Emploi : Après les syndicats, les organisations patronales avancent leurs propositions à Matignon

Les organisations patronales doivent notamment aborder l'emploi des seniors. Elles devraient également défendre la dégressivité des allocations chômage. La semaine passée, les syndicats avaient été reçus à Matignon. Ils avaient alors rappelé leur ferme opposition à la réforme des retraites, dont les décrets d'application sont en cours d'élaboration, pour une application au 1er septembre.
Les discussions avec le Medef, la CPME et l'U2P devraient être beaucoup moins conflictuelles qu'avec les représentants de salariés qui estiment avoir été « trahis » après l'adoption de la réforme des retraites (Photo d'illustration).
Les discussions avec le Medef, la CPME et l'U2P devraient être beaucoup moins conflictuelles qu'avec les représentants de salariés qui estiment avoir été « trahis » après l'adoption de la réforme des retraites (Photo d'illustration). (Crédits : Reuters)

Le dialogue entre les organisations patronales et le gouvernement reprend. Après les syndicats la semaine dernière, elles sont reçues lundi et mardi à Matignon, en fin d'après-midi. Les discussions avec le Medef, la CPME et l'U2P devraient être beaucoup moins conflictuelles qu'avec les représentants de salariés qui estiment avoir été « trahis » après l'adoption de la réforme des retraites.

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« On y va pour parler méthode » et notamment pour obtenir du gouvernement qu'il reprenne « les éventuels accords qu'on signerait » avec les syndicats, a indiqué à l'AFP le président du Medef, Geoffroy Roux de Bézieux. L'engagement a déjà été pris par le gouvernement pour l'accord sur le partage de la valeur en entreprise, signé par quatre syndicats et qui doit être transposé dans un projet de loi présenté fin mai en Conseil des ministres.

« On a fait un effort important en acceptant de signer avec les partenaires sociaux » cet accord, prévient Jean-Eudes du Mesnil, le numéro deux de la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME), ajoutant qu'« il est évidemment hors de question qu'on remette la main à la poche ».

Exonération de cotisations assurance-chômage

A la suite de la réforme des retraites et au rejet par le Conseil constitutionnel de ses dispositions sur le CDI seniors et l'index seniors, le Medef et la CPME, qui seront reçus en fin de journée lundi par Elisabeth Borne, entendent parler de l'emploi des seniors. Au-delà du recul de l'âge de départ en retraite à 64 ans, « si on veut augmenter le taux d'activité du pays, il faut qu'on ait un taux d'emploi des seniors plus élevé », insiste Geoffroy Roux de Bézieux.

Le président du Medef souhaite mettre à l'agenda social la question de la transition entre le travail et la retraite « pour permettre aux gens de prendre leur retraite progressivement » comme cela se fait dans certains pays d'Europe du Nord. La CPME de son côté va remettre sur la table sa proposition d'exonérer de cotisations assurance-chômage les seniors.

« La contrepartie, c'est que si l'entreprise doit se séparer du senior avant l'âge de mise à la retraite, à ce moment-là l'entreprise doit rembourser l'ensemble des exonérations qui ont été attribuées », explique Jean-Eudes du Mesnil.

Sur les salaires, les entreprises privées « ont fait le job »

Les deux premières organisations patronales désirent, par ailleurs, limiter la possibilité d'ouvrir un compte épargne-temps dans toutes les entreprises à la prise des jours épargnés juste avant la retraite, et non tout au long de la vie professionnelle comme cela est le cas dans certaines grandes entreprises. Le Medef défendra aussi la dégressivité des allocations chômage, alors que selon le numéro un de la CFE-CGC François Hommeril, Elisabeth Borne envisagerait de « laisser les partenaires sociaux revenir » sur cette mesure entrée en vigueur en février.

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Sur les salaires, Geoffroy Roux de Bézieux estime que « les entreprises privées ont fait le job » avec un salaire moyen par tête en hausse de 5,8% selon l'Urssaf, contrairement à l'Etat-employeur chez lequel la hausse est « autour de 2% ». Mais il est prêt à parler du problème de la faible progression des salaires nets entre un et deux Smic, alors que selon certaines études, « entre 60% et 70% des augmentations de salaire ne se retrouvent pas en net », en raison notamment de la disparition de la prime d'activité.

La bataille des retraites « ne cessera jamais »

D'une manière générale, « on vient plutôt avec une liste de sujets dont on veut discuter, on ne vient pas avec nos propositions et nos solutions », indique Geoffroy Roux de Bézieux qui s'apprête à passer la main à la tête du Medef. Il exclut toutefois de discuter avec les syndicats de sujets sur lesquels les positions sont trop antagonistes, comme l'indexation des salaires.

« Le dialogue social ça marche quand il y a du grain à moudre et qu'il y a la volonté de part et d'autre de trouver un compromis », affirme le président du Medef.

La CPME, qui veut aussi aborder la crise du logement et l'utilisation du compte personnel de formation, assure n'être « absolument pas dans un état d'esprit défensif » après la réforme des retraites. L'Union des entreprises de proximité (U2P), qui représente artisans et professions libérales, sera reçue mardi par Elisabeth Borne.

Ces discussions interviennent au lendemain de la publication d'une interview de Laurent Berger dans les colonnes du Journal du Dimanche. Le premier secrétaire de la CFDT y affirme que la bataille des retraites « ne cessera jamais », précisant cependant qu'il préfère « obtenir des avancées concrètes » pour les salariés plutôt que de « poursuivre un but difficile à atteindre ».

« On verra après le 8 (juin, jour théorique de l'examen d'une loi d'abrogation de la réforme des retraites, NDLR). C'est certain qu'on ne va pas faire des manifestations à répétition », affirme Laurent Berger, qui quittera ses fonctions le 21 juin, interrogé sur le devenir du mouvement de contestation contre le recul de l'âge de départ à 64 ans.

Intersyndicale le 30 mai

« Notre sujet aujourd'hui, au sein de l'intersyndicale, est de se demander si on envoie dans le mur cette force populaire en lui faisant poursuivre un but difficile à atteindre ? Ou est-ce qu'on la transforme en énergie pour mettre nos interlocuteurs sous pression et obtenir des avancées concrètes ? Je préfère la deuxième option », poursuit-il.

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Après avoir échoué à faire reculer le gouvernement, les syndicats sont confrontés à un dilemme, rejeter la reprise du dialogue avec le gouvernement, ou reprendre les discussions pour obtenir des « avancées concrètes » malgré tout. La secrétaire générale de la CGT, Sophie Binet, a affirmé mercredi ne pas voir l'intérêt d'une multilatérale Etat-syndicats-patronat, comme le souhaite la Première ministre, s'il n'y avait « pas d'annonces concrètes sur la question du retrait de la réforme des retraites ou de la hausse des salaires ».

« Nous participerons à la suite », affirme de son côté Laurent Berger. « Certains collègues de l'intersyndicale peuvent être en désaccord là-dessus. Mais nous voulons nous servir de la force du mouvement social pour obtenir des avancées pour les travailleurs et cela nécessite d'aller discuter », affirme-t-il.

Autre signe de possibles désaccords au sein de l'intersyndicale, Laurent Berger est moins affirmatif que Sophie Binet sur le fait que des propositions communes émergeront de la réunion des syndicats prévue le 30 mai. « L'intersyndicale se réunira le 30 mai, nous verrons si une réponse émerge le soir même. Si on peut porter des revendications communes, c'est très bien. Sinon, cela reste la pluralité du mouvement syndical », explique-t-il.

(Avec AFP)

Commentaire 1
à écrit le 23/05/2023 à 10:00
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Pourquoi faire simple? Quand on peut compliquer par un report de l'âge de départ au lieu d'un nombre d'annuités cotisés ! ;-)

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