ».
« Nous ne voulons pas envoyer un contre-signal aux employeurs et casser une dynamique lancée », a justifié Olivier Dussopt.
L'objectif du gouvernement, maintes fois répété par Emmanuel Macron lui-même, ne change pas : faire en sorte qu'un million de jeunes adultes soient en contrat d'alternance chaque année, d'ici la fin du quinquennat.
Longtemps considéré en France comme une voie de garage, l'apprentissage retrouve enfin ses lettres de noblesse. Pas question, donc, de prendre le risque d'en perturber la trajectoire. De quoi satisfaire les entreprises, dont certaines organisations font un lobbying intense pour le maintien en l'état des aides. Ainsi, la fédération professionnelle du numérique, et de l'événementiel, le Syntec, insiste sur la nécessité de conserver le soutien de l'apprentissage, y compris pour les jeunes adultes les plus qualifiés, au nom de l'intégration sociale.
Des députés favorables à un meilleur ciblage
Une vingtaine de députés Renaissance, dont Jean-René Cazeneuve, le rapporteur général du budget, ou encore Marc Ferracci, proche d'Emmanuel Macron, ne l'entendent pas de cette oreille. A leurs yeux, au contraire, il convient de limiter ces aides, ou a minima, de les conditionner. Pour ce faire, ils sont favorables au dépôt d'un amendement au projet de loi de finances pour plafonner ces primes pour les jeunes jusqu'à Bac+2 maximum, les étudiants ayant obtenu un niveau Bac+5 ayant, en principe, moins de difficultés pour s'insérer.
Suivant ce principe, il ne serait pas nécessaire d'encourager les entreprises à recruter, dans la mesure où ces embauches se feront de toute façon. Un meilleur ciblage permettrait, en outre, de faire des économies. Au moins 700 millions d'euros, selon leurs calculs.
L'apprentissage, une formule qui fonctionne, mais qui coûte cher
Or, l'enveloppe dédiée à l'apprentissage ne cesse de croître, selon ces députés macronistes : 300% de plus ces trois dernières années, pour atteindre près de 17 milliards d'euros. Soit un gouffre pour les finances publiques. Sans compter que ces effets d'aubaine sont également pointés du doigt par des économistes. En témoignent les travaux de Bruno Coquet.
« Si on prend tout en compte, entre les dépenses de France compétences pour l'apprentissage, les primes versées aux entreprises, les frais de scolarité... On arrive à près de 20 milliards d'euros de dépenses, c'est considérable », insiste le spécialiste du sujet à l'OFCE.
La Cour des comptes a, elle aussi, pointé du doigt, l'été dernier, ces dépenses d'apprentissage, préconisant un recentrage de ces aides aux entreprises.
Un sujet bien plus politique qu'il n'y paraît
Reste que l'apprentissage permet de faire baisser le chômage à l'heure actuelle. Selon l'Insee, un tiers des créations d'emplois ces derniers mois l'ont été grâce à l'apprentissage. Réduire le soutien à ces dispositifs d'alternance revient donc à prendre le risque de faire monter la courbe du chômage.
Alors que les inscriptions à Pôle emploi repartent légèrement à la hausse, que le contexte économique se tend, le gouvernement ne souhaite pas tenter le diable... Emmanuel Macron affiche toujours pour ambition d'atteindre le plein-emploi d'ici 2027.