Restauration : le « fait maison » bientôt sanctuarisé

Olivia Grégoire, ministre déléguée chargée des petites et moyennes entreprises, du commerce, de l’artisanat et du tourisme, veut mettre en place l’obligation de signaler les plats non préparés sur place dans les restaurants. Pour protéger artisans et consommateurs.
Rien ne contraint actuellement les restaurateurs à préciser l’origine de
leurs plats.
Rien ne contraint actuellement les restaurateurs à préciser l’origine de leurs plats. (Crédits : STEPHANE DUBROMEL / HANS LUCAS)

Petite révolution à venir dans l'univers de la gastronomie. Comme l'annonce à La Tribune Dimanche Olivia Grégoire, la ministre déléguée chargée des PME, du Commerce, de l'Artisanat et du Tourisme, le « fait maison » sera désormais garanti comme tel dans les 175 000 restaurants de France. Avant la fin de cette année, l'an- cienne porte-parole du gouvernement veut instaurer de nouvelles règles. Avec un triple objectif : protéger le consommateur, défendre les restaurateurs qui proposent à leurs clients des plats réellement préparés sur place et préserver la gastronomie nationale, classée au patrimoine culturel immatériel mondial de l'Unesco en 2010.

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« Nous y travaillons depuis plusieurs mois, dévoile la ministre, qui a choisi la fin de la Semaine du goût pour révéler cette initiative. Nous devions agir. Car la mention - facultative - sur les cartes du "fait maison", un label créé en 2014, est compliquée et reste de ce fait peu utilisée. »

Tout plat non fait maison devra être signalé sur les cartes

Les restaurateurs ont en effet aujourd'hui le choix de mentionner spécifiquement sur leurs menus les plats qui ont été cuisinés à partir de produits bruts dans leur établissement. Mais à l'inverse, rien ne contraint actuellement ceux qui offrent des plats entièrement concoctés ailleurs (souvent d'origine industrielle et réchauffés au micro-ondes avant d'être servis) à préciser leur origine.

 « Impossible au pays de la gastronomie de ne pas clairement informer le consommateur », assure Olivia Grégoire, qui récuse toute logique punitive ou manichéenne. Voilà pourquoi, au plus tard en 2025, peut-être même dès l'année prochaine, tout plat non « fait maison » devra désormais être signalé sur les cartes. Si certaines organisations professionnelles ont initialement quelque peu boudé cette initiative, de nombreux chefs l'ont en revanche immédiatement saluée. Avec enthousiasme.

Comme Philippe Etchebest, le chef étoilé et star de Top Chef, très engagé sur ce sujet, ou Stéphane Manigold, le président du groupe Éclore (qui comprend par exemple les restaurants Substance, Bistrot Flaubert et Hémicycle).  « J'attends ce moment depuis longtemps » , se félicite ce dernier. La France recule chaque année dans les classements gastronomiques mondiaux.

Derrière l'Allemagne

Au point que nous sommes relégués à la neuvième place, derrière l'Allemagne. L'Italie, l'un de nos concurrents majeurs dans ce domaine, a légiféré en ce sens dès 2019. Chaque restaurateur transalpin doit depuis cette date indiquer ce qui n'a pas été cuisiné sur place. C'est une mesure d'équité. Une blanquette de veau industrielle coûte moins cher qu'une "vraie". Le client doit avoir cette information avant d'arbitrer entre plusieurs établissements. » De leur côté, de nombreux professionnels s'exaspèrent de plus en plus face à ce qu'ils estiment constituer une distorsion de concurrence, entre les vrais artisans et les autres.

Quelques semaines de concertation sont encore prévues avant l'ouverture d'un débat parlementaire. « Cette mesure est conçue pour préserver le savoir-faire national en la matière, ainsi que pour protéger nos filières agricoles, précise Guillaume Karbarian, député En marche et membre de la Commission des affaires économiques chargé des PME-TPE. Elle répond à une certaine logique. Quand on va au restaurant, a priori, c'est pour y déguster une cuisine élaborée sur place, à partir de produits bruts. Moins pour y manger un plat que l'on pourrait aussi bien réchauffer chez soi. »

Face à une offre très hétérogène, entre bistrots, fast-foods, brasseries, chaînes spécialisées ou restaus étoilés, Olivia Grégoire, également ministre de la Consommation, souhaite apporter « davantage de transparence, aux clients du quotidien comme aux touristes ». Elle ajoute : « C'est aussi bon pour le moral des restaurateurs qui se donnent du mal pour offrir des plats maison à leurs clients, alors que la hausse des prix des produits alimentaires et du coût de l'énergie ne les a pas épargnés. »

À moyen terme, cet affichage supplémentaire obligatoire deviendra la norme. Reste à définir, à l'aide d'un travail juridique et de nouvelles concertations avec les organismes représentatifs du secteur, ce que seront ses modalités. « Il faudra notamment réfléchir à la nature des futurs mécanismes de contrôle, dit Guillaume Karbarian. Mais nous devons d'abord être alignés sur le but recherché, car il y aura inévitablement des mécontents. »

Commentaires 4
à écrit le 23/10/2023 à 10:30
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Pour ouvrir un restaurant, il devrait être exigé à minima un CAP avec un volet fortement orienté Hygiène...Un logo affiché à l'entrée du restaurant attestant de ce diplôme. Sur les menus, un Code couleur pour indiquer, Frais ou Congelé ou Industriel...

le 23/10/2023 à 10:59
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"avec un volet fortement orienté Hygiène.." C'est l’hygiénisme qui a mené au surgelé et aux conserves hygiéniques en soi et à la malbouffe par extension. L’hygiénisme est un fléau d'abord et avant tout là pour nous vendre des produits chimiques tandi...

à écrit le 23/10/2023 à 8:25
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Ben les mécontents seront ceux qui flouent leurs clients.. avec de la bouffe industrielle type «  tricatel » de toute façon fait maison n a aucune valeur légale ou contraignante … ça peut été afficher et venir de métro sodexho pomona etc … tous les m...

à écrit le 23/10/2023 à 8:17
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Ils suivent l'ère du temps mais n'en son certainement pas les instigateurs étant donné que les restaurants qui tiennent le coup, et avec quel courage hein, les cartes se sont drastiquement réduites les cuisiniers ne préparant plus que quelques plats ...

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