
CDD gelés, missions d'intérim au rabais, chute des offres d'emploi, allongement des files d'attente pour les banques alimentaires....depuis plus d'un an, la France de la précarité vit au rythme des vagues épidémiques. La déferlante des variants et la saturation des services de réanimation ont une nouvelle fois obligé le chef de l'Etat à étendre les mesures de confinement à l'ensemble du territoire pour au mois trois semaines et a fermé les établissements scolaires de la maternelle au lycée en passant par les universités. Avec ces dernières annonces, les personnes les plus pauvres et les plus vulnérables risquent de trinquer en premier lieu. Face à cette urgence, le comité de la stratégie nationale de prévention et de lutte contre la pauvreté, présidé par Louis Schweitzer a tiré la sonnette d'alarme lors d'un point presse ce vendredi en dévoilant son rapport. "Si les chiffres pour 2020 ne sont pas encore connus, il apparait dès à présent que la crise sanitaire a et aura des conséquences économiques et sociales très importantes" expliquent les auteurs du document. "Lorsque les dispositifs d'aide en place seront arrêtés, on s'attend à voir basculer dans la pauvreté une part importante de ceux qui en bénéficient actuellement".
La hausse inexorable du nombre d'allocataires du RSA
Le nombre d'allocataires du revenu de solidarité active (RSA) a franchi le seuil fatidique des 2 millions de personnes récemment avec une augmentation de 7% entre décembre 2019 et décembre 2020 . S'il n'existe pas encore à ce stade de chiffres précis sur la pauvreté en France, cette hausse galopante des bénéficiaires du RSA illustre les ravages de la crise sur les individus les plus fragiles. Interrogé par La Tribune, le président du comité, Louis Schweitzer, indique que cette hausse s'explique en grande partie par les moindres sorties du dispositif. En effet, les perspectives pour de nombreux allocataires de sortir de la pauvreté par la voie professionnelle se sont vraiment assombries depuis le printemps 2020 et les semaines à venir risquent d'être encore très difficiles avec la fermeture administrative de nombreux commerces et autres activités jugées "non essentielles".
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La situation préoccupante des jeunes
La propagation du virus sur l'ensemble du territoire et l'absence d'horizon a plongé de nombreux jeunes dans une situation préoccupante. Déjà avant la pandémie, leur situation financière était loin d'être la panacée. Beaucoup exerçaient des petits boulots pour tenter de vivre et ceux qui étaient en étude supérieure devaient parfois concilier des petits jobs et la réussite de leurs examens. "Le système socio-fiscal actuel rend les étudiants, les jeunes en emploi peu rémunéré et à plus forte raison les jeunes 'NEET' dépendant des aides familiales et des revenus du travail souvent précaires, avec des effets délétères et potentiellement persistants sur leur parcours éducatif ou professionnel" indiquent les rapporteurs du comité piloté par France Stratégie. "La période de crise actuelle est venue exacerber cette situation et a montré combien les difficultés du marché du travail et les pertes de revenus des parents redoublent la vulnérabilité des jeunes" complètent-ils.
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Un revenu de base pour les jeunes
La crise a ravivé les débats sur la mise en place d'un revenu pour les jeunes. Pour l'instant, Emmanuel Macron n'a pas ouvert de perspective favorable à l'extension d'un revenu de solidarité active pour les moins de 25 ans alors que de nombreux syndicats étudiants le réclament. D'autres économistes proches de la Macronie comme Philippe Aghion proposent la mise en place d'un revenu sous certaines conditions inspiré du modèle danois. L'un des points d'achoppement important du débat est cette conditionnalité. L'absence de condition serait une trappe à pauvreté en favorisant l'inactivité. De leur côté, les auteurs du rapport ne semblent pas vraiment d'accord avec cette thèse.
"La France est l'un des rares pays européens pour lesquels l'âge requis pour accéder au revenu minimum est plus élevé que l'âge de la majorité. Les effets pervers du versement d'une compensation monétaire sur la recherche d'un emploi ne sont pas confirmés par les travaux empiriques existants. Il convient de se doter d'une politique de la jeunesse plus ambitieuse, permettant d'en finir avec la logique de « minorité sociale » à laquelle conduit le système actuel pour les 18-24 ans."
Ils proposent notamment l'instauration d'un revenu de base pour les jeunes entre 18 et 24 ans sous certaines conditions de ressources et en tenant compte de la solidarité familiale. Il ciblerait les jeunes en étude, en emploi précaire ou en recherche d'emploi.
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