Corse : le gouvernement et les élus trouvent un accord pour inscrire « un statut d'autonomie » dans la Constitution

Le gouvernement et des élus corses sont tombés d'accord dans la nuit de lundi à mardi sur un projet d'« écriture constitutionnelle » prévoyant « la reconnaissance d'un statut d'autonomie » de l'île « au sein de la République ».
Gouvernement et élus corses sont tombés d'accord sur un projet d'« écriture constitutionnelle », a annoncé Gérald Darmanin mardi 12 mars (photo d'illustration).
Gouvernement et élus corses sont tombés d'accord sur un projet d'« écriture constitutionnelle », a annoncé Gérald Darmanin mardi 12 mars (photo d'illustration). (Crédits : SARAH MEYSSONNIER)

[Article publié mardi 12 mars 2024 à 13h09, mis à jour à 15h10] « Fumée blanche place Beauvau », titre le journal Corse matin ce mardi 12 mars. Le gouvernement et des élus corses sont tombés d'accord sur un projet d' « écriture constitutionnelle » prévoyant « la reconnaissance d'un statut d'autonomie » de l'île « au sein de la République » dans la nuit de lundi à mardi. L'accord propose une « vraie » autonomie pour l'île, se félicite le quotidien insulaire.

« La présente écriture constitutionnelle prévoit la reconnaissance d'un statut d'autonomie pour la Corse au sein de la République qui tient compte de ses intérêts propres liés à son insularité méditerranéenne, à sa communauté historique, linguistique, culturelle ayant développé un lien singulier à sa terre », prévoie le premier alinéa de cette « écriture ».

Le texte doit encore être voté au Parlement

Gouvernement et élus sont aussi tombés d'accord sur le fait que « les lois et règlements peuvent faire l'objet d'adaptation » sur l'île, a précisé Gérald Darmanin à la presse, à l'issue d'une rencontre de près de cinq heures place Beauvau. « L'écriture constitutionnelle prévoit enfin que les électeurs inscrits sur les listes électorales de Corse soient consultés sur ce projet », a-t-il ajouté.

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Le chef de file des sénateurs Les Républicains, Bruno Retailleau, a dénoncé un « pas dangereux ». « Contrairement aux proclamations officielles, le projet sur la Corse revient bien à constitutionnaliser le communautarisme. Reconnaître "une communauté historique, linguistique et culturelle" revient bien à reconnaître la notion de peuple corse », a fustigé sur X le patron du groupe LR, première force politique au Sénat.

Le ministre de l'Intérieur a assuré que ce texte ne prévoyait en aucun cas qu'il y ait en Corse « deux catégories de citoyens ». « Il n'y a pas de notion de peuple (corse) mais de communauté culturelle », a-t-il détaillé, écartant tout « statut de résident » sur l'île. « Nous avons avancé vers l'autonomie » et « il n'y a pas de séparation de la Corse avec la République », a résumé Gérald Darmanin.

Cette autonomie sera encadrée par une loi organique définissant les champs de compétences dans lesquels il s'exercera et les conditions de son évaluation, a indiqué Gérald Darmanin. Le texte doit encore être voté par les deux chambres du Parlement dans les mêmes termes, puis adopté par le Congrès à la majorité des trois cinquièmes.

Un statut au cœur des différends entre élus corses

Le statut d'autonomie était au cœur des différends entre élus corses. Les nationalistes en faisaient un point incontournable quand les élus d'opposition de droite ne souhaitaient qu'une simple adaptation des lois aux spécificités de l'île méditerranéenne, où les partisans de l'autonomie sont majoritaires à l'Assemblée locale.

Le président, autonomiste, du Conseil exécutif de Corse, Gilles Simeoni a salué un « pas décisif » à l'issue de cette réunion, se félicitant que « le principe d'un pouvoir de nature législative, soumis à un contrôle du Conseil constitutionnel, soit aujourd'hui clairement acté ».

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« Je reste déterminé à penser que l'octroi du pouvoir législatif est un problème, mais je ne vais pas endosser le rôle du bourreau du processus », a, de son côté, réagi le chef de file de l'opposition de droite à l'assemblée de Corse, Jean-Martin Mondoloni, laissant planer le doute sur son soutien au texte dans la chambre locale.

Le 28 septembre 2023, lors de sa visite en Corse, Emmanuel Macron avait donné six mois, soit jusqu'à la fin mars, aux groupes politiques insulaires, des indépendantistes à la droite, pour arriver à un « accord » avec le gouvernement menant à un « texte constitutionnel et organique » qui donnerait à la Corse « une autonomie dans la République ».

Une question qui revient souvent dans les débats

Déjà objet de trois lois, en 1982, 1991 et 2002, le statut de la Corse revient régulièrement dans les débats. Avec ses 340.000 habitants l'île d'environ 8.700 km2 a un statut différent de celui des autres régions françaises, qui lui confère depuis 1991 une autonomie plus large dans certains domaines (éducation, immobilier, développement économique, environnement, etc.).

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Il a été à l'ordre du jour dès le premier quinquennat d'Emmanuel Macron, dans un projet de révision constitutionnelle qui devait inscrire dans la loi fondamentale le statut spécifique de la Corse. Mais la réforme n'a jusqu'ici pas abouti. Le 1er janvier 2018, la Collectivité territoriale unique de Corse (CTU) a remplacé en les fusionnant les deux conseils départementaux corses et la Collectivité territoriale de Corse (CTC), une première en France métropolitaine.

Les nationalistes corses, divisés entre autonomistes et indépendantistes, sont au pouvoir dans l'île depuis 2015. Ils demandent un « statut d'autonomie de plein droit et de plein exercice », avec quatre priorités : le pouvoir législatif et fiscal, la co-officialité de la langue corse, l'achat de biens immobiliers réservé aux résidents et l'amnistie de ceux qu'ils considèrent comme des « prisonniers politiques ».

Le président de la région Bretagne propose « un cadre commun »

L'accord sur l'autonomie de la Corse pourrait-elle ouvrir la voie aux revendications d'autres régions en France ? Le président de la région Bretagne, Loïg Chesnais-Girard, a fait savoir mardi qu'il a réclamé à Gérald Darmanin de « reconnaître la diversité des territoires dans un cadre commun ».

« La République, une et indivisible, est puissante si ses multiples identités sont respectées. La France unie le sera d'autant plus qu'elle reconnaîtra les territoires qui la composent et leurs spécificités. La décentralisation est inscrite dans la Constitution. Et si nous respectons profondément les attentes de la Corse, cela ne peut constituer la seule avancée pour notre pays qui, à mon grand regret, crève de son centralisme », a écrit Loïg Chesnais-Girard dans un communiqué.

Sa proposition « n'est pas une proposition bretonne pour la Bretagne, c'est une proposition républicaine pour tous les territoires de la République marqués par une forte spécificité », a fait savoir le président de la région Bretagne.

(Avec AFP)

Commentaires 7
à écrit le 13/03/2024 à 10:17
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Apparemment, vu le niveau des commentateurs, les médias n'ont pas fait leur travail pédagogique sur la situation de la Corse. Si l'histoire vous intéresse VRAIMENT, vous vous pouvez lire, sur un moteur de recherche: " Autonomie de la Corse : les réal...

à écrit le 13/03/2024 à 7:00
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Combien nous coûte la Corse ? En fait nous sommes français pour recevoir l'argent mais corse pour le dépenser.

à écrit le 12/03/2024 à 14:13
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Ce statut va nous coûter combien, pour conserver notre porte-avions?

à écrit le 12/03/2024 à 14:06
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Il n'y a pas deux France, il ne doit pas y avoir de différence de statut entre deux citoyens...

le 12/03/2024 à 16:32
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Et pourtant les biens corses ne payent pas de droits de succession !

à écrit le 12/03/2024 à 13:53
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Devant la médiocrité des politiciens du continent la Corse a besoin de respirer un autre vent. J'espère que les élus corses seront au rendez d'un renouveau pour l'île.

le 12/03/2024 à 16:33
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L'ile partagée entre les indépendantistes et la mafia.

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