Relance : les propositions des experts-comptables à Bruno Le Maire

Activité partielle pour les patrons de PME et TPE, exonérations fiscale et sociale des heures supplémentaires, ouverture des commerces 24h/24... Dans une enquêté réalisée entre décembre et janvier, l'Ordre des experts-comptables a recueilli 50 propositions auprès de la profession pour relancer l'économie. Son président, Lionel Canesi, doit remettre ce catalogue de mesures à Bruno Le Maire dans quelques jours.
Grégoire Normand
L'Ordre des experts-comptables, présidé par Lionel Canessi, doit présenter prochainement 50 propositions au ministre de l'Économie Bruno Le Maire.
L'Ordre des experts-comptables, présidé par Lionel Canessi, doit présenter prochainement 50 propositions au ministre de l'Économie Bruno Le Maire. (Crédits : Reuters)

Les nuages s'amoncellent toujours au-dessus des TPE et PME françaises en ce début d'année 2021. L'apparition de nouveaux variants, le durcissement des mesures d'endiguement dans les zones les plus tendues ont douché les espoirs d'une reprise rapide et solide au cours du premier trimestre.

Dans sa dernière note de conjoncture, la Banque de France anticipe une perte de PIB d'environ 7% au mois de janvier. Dans ce contexte tourmenté, l'Ordre des experts-comptables, présidé par Lionel Canesi, doit présenter prochainement 50 propositions au ministre de l'Économie Bruno Le Maire.

"Préparer la reprise devrait être une cause nationale. Notre rôle est de faire des propositions d'amélioration des dispositifs actuels et de lancer des pistes pour relancer l'économie [...] En France, on a la chance d'avoir des mesures extraordinaires mais il faut regarder qui sont les oubliés des aides", a expliqué le responsable lors d'un point presse.

Il faut rappeler que le gouvernement a depuis le début de la pandémie mis en œuvre un certain nombre de mesures d'urgence extrêmement favorables aux entreprises (PGE, fonds de solidarité, report de cotisations et de prélèvements). L'arrivée du vaccin en France et le possible ralentissement du nombre de contaminations dans les mois à venir ouvrent des perspectives pour la relance économique.

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Le chômage partiel pour les patrons de TPE et PME

La mise sous cloche de l'économie française au printemps 2020 a poussé un grand nombre d'entreprises à avoir recours au chômage partiel pour des millions de salariés. Ce dispositif pris en charge par l'État et l'Unedic a ainsi permis de limiter une flambée du chômage en 2020 même si environ 700.000 postes ont été détruits sur l'ensemble territoire.

Parmi les mesures marquantes proposées par l'Ordre des experts-comptables figure la mise en place de ce dispositif pour les patrons de TPE et PME.

"Le fonds de solidarité sert à payer les frais généraux. Ce dispositif était adapté pour une crise de quelques mois. Avec le prolongement de l'épidémie, il faut que les dirigeants aient des revenus pour vivre. Une des clés de la relance est la confiance. Les PME et TPE font une grande partie de la vie économique en France. Il est important de mettre en place l'indemnité partielle du dirigeant", a déclaré Lionel Canesi.

Depuis le mois de mars 2020, l'État s'est substitué aux entreprises pour assurer une grande partie des revenus des salariés mis au chômage technique. En outre, l'ordre propose de "stopper l'acquisition de droits à congés payés pendant les périodes d'activité partielle et faciliter la possibilité d'imposer aux salariés la prise de congés et jours de RTT pendant ces périodes". Cette dernière suggestion risque d'enflammer les débats au sein des entreprises et des salariés.

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Prolonger le fonds de solidarité jusqu'à la fin de l'année 2021

Lors de "la mise en hibernation" de l'économie, le gouvernement a rapidement mis en place un fonds de solidarité destiné aux indépendants. D'abord plafonné à 1.500 euros par mois, cette enveloppe n'a cessé de prendre de l'ampleur.

Lors de ses voeux à la presse mardi dernier, Bruno Le Maire a annoncé le renforcement de ce fonds qui permettra de prendre en charge les dépenses fixes des entreprises "jusqu'à 3 millions d'euros" sur un an (contre 800.000 euros aujourd'hui par versements mensuels de 200.000 euros).

De son côté, l'Ordre des comptables avance qu'il faut prolonger le fonds de solidarité jusqu'à la fin de l'année 2021. Par ailleurs, l'organisation suggère également de revoir le mode de calcul du fond de solidarité. "Jusqu'à présent le fonds de solidarité est calculé sur le chiffre d'affaires. Ce n'est pas le bon indice. Il y a des effets d'aubaine. Certaines entreprises ont plus d'intérêt à rester fermées quand d'autres continuent de perdre beaucoup d'argent. Le bon indicateur est l'excédent brut d'exploitation ou les dépenses fixes", ajoute M. Canesi.

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Permettre un différé de remboursement des intérêts des PGE

Avec la persistance du virus, beaucoup d'entrepreneurs ont exprimé leur angoisse à l'égard des échéances de remboursement à venir, notamment dans les secteurs les plus durement touchés.

Au ministère de l'Économie, Bruno Le Maire a entamé des discussions avec la fédération bancaire française (FBF) pour obtenir un différé d'un an du remboursement des PGE. "Je souhaiterais que pour toutes les entreprises en difficulté, je dis bien toutes sans exception, la possibilité de différer d'un an supplémentaire le remboursement de son prêt garanti par l'État devienne un droit et que toute entreprise qui est en difficulté, qui souhaite décaler le remboursement de son prêt garanti par l'État du 1er mars 2021 au 1er mars 2022 puissent le faire" a expliqué récemment le ministre de la Relance.

De son côté, l'ordre professionnel des comptables soumet au gouvernement l'idée de permettre un différé du remboursement des intérêts et de la dette du PGE dans l'attente de la sortie de crise.

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Des exonérations fiscales et sociales

Sur le volet fiscal, Lionel Canesi indique "qu'il faut passer d'une fiscalité punitive à une fiscalité incitative. Lorsque une entreprise fait des bénéfices et décide de ne pas  distribuer de dividendes, elle devrait bénéficier d'une exonération pour renforcer ses fonds propres".

Il veut encourager les entreprises à investir dans le numérique et les sujets écoresponsables. "Quand une TPE investit sur site ou une plateforme de click and collect, elle doit pouvoir bénéficier d'un suramortissement", explique-t-il. Avec la montée en puissance du télétravail, il ajoute que les entreprises pourraient bénéficier d'une déduction fiscale quand "elles investissent dans du matériel informatique pour les salariés en travail à distance".

Sur les heures supplémentaires, il retient des idées déjà mises en œuvre sous le quinquennat Sarkozy et recyclées par Emmanuel Macron au moment de la crise des "gilets jaunes".

"L'exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires pour les TPE et PME doit pouvoir être appliquée. Cela va redonner du pouvoir d'achat aux salariés. Il faut remettre notre pays dans un cercle vertueux".

Lire aussi : Exonérations, reports de charges... Des aides suffisantes pour rebondir à la rentrée?

Ouverture des commerces 24h/24 et 7j/7

Enfin, parmi les propositions iconoclastes du catalogue présenté au gouvernement, apparaît la possibilité pour les commerces d'ouvrir 24h sur 24 et sept jours sur sept sans conditions. Cette idée qui nécessiterait une déréglementation totale des horaires d'ouverture risque elle aussi de raviver les débats sur le droit du travail. "Si un coiffeur veut augmenter son amplitude horaire, il faut qu'il demande l'autorisation", a affirmé Lionel Canesi.

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Grégoire Normand
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