Présidence du Medef : Guillaume Cairou, un candidat « révolté » qui veut déverrouiller l'organisation

PORTRAIT. Le PDG de Didaxis, ETI de 1.000 consultants dans le secteur du portage salarial, est candidat à la succession de Geoffroy Roux de Bézieux. Alors que le patronat se rendra ce 18 avril à l'Élysée à l'invitation du président Macron, Guillaume Cairou estime en effet que le Medef a « raté le coche » de la réforme des retraites. Il doit toutefois encore rassembler en interne...
César Armand
Guillaume Cairou est président de la Chambre de commerce et d'industrie (CCI) des Yvelines depuis le 2 décembre 2021
Guillaume Cairou est président de la Chambre de commerce et d'industrie (CCI) des Yvelines depuis le 2 décembre 2021 (Crédits : DR)

Article publié le 18/04/2023 à 6h18, mis à jour le 18/04/2023 avec le retrait d'Olivier Klotz

Et un quatrième candidat à la succession de Geoffroy Roux de Bézieux à la présidence du Mouvement des entreprises de France (Medef) ! Après la vice-présidente et porte-parole de l'organisation patronale, Dominique Carlac'h, le président délégué de la Fédération française de la sécurité, Pierre Brajeux, le président délégué sortant du Medef, Patrick Martin, qui vient de recevoir le soutien de l'Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM) et du président, à titre personnel, de la Fédération française du Bâtiment (FFB), c'est au tour de Guillaume Cairou d'entrer en piste le jour où le président Macron reçoit les patrons à l'Élysée. Le président du MEDEF Alsace, Olivier Klotz, vient de jeter l'éponge.

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Comme ses rivaux, le PDG de Didaxis, ETI qu'il a fondée en 2004 dans le secteur du portage salarial « et des nouvelles formes d'emplois », et qui compte 1.000 consultants, doit obtenir, d'ici au 6 mai, 150 parrainages parmi 560 membres de l'assemblée générale de l'organisation patronale. Chacun d'entre eux peut accorder trois parrainages au maximum. Une fois ces soutiens recueillis, le président de 49 ans du Club des entrepreneurs, de la Fondation des Talents et de l'Observatoire du Travail indépendant, aura, lui aussi, jusqu'au 6 juillet pour faire campagne et convaincre l'ensemble des 1.120 chefs d'entreprise à voter pour lui.

Un candidat « révolté »

D'ici là, Guillaume Cairou se présente déjà comme un candidat « révolté ». A la manière de son concurrent Pierre Brajeux qui a jugé, dans Les Echos, que « pour le moment, l'élection est totalement verrouillée », l'entrepreneur considère qu'il n'y a « plus de place pour le débat », comme Dominique Carlac'h qui a regretté, sur BFM Business, l'absence de joutes entre prétendants.

« Je veux un Medef entreprenant [son slogan de campagne, Ndlr], c'est-à-dire pouvoir rassembler et refonder une organisation qui, si elle ne se remet pas en question, mourra », assène à La Tribune Guillaume Cairou.

Chef d'entreprise après avoir été éducateur spécialisé, enseignant et consultant, le prétendant veut « révolutionner » le patronat « en portant la voix d'entreprises invisibles qui ne se retrouvent pas dans le Medef, un système dont le vainqueur nous est déjà indiqué », lâche-t-il encore, sans faire explicitement référence à Patrick Martin.

Sauf que selon nos informations, Guillaume Cairou aurait proposé à ce dernier d'être son « atout jeune ». Le quadragénaire ne nie pas. Il affirme que son aîné lui a répondu « bon courage » - qu'il interprète comme « une fin de non-recevoir » - et continue de marteler que c'est « le candidat d'un système », « une quasi-nomination ».

Le Medef a « raté le coche  » de la réforme des retraites

Il regrette ainsi que le Medef ait « raté le coche » de la réforme des retraites. « On colle encore à une image de poignée de puissants, de club des riches qui ferait la pluie et le beau temps sur le patronat. Il est temps de bâtir le mouvement de toutes les entreprises de France », estime-t-il.

« Ces crises à répétition sont une opportunité de nous réinventer, de nous moderniser, de nous rapprocher et de parler avec un public plus jeune, d'adopter une approche plus humaine auprès du plus grand nombre de Français, de donner davantage d'autonomie aux branches et aux territoires », poursuit Guillaume Cairou.

Son objectif, s'il est élu avenue Bosquet : appliquer une parité « parfaite » dans les instances et multiplier par deux le nombre de chefs d'entreprise durant le prochain mandat de cinq ans. Comment ? En allant chercher les 50% de patrons qui ont moins de 30 ans et les 50% qui sont des entrepreneurs individuels.

Le credo de Guillaume Cairou tient en trois verbes : oser, protéger et rassembler, et notamment au-delà du Mouvement des entreprises de France. A côté du front uni des syndicats de salariés, il défend le travail conjoint avec la Confédération des PME (CPME), l'Union des entreprises de proximité (U2P) et même la Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles (FNSEA) là encore pour « parler plus largement à la société civile et aux Français ».

Guillaume Cairou doit encore rassembler en interne

Toujours est-il qu'il doit encore rassembler en interne. Elu à l'hiver 2021 président de la Chambre de commerce et d'industrie (CCI) des Yvelines et, dans la foulée, vice-président de la CCI Paris Île-de-France, il est « loin de faire l'unanimité et devrait démissionner de ces deux fonctions », persifle un autre patron francilien.

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D'autres sont plus bienveillants mais l'alertent sur son manque de notoriété. « Si c'est un homme volontaire qui fait ce qu'il dit avec un réseau au-delà du 78, il n'est pas forcément connu du paysage national. De là à être représentatif de tous les territoires, il y a encore un long chemin », estime Danielle Dubrac, présidente de la CCI 93.

« C'est une belle personnalité engagée à fond sur ses sujets qui a beaucoup d'ambitions pour les entreprises, mais il ne part pas de la même ligne que les autres. Sa candidature n'est pas illégitime, mais arrive très tard », pointe Daniel Weizmann, président du Medef IDF.

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 Lutter contre la machine à normes et relancer la machine industrielle

« Confiant », Guillaume Cairou persiste et signe et promet d'être « plus proactif » pour reprendre la main sur le dialogue social sans attendre l'impulsion de l'Etat. Il veut par exemple « lutter contre la machine à normes » et « relancer la machine industrielle », signant une tribune dans Le Point avec l'ancien président du Medef Pierre Gattaz, tout en « réinventant » le modèle social, notamment en poussant la retraite par capitalisation. « On ne peut pas rester immobiles ! » tonne-t-il encore.

Sur le prochain projet de loi Plein-emploi, il plaide pour l'assouplissement des « carcans juridiques » du salariat et de l'entrepreneuriat en facilitant les passerelles entre les deux statuts, la transformation du droit du travail en « véritable droit de l'activité », l'incitation à la formation tout au long de la carrière et l'anticipation des fins de carrière. Ou encore en matière de dialogue social d'inscrire dans la Constitution le « principe de fidélité des retranscriptions législatives des accords nationaux interprofessionnels ».

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Le natif du Val Fourré à Mantes-la-Jolie entend par ailleurs « monter des projets » en faveur des quartiers prioritaires de la ville mais aussi des territoires ruraux. « L'emploi et la croissance passent par la création d'entreprises. Nous devons construire des ponts avec les écoles, au lieu de laisser ces deux mondes se côtoyer et s'ignorer, pour redonner le goût d'entreprendre », conclut-il.

Il sait de quoi il parle. Lui-même originaire d'un milieu ouvrier n'a pas étudié dans une école de commerce et s'est toujours entendu dire « Tu vas te planter ». Aujourd'hui, il a « envie » de « changer le monde », de « changer le Medef », estimant qu'il en a « le devoir ». Jusqu'à aujourd'hui, l'ascenseur social a toujours fonctionné mais s'arrêtera-t-il au sommet de l'organisation patronale ou tombera-t-il en panne avant ? Réponse dans moins de trois semaines.

César Armand
Commentaires 6
à écrit le 18/04/2023 à 15:02
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La décadence du Medef sera représentée par ce personnage. Cela annonce un avenir radieux pour les vrais employeurs.

à écrit le 18/04/2023 à 12:56
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"un candidat « révolté »" 2014 : Le courage d’Emmanuel Macron Par Guillaume Cairou, Président du Club des Entrepreneurs : Toutes les forces vives de notre pays doivent saluer le courage dont fait preuve Emmanuel Macron à travers son projet de ...

à écrit le 18/04/2023 à 12:27
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Le prix de l’inflation "Quiconque aurait considéré uniquement l'indice des prix n'aurait vu aucune raison de soupçonner un degré important d'inflation, alors que quiconque aurait considéré le volume total du crédit bancaire et le prix des action...

à écrit le 18/04/2023 à 8:31
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Il suffit de voir sa façon de parler pour voir qu'il est plus politicard qu'entrepreneur.

à écrit le 18/04/2023 à 8:10
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Ah, le fameux "portage salarial", où c'est le salarié qui porte l'entreprise. Dans le portage, c'est le "salarié" qui apporte ses clients; au nom de son "autonomie". C'est un simple franchisé; si son chiffre d'affaires n'est pas bon, il sort. Cela pe...

le 18/04/2023 à 17:32
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Les zelites (élites zélées qui font la cours aux capitaux étrangers pour sauver leur situation) de ce pays ont échoué ! Partout ! Les causes de la désindustrialisation ne sont pas réellement discutées en France... Il faut écouter les quelques rares...

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