
Le gouvernement donne un sérieux coup d'accélérateur. Alors que les débats sur la réforme des retraites devaient initialement s'achever dimanche, l'exécutif a dégainé vendredi l'arme constitutionnelle du vote bloqué, via l'article 44.3 devant le Sénat. Le Palais du Luxembourg est désormais contraint de se prononcer sur l'ensemble du texte par un vote unique, en ne retenant que les amendements proposés ou acceptés par le gouvernement.
Pour justifier le recours à cet outil législatif, le ministre du Travail a dénoncé « l'opposition méthodique » de la gauche à la réforme des retraites.
« Nous avons eu ensemble 74 heures de débats » depuis le 2 février et « à chaque article, malgré des discussions de fond, l'obstruction est devenue un choix méthodique », a dénoncé le ministre.
« Un coup de force »
La gauche s'est aussitôt élevée contre ce recours, dénonçant un « aveu de faiblesse » et un « coup de force ».
La CGT Energie a dénoncé un « 49.3 déguisé » et mis en garde contre une « escalade de la colère ».
En pratique, les débats ne cessent pas pour autant. La présidente de la séance, Nathalie Delattre (RDSE) a indiqué que le Sénat « verrait » quand même « le millier d'amendements qui restent dans la liasse ». Ces amendements pourront donc être présentés. En revanche, ils ne feront pas l'objet d'un vote ce qui raccourcit fortement la durée de l'examen du texte.
Le gouvernement « à l'écoute », assure Macron
A l'issue de la commission mixte paritaire (CMP) prévue mercredi prochain, la Première ministre Élisabeth Borne compte sur un vote des Républicains à l'Assemblée pour approuver la réforme, et ainsi éviter le recours à l'article 49.3 (adoption d'un texte sans vote). L'évocation de cette hypothèse se faisait toutefois de plus en plus insistante jeudi.
Ces déclarations interviennent alors que la contestation contre la réforme des retraites reste vive, plusieurs secteurs, dont l'énergie et les transports restant affectés par le mouvement social. Dans un courrier adressé à l'intersyndicale jeudi, et révélé par l'AFP ce vendredi 10 mars, Emmanuel Macron a indiqué que le gouvernement reste à « l'écoute ».
« Le gouvernement est, comme il l'a toujours été, à votre écoute pour avancer par le dialogue, trouver des solutions innovantes, sans transiger sur la nécessité de restaurer un équilibre durable de notre régime de retraite », a ainsi répondu aux syndicats le chef de l'Etat, sans donner suite à sa demande d'être reçue en urgence.
Emmanuel Macron défend le « temps parlementaire »
« Je ne sous-estime pas le mécontentement dont vous vous faites le porte-parole comme les angoisses exprimées par de nombreux Français inquiets de ne jamais avoir de retraite », a riposté le président dans sa missive, dont le contenu avait été révélé en premier par TF1/LCI.
Emmanuel Macron a insisté sur son « attachement au dialogue », mais aussi estimé que l'heure était au « temps parlementaire », après les « concertations menées » par la Première ministre et les aménagements déjà apportés au texte.
« En tant que garant des institutions, il est de mon devoir de préserver ce temps parlementaire qui se déroule actuellement », a-t-il ajouté, assurant que « tous les points de vue sont exprimés » dans les deux chambres.
« Vous exprimez avec force votre désaccord avec ce projet de loi et avez organisé des manifestations dans un esprit de responsabilité qui vous honore », poursuit le chef de l'État. « De nombreuses avancées ont été réalisées, y compris sur la question de l'âge légal en renonçant à le porter à 65 ans », pointe-t-il toutefois. Le gouvernement reste à « leur entière disposition dès lors qu'il y aura une volonté de dialogue et de compromis », insiste-t-on dans l'entourage du chef de l'État.
Les huit principaux syndicats et cinq organisations de jeunesse ont adressé par écrit cette demande au chef de l'État dès mardi soir, jugeant au passage que le silence de l'exécutif face au mouvement social posait un « grave problème démocratique ». L'intersyndicale a appelé à deux nouvelles journées de mobilisation: la première dès samedi, la suivante mercredi 15 mars, jour de la commission mixte paritaire.
(Avec AFP)
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