Lutte contre le déficit public : les élus locaux ne veulent pas être la variable d’ajustement

Alors que l'Insee s'apprête à dévoiler, mardi, le pourcentage du déficit public pour 2023, Bruno Le Maire s'est déjà engagé à sabrer dans les dépenses publiques. Dans son viseur notamment: les élus locaux qui refusent toute coupe budgétaire. Explications.
César Armand
Emmanuel Macron (à gauche) et André Laignel (à droite), premier vice-président (PS) délégué de l'Association des maires de France et président du Comité des Finances locales (Photo d'illustration).
Emmanuel Macron (à gauche) et André Laignel (à droite), premier vice-président (PS) délégué de l'Association des maires de France et président du Comité des Finances locales (Photo d'illustration). (Crédits : Ludovic Marin / AFP)

Quel chiffre annoncera demain l'Insee pour le déficit public ? Alors que les agences de notation Fitch, Moody's et Standard & Poor's vont se pencher sur la note de la dette française en avril et en mai prochain, le gouvernement veut montrer qu'il cherche à faire des économies par tous les moyens. Dans une interview accordée à Sud-Ouest samedi, le ministre de l'Economie et des Finances a déclaré que « rétablir les comptes publics [était] vital pour tous les Français ». « Cela nous permet de reconstituer des réserves financières si demain une nouvelle crise devait survenir » a poursuivi Bruno Le Maire.

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Après un premier coup de rabot de 10 milliards d'euros décidé le 19 février dernier, le gouvernement envisage désormais d'économiser 20 milliards d'euros supplémentaires dans le budget 2025. Le premier président de la Cour des Comptes, Pierre Moscovici, évoque, lui, 50 milliards d'euros. Sauf qu'à en croire le sénateur (LR) de Meurthe-et-Moselle, Jean-François Husson, rapporteur général de la commission, le déficit public devrait s'envoler à 5,6% du PIB. Soit 65 milliards d'euros d'économie à trouver !

Les élus locaux vent debout

Pour combler les trous, l'exécutif cible, notamment, les dépenses des collectivités territoriales. Le patron de Bercy réunira le 9 avril les représentants des maires, des départements et des régions pour « identifier des économies ». « Il faut discuter », a ajouté Bruno Le Maire. Une discussion qui se fera dans le cadre d'un Haut conseil des Finances publiques locales lancé fin juin par le ministre de l'Economie. Et ce alors même qu'il existe déjà un Comité des Finances locales (CFL), présidé par André Laignel, premier vice-président délégué (PS) de l'association des maires de France (AMF) et composé d'élus locaux, de parlementaires et de hauts-fonctionnaires.

Selon les calculs de Bruno Le Maire, les collectivités représentent en effet 20% des dépenses publiques. Mais « si le gouvernement restreint nos dotations alors même qu'il faut maintenir les services publics et investir dans la transition écologique, nous risquons de devoir augmenter nos impôts », pointe Bertrand Hauchecorne, président (Sans étiquette) de la commission Finances de l'Association des maires ruraux (AMRF).

« Investir dans la lutte contre le changement climatique, dans la réduction de l'empreinte carbone et dans la compétitivité des entreprises est un impératif absolu, sauf à accepter à la fois notre déclassement économique, notre perte de souveraineté et notre incapacité future à diminuer l'ampleur du changement climatique », appuie, auprès de La Tribune, Carole Delga, présidente (PS) de la région Occitanie et patronne de l'association d'élus Régions de France.

Bercy pourrait cependant rétorquer aux maires que la taxe foncière va mécaniquement augmenter de 3,9% en 2024 tirée par l'indice des prix à la consommation de l'Insee qui sert à calculer la hausse des bases locatives et donc des impôts locaux. Ou encore que l'ex-Première ministre Elisabeth Borne a revalorisé de 100 millions d'euros la dotation globale de fonctionnement (DGF) dans la dernière loi de finances 2024.

« Cela manque de cohérence. Après le Fonds vert amputé de 400 millions d'euros mi-février, qu'est-ce qu'ils vont raboter demain ? », s'interroge Bertrand Hauchecorne.

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Vote des budgets 2024-2025

Les déclarations du ministre de l'Economie interviennent en outre à un moment où les collectivités territoriales sont en train de voter leur budget 2024-2025. Conformément à la règle d'or qui leur incombe, les élus locaux ont jusqu'au 15 avril prochain pour adopter des dépenses et des recettes à l'équilibre... à la différence de l'Etat. « La dette des collectivités représente 9% de la dette publique, une dette que nous payons nous-mêmes car intégrée dans nos comptes », rappelle André Laignel de l'AMF.

« ll n'y a donc aucune raison de faire une fois de plus les finances locales la variable d'ajustement des errances de l'Etat ! Le levier local est essentiel pour la relance et la modernisation du pays. Nous représentons 70% de la commande publique locale », poursuit le président du Comité des Finances locales.

D'autant que ce n'est pas la première fois que le président Macron s'en prend aux élus locaux. Dès décembre 2017, le gouvernement Philippe avait fait signer aux 322 collectivités territoriales les plus riches - régions, départements, intercommunalités et communes -  un « contrat de Cahors » visant à limiter les dépenses de fonctionnement. Jusqu'à la Covid-19, ces derniers avaient pris l'engagement de limiter la hausse de ces dernières, en échange d'une stabilité de leur dotation globale de fonctionnement (DGF).

A peine sorti de la crise sanitaire, l'exécutif avait baissé de 10 milliards d'euros les impôts de production fin 2020, puis fin 2021. Candidat à sa réélection, le président Macron avait annoncé vouloir les réduire encore en supprimant la cotisation sur la valeur ajoutée des entreprises (CVAE) pour toutes les sociétés concernées. Une annonce confirmée par l'ex-locataire de Matignon Elisabeth Borne lors de son discours de politique générale du 6 juillet 2022 mais qui n'a jamais été suivie ni dans son calendrier ni dans ses montants.

César Armand
Commentaires 21
à écrit le 29/03/2024 à 15:06
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Les coûts de fonctionnement de l'entreprise France sont largement dus à l'organisation du territoire. Par exemple : le budget "éducation" est élevé, les profs mal payés, mais l'argent passe dans la gestion et l'entretien des établissements (deux fois...

à écrit le 26/03/2024 à 12:26
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Les collectivités locales embauchent , il y a des doublons partout, elles augmentent massivement la taxe foncière , faisant payer à seulement une partie des français, la totalité de l'impôt. Une réforme du financement des collectivités locales est u...

le 27/03/2024 à 9:29
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vous oubliez les ravages des premiers de cordee les chouchou du macronisme que ce soit atos ou autre et en plus le personnage fait des loi a bruxelles sans etre elu l'autre vision de la démocratie macron lui nie complètement tous les élus ( et...

à écrit le 26/03/2024 à 9:38
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Facile de s´attaquer aux collectivités, pourtant qui sont souvent aux abois financièrement. Autre solution : travailler sur le fond, avoir une compréhension du sujet. Nous avons le problème du millefeuille administratif et de la taille ridicule de be...

le 26/03/2024 à 9:50
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Allez faire un tour discret dans les médiathèques et les services des sports, vous verrez si les mairies sont aux abois !!!!

le 26/03/2024 à 12:49
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@ Calamard : comment oser généraliser de la sorte? Vous avez visité mille collectivités réparties sur tout le territoire? Que beaucoup soient mal gérées, c est sûr, mais le commentaire indique plusieurs des causes, et là Macron n a absolument rien fa...

à écrit le 26/03/2024 à 7:33
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La macronie était dépourvue d’élus locaux, elle aurait dû supprimer la moitié des échelons, et avec ça le nombre d’élus, cabinets, service com, etc etc. Supprimer des dotations sans toucher au millefeuille, alors les économies se feront sur les fon...

le 26/03/2024 à 10:14
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La macronie n'a guère d'élus locaux, mais ses supplétifs de droite en ont généralement à revendre, tel un Bruno Le Maire ayant démissionné de la fonction publique pour devenir un politicien de métier achetant comme ses prédécesseurs le vote de la coh...

à écrit le 26/03/2024 à 7:25
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Ils feront pourtant comem d'habitude ce que les marchés financiers leur diront car nos dirigeants sont faibles.

à écrit le 26/03/2024 à 6:34
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Bonjour tout le monde vas devoir faire des économies eux aussi.. D'ailleurs dire que certains commune vive bien ... et un peux vrais Pour info , ils y a plus d'argent...l'heure est au realiste budgétaires

à écrit le 26/03/2024 à 6:24
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Dans ville en 1980 elle était gérée avec 90 employés municipaux pour 6000 habitante on est maintenant à 7800 habitants et on a 230 fonctionnaires et pendant ce temps on a créé une intercommunalité STOP AU DÉLIRE revenez sur terre Monsieur le vice pr...

le 26/03/2024 à 16:21
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Le nombre de fonctionnaires a aussi pu augmenter d'une part car la population a vieilli (ce qui nécessite des services sociaux) et aussi et surtout car le rêve du patron français lambda est généralement de remplacer ses salariés français par des mach...

à écrit le 26/03/2024 à 3:57
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En fait je rappelle que les collectivités locales reçoivent une dotation de l'Etat, il suffira à ce dernier de réduire celles ci et le tour sera joué. Et quelle que soit la future majorité gouvernementale,elle sera confrontée au même problème, on ne...

le 26/03/2024 à 6:21
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@Jason. Effectivement votre situation est tres degradee et les suites a venir vont etre desastreuses pour la population dans son ensemble, les plus pauvres les plus exposes. Ici, pas un mois ne passe sans une demande d'un jeune diplome fraichement ...

le 27/03/2024 à 2:06
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C'est peu probable qu'on impose à la France une austérité à la grecque car les bénéficiaires des dépenses les moins justifiées servent à acheter la loyauté des vieux bourgeois pro-UE et à supposer qu'on les mette au régime sec, la question du Frexit,...

à écrit le 26/03/2024 à 3:56
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En fait je rappelle que les collectivités locales reçoivent une dotation de l'Etat, il suffira à ce dernier de réduire celles ci et le tour sera joué. Et quelle que soit la future majorité gouvernementale,elle sera confrontée au même problème, on ne...

à écrit le 26/03/2024 à 3:15
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Et pourtant, il y a des milliards d'économies faciles à trouver dans les collectivités locales. Redondance dans les communautés d'agglomération, budget clientélistes des service de sport , de médiathèques , de communication. Journaux coûteux qui fin...

le 26/03/2024 à 8:18
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+ 100

à écrit le 25/03/2024 à 22:15
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Les élus locaux feront ce que l’État leur dira de faire, à commencer par réduire leur train de vie et des dépenses que personne ne leur a demander d'engager. En particulier, l'arrêt de subventions en tout genre et clientéliste est à mettre en priorit...

à écrit le 25/03/2024 à 19:29
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Personne ne veut payer les gaspillages de Macron.

le 26/03/2024 à 6:26
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La question n'est pas de savoir si les gens veulent payer ou non. Il sera bientot impossible de payer la charge de la dette. Par consequent, soit de nouvelles taxes seront levees, soit des impots seront crees. Vous n'avez plus aucun champ libre. Pri...

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