La rentrée à Bercy a des airs de campagne électorale. A huit mois de l'élection présidentielle, les ministres de la Macronie préparent le terrain d'une campagne électorale encore soumise aux aléas de la situation sanitaire. Lors d'une rencontre avec des journalistes, mardi 31 août, le ministre de l'Economie Bruno Le Maire a rappelé que la croissance de l'économie française au deuxième trimestre avait été révisée à la hausse à 1,1% contre 0,9% précédemment et que l'acquis de croissance pour cette année était de 4,8%. Le gouvernement vise une progression de la richesse produite de 6% sur l'ensemble de l'exercice.
Au delà des élément de langage distillés dans un propos liminaire, Bruno Le Maire a particulièrement insisté sur le déficit de la balance commerciale tricolore. "Je ne suis pas complètement satisfait de la situation économique française. Nous avons bâti de bonnes bases avec les réformes de 2017 sur le Code du travail, la loi Pacte mais il reste des chantiers importants. La balance extérieure n'a cessé de se dégrader depuis 20 ans" a-t-il déclaré. Il faut rappeler que les déséquilibres se sont aggravés avec la pandémie. Le déficit de la balance commerciale s'est creusé d'environ 7,3 milliards d'euros pour s'établir à 65 milliards d'euros 2020. Ce dossier sensible devrait être au centre des discussions de la réunion de rentrée du Conseil Stratégique de l'export qui a lieu ce mercredi en fin d'après-midi au Quai d'Orsay, en présence de Agnès Pannier-Runacher, ministre chargée de l'Industrie et du ministre en charge du Commerce extérieur Franck Riester.
"L'angle mort de toutes les politiques économiques françaises"
La désindustrialisation de l'économie française est pointée du doigt par de nombreux économistes depuis plusieurs décennies. De nombreuses usines sont parties à l'étranger depuis les années 70 en raison notamment du premier choc pétrolier et cette mutation s'est accélérée au cours des années 80, à la suite du second choc pétrolier. La flambée des prix du pétrole et la montée du dollar ont contribué a augmenter les coûts de production et a dégradé les marges des usines "alors que dans le même temps, la concurrence des pays émergents s'est intensifiée" rappellent les économistes de l'observatoire français des conjonctures économiques (OFCE) dans leur ouvrage "L'économie française en 2021" (Editions : La Découverte).
Résultat, le déficit de la balance commerciale s'est fortement dégradé. "Cela traduit une évolution de l'économie française qui se base sur les services. L'économie française ne serait plus agricole, ni industrielle" a regretté le locataire de Bercy. Je préfère Marx à Houellebecq. Il faut retrouver de la puissance industrielle. C'est l'angle mort de toutes les politiques économiques françaises" a-t-il ajouté. Il faut rappeler que Bruno Le Maire est loin d'être le premier ministre à vouloir faire du redressement industriel sa priorité. Il y a seulement quelques années, le ministre du redressement productif Arnaud Montebourg avait également fait de la réindustrialisation son mantra.
Un plan d'investissement attendu à la mi-septembre
La pandémie a jeté une lumière crue sur l'extrême dépendance de la France au reste du monde pour des produits stratégiques sur le plan sanitaire ou économiques. Le fiasco des masque au printemps 2020 et la pénurie de traitements pour soigner les malades du Covid ont obligé le gouvernement à engager d'âpres négociations avec les pays producteurs situés en Asie notamment. Face à ce désastre, les débats sur la nécessité de relocaliser des industries stratégiques en France ont ressurgi. Sur ce point, les positions du gouvernement sont relativement floues.
En revanche, l'exécutif prépare un plan d'investissement pour bâtir "la France de 2030" selon les mots du président de la République Emmanuel Macron. Sans dévoiler les détails de ce plan qui doit faire l'objet d'une annonce au cours du mois de septembre par le chef de l'Etat, Bruno Le Maire a expliqué que "la logique du président, c'est de créer de nouvelles filières industrielles. Depuis 30 ans, la France vit seulement sur quatre filières industrielles" a-t-il expliqué. Le ministre a remis fin juillet au chef de l'Etat des propositions pour diversifier les filières exportatrices françaises, grâce à des investissements dans des technologies innovantes comme l'hydrogène, les biotechnologies, les batteries électriques ou les semi-conducteurs, pour un montant total de l'ordre de 30 milliards d'euros.