Une histoire de l'industrie

Fondée sur le principe d’accélération des cadences et d’accroissement de la production, l’industrie, bien qu’étroitement liée à la notion de progrès, a longtemps été synonyme de labeur intense, si ce n’est d’aliénation. De Zola avec Germinal, aux Temps Modernes de Chaplin, son image a souvent été négative. Au point que son abandon à la suite des Trente Glorieuses fut parfois perçu par nos responsables politiques comme un mal pour un bien. Or, les temps changent ! Le Covid est passé par là, l’écologie commande d’autres modes d’action et l’idée de souveraineté économique signe son grand retour, à l’instar du Made in France. Une aubaine pour le secteur industriel qui, après avoir frôlé l’extinction, renaît avec des ambitions nouvelles. (Cet article est issu de T La Revue n°16 - Réindustrialiser et décarboner la France)
(Crédits : Istock)

C'est l'histoire d'une reconquête... Mieux : d'un retour en grâce dans un territoire, le Nord de la France, que l'on pensait définitivement perdu pour la cause. À Onnaing, près de Valenciennes, le constructeur Toyota a assemblé 255 936 véhicules en 2022, soit 50 000 de plus qu'en 2021. Un chiffre impressionnant qui fait de l'usine du constructeur japonais la première usine automobile de France, loin devant l'historique fief sochalien de la marque Peugeot. Évidemment, en 2023, à l'heure où le localisme et le Made in France sont devenus de véritables préoccupations pour le consommateur, il y a une certaine logique à produire sur le territoire national les automobiles destinées au marché hexagonal. En 1997 pourtant, lorsque Toyota entendait s'implanter dans le Hainaut, les observateurs étaient perplexes... Obnubilées par leur objectif de réduction des coûts, les autres marques faisaient d'ailleurs un choix diamétralement opposé : elles produisaient ailleurs, pour moins cher. « La concurrence française de l'époque est alors mise au monde sous d'autres latitudes, explique Benoît Fauconnier, journaliste à La Voix du Nord et responsable du blog Quatre Cylindres En Ligne[1]. La Renault Clio est produite en majorité en Turquie (et aussi en Slovénie), la Renault Twingo en Slovénie, le Renault Captur en Espagne, la Peugeot 208 et la Citroën C3 en Slovaquie, les Peugeot 2008 et Citroën C3 Aircross viennent d'Espagne. » À Onnaing, Toyota entend jouer les précurseurs et prend le contre-pied de cette tendance. Annoncée en décembre 1997, l'arrivée de la marque s'accompagne de la création en novembre 1998 d'une filiale qui va construire et exploiter la future usine. Coût de l'investissement : environ 5 milliards de francs de l'époque que l'État et les collectivités locales, certaines des retombées positives à venir, accompagnent à hauteur de 340 millions de francs d'aides publiques ainsi qu'avec la nomination spéciale d'un sous-préfet chargé de mission pour les besoins du projet. C'est le branle-bas de combat : pas moins de mille ouvriers s'affairent à la construction de 101 000 m2 comprenant un bâtiment administratif et cinq ateliers. Avec un maître-mot : proposer un espace compact, pratique, peu gourmand en énergie et jouant sur les synergies. Le résultat de l'aventure se mesure aujourd'hui : la compétitivité est là au point de rendre jaloux les constructeurs hexagonaux. « Chez Toyota, ce ne sont pas des philanthropes, reprend Benoît Fauconnier. Si la production d'une Yaris est possible en France, c'est que l'entreprise gagne de l'argent en le faisant. Mieux, le constructeur y fabrique même un SUV dérivé sur la même base, le Yaris Cross, depuis la mi-2021, et pourrait donc largement dépasser son objectif de produire à Onnaing plus de 300 000 voitures par an. » En attendant, Toyota tire profit de sa nouvelle image et remporte nombre de titres qui font vibrer la fibre patriote : « La Yaris a décroché le label "Origine France garantie" (plus de 50 % de la valeur ajoutée du produit fini vient de France), et c'est bel et bien la Yaris la voiture la plus produite en France. » Et puisque la réussite est au rendez-vous, l'aventure de la réindustrialisation se poursuit avec force. L'emploi y gagne. Du fait de la hausse de volume de production, le constructeur entend poursuivre sa politique de transformation de CDD en CDI. Aujourd'hui, au nombre de 3 750 (sur un effectif total de 5 000 salariés), les contrats à durée indéterminée devraient s'élever à 4 000 d'ici la fin de 2024. Une réussite qui inspire. Dans le Nord, ce seront les méga-usines de batteries qui verront le jour dans les années qui viennent.

Des cathédrales au colbertisme, éthique et esprit de l'industrie

Si l'Hexagone semble aujourd'hui renouer avec un certain dynamisme productif, son histoire industrielle n'a pas toujours été un long fleuve tranquille. Depuis des siècles, bien avant l'invention de la machine à vapeur ou du métier à tisser, l'homme a cherché par tous les moyens à fabriquer les outils qui lui étaient nécessaires, si possible avec une technique reproductible, le moins de pertes possibles et des gestes qui se transmettent, qui se répètent. Voilà bien une première définition, certes parcellaire, de l'industrie. Durant l'Antiquité, on trouve déjà, sur tout le territoire de la Gaule de nombreux ateliers dont la production est parfois très importante. Les techniques d'Athènes, mais surtout de Rome, vont s'y exporter, se mêler aux savoir-faire locaux. Et déjà les prémices de la standardisation existent bien, notamment pour les céramiques, les poteries, les amphores, souvent fabriquées sur le même modèle, sur le même mode, avec les mêmes outils et la même méthode. Le tout jusqu'au Moyen Âge, où de grands chantiers se lancent, notamment ceux aussi titanesques que spectaculaires des cathédrales qui utilisent des pierres taillées en série, une main-d'œuvre importante ainsi que de premières machines au fonctionnement pensé et sophistiqué. Pour Pierre Musso, philosophe et professeur honoraire à l'université de Rennes 2 et Télécom Paris, l'esprit de l'industrialisation précède de loin la révolution industrielle : « On peut faire remonter l'origine de l'imaginaire industriel à saint Paul ("Tu devras travailler à la sueur de ton front"), à saint Augustin ("Que feraient les moines s'ils ne travaillaient pas ?"), explique-t-il[2]. La revalorisation du travail est clairement portée par le christianisme, en particulier dans la règle bénédictine, et elle triomphe dans le monastère. À partir de cette révolution grégorienne et papale, entre 1075 et 1215 avec le 4e Concile de Latran, on a l'idée que l'homme va poursuivre la création de Dieu, la parfaire grâce à son travail. Il fallait avoir cette vision du monde pour entrer dans l'industrie. D'ailleurs, étymologiquement, l'industrie, cela veut dire projeter à l'extérieur ce que l'on a en soi, le souffle intérieur, le génie intérieur, on retrouve cela dans le mot ingénieur : in - et struere qui en latin signifie construire, arranger. Le premier sens de l'industrie, c'est donc : explorer, modéliser, penser, mais surtout faire ! » À l'issue du temps des cathédrales et plus encore après la Renaissance, les prémices de l'industrie française fonctionnent par et pour les demandes royales grâce à une politique d'interventionnisme ciblé notamment en matière militaire et dans le domaine de l'aménagement du territoire. Sous l'impulsion de Colbert, éminence grise de Louis XIV et secrétaire d'État de la Maison du Roi, un modèle français s'invente alors, très tôt lié à la commande étatique. « Le colbertisme, explique Victor Delage, responsable des études à la Fondation pour l'innovation politique[3], visait à renforcer l'économie française en encourageant la production nationale et en protégeant les industries locales des importations étrangères, tout en favorisant les exportations. C'est dans ce contexte que le "village-usine" Villeneuvette fut fondé en 1677, dans le but de créer une manufacture royale de draps de laine de qualité supérieure, adaptés aux débouchés orientaux de la Méditerranée. Pour Colbert, l'État ne devait pas remplacer les entreprises mais leur offrir un cadre favorable. Cela passait notamment par le développement d'infrastructures adéquates - aménagements de routes, de canaux et de ports - pour améliorer le transport des marchandises à travers le pays et vers l'extérieur. L'historien David Todd souligne que Colbert, avec son principe "moins importer, plus exporter", est devenu le saint patron des ministres de l'Économie successifs, et ce quelle que soit leur couleur politique. Pour celui qui fut le contrôleur général des finances de Louis XIV pendant dix-huit ans, la puissance économique se fondait sur une balance commerciale excédentaire, à la fois source de ressources financières et signe de compétitivité. On est loin de notre déficit commercial de 164 milliards d'euros affiché en 2022, le pire de toute notre histoire... »

Le tournant de la révolution industrielle

Le tournant de l'industrialisation moderne, lorsqu'il arrive à la fin du XVIIIe siècle en Grande-Bretagne, est si puissant qu'on le qualifie couramment de révolution. Soudain, tout change, ou presque, dans la façon de produire grâce à l'emploi de la machine remplaçant, mais surtout, démultipliant la force de l'homme et de l'animal. Et puisque les perspectives s'ouvrent, les rendements augmentent et la production en série peut commencer. Son influence sera indéniable et profonde tant sur le plan économique qu'au niveau du paysage. Car avec les usines, les ateliers, le chemin de fer et la machine à vapeur, c'est bien la géographie qui se trouve être bouleversée. Le tout produisant un exode rural et l'arrivée en ville et dans les banlieues d'une main-d'œuvre bien décidée à profiter du saut technologique annoncé. Associé à la production en gros volumes de houille, le développement de la machine à vapeur va donner naissance sur tout le territoire à une industrie textile et sidérurgique d'envergure. De 1848 à 1870, la production augmente largement : la production de fonte est multipliée par 3,5, celle de charbon par 5, celle de textile par 2. De 79 hauts-fourneaux en 1845, on passe à plus de 200 à la fin du second Empire. Au niveau des transports, tout change également. Grâce à l'inauguration de la première ligne de chemin de fer entre Paris et Saint-Germain-en-Laye en 1837, le rail connaît une croissance exponentielle. En témoigne notamment l'ouverture de la ligne PLM pour Paris-Lyon-Marseille vingt années plus tard, en 1857, puis les 23 000 kilomètres de réseau ferré couvrant tout l'Hexagone en 1870 grâce à l'impulsion décisive de Napoléon III. Reste que dans les premiers temps de la révolution industrielle, la France semble marquer le pas. Comment expliquer le retard initial pris sur le Royaume-Uni, la Belgique, les pays du Nord ? « Longtemps, l'historiographie a fait état d'un "retard français" dans le domaine de la production industrielle par rapport à ses voisins, en particulier la Grande-Bretagne victorienne, qui s'était rapidement spécialisée dans les productions sidérurgiques, de textile et de charbon, avec une croissance rapide des industries à haut coefficient capitalistique dans un délai limité, analyse Victor Delage. Les raisons de ce supposé retard à l'allumage français ont été amplement débattues, notamment par d'éminents historiens de l'économie qui, selon leur obédience, pointaient les conséquences économiques désastreuses de la Révolution et de l'Empire, le ralentissement de la croissance démographique du pays ou un système de production trop dispersé dans les zones rurales. » Il ne faut toutefois pas tirer de conclusions hâtives de cette France qui connaît un passage à vide avant de grimper dans le train - en marche ! - de la révolution industrielle. En effet, plutôt que de transposer mécaniquement le modèle anglais, la France adoptera sa méthode en se distinguant par la diversité de son industrialisation, et ce en fonction des régions et des contextes. « Ce processus combinait à la fois développement des industries rurales en tenant compte des traditions techniques propres à chaque région - cloutiers et taillandiers de l'arc jurassien, moyenne horlogerie comtoise... - et concentrations capitalistes aboutissant au développement de tissus industriels plus étendus - le bassin industriel stéphanois - avec un large soutien de l'État, notamment à partir du second Empire », analyse Victor Delage.

Si elle s'articule autour d'une nouveauté fascinante, à savoir la machine et sa puissance, la révolution industrielle a besoin de bras et s'avère dès lors avide consommatrice de force humaine pour accompagner l'accélération des cadences. Tout au long du XIXe siècle, aux quatre coins du territoire, les gueules noires dans les mines, les visages burinés dans les usines et les corps fatigués des manufactures s'échinent. Une nouvelle donne sociale et économique qui engendre bientôt une nouvelle classe, qui ne tarde pas à se politiser, celle des ouvriers. Comme le souligne l'historienne Marion Fontaine, spécialiste de l'histoire politique et sociale et de l'histoire des mouvements ouvriers, la classe ouvrière est le fruit d'une gestation longue[4]. Dès le premier tiers du XIXe siècle, le socialisme s'affirme ainsi comme « une pensée du monde industriel, de la rupture des liens qu'il engendre, des injustices et des désordres qu'il entraîne ».

L'industrie comme champ de bataille de la modernité

Les rudes conditions de travail choquent et inquiètent. Bien avant le Germinal de Zola, des penseurs comme Saint-Simon et Fourier en France compatissent déjà à l'injustice subie par les ouvriers, par les artisans des villes, par les tisserands et les forgerons des campagnes. « Peu à peu, reprend Fontaine, le monde ouvrier, fruit de la circulation des idées niveleuses et radicales empruntées pour une partie d'entre elles à la dynamique révolutionnaire du XVIIIe siècle se développe. Dépeints comme des victimes, plus souvent comme des dangers, voire comme des barbares, les ouvriers font entendre peu à peu leur voix dans l'espace public. Une nouvelle génération de penseurs socialistes, en France Buchez, Louis Blanc et surtout Proudhon, qui est un ouvrier autodidacte, cherchent à accrocher leur vision du monde social aux mouvements de plus en plus tangibles du monde ouvrier (coalitions, mutuelles, coopératives, ligues et associations) et à un projet proprement politique : la mise en avant du droit au travail, au cours de la révolution de 1848, en est une illustration. » On comprend dès lors que l'industrialisation du pays a fait surgir plus qu'une manne économique et la perspective de progrès et de confort. Elle a également enfanté une contestation politique et toute une culture qui constituera, pour les générations à venir, le clivage gauche-droite constitutif de la vie politique française. C'est d'autant plus vrai qu'en opposant bourgeois et prolétaires, capitalistes et communistes, Karl Marx et son compère Friedrich Engels, entendent créer de l'unité là où il n'y avait jadis que des destins isolés. Lorsque retentit en 1848 le slogan « Prolétaires de tous les pays, unissez-vous ! », l'ouvrier devient un véritable acteur politique et l'industrie le champ de bataille de la modernité. Même si l'usine est souvent assimilée au bagne et que la lutte s'organise, l'industrialisation se mène tambour battant. La découverte puis la maîtrise de l'électricité va démultiplier les possibilités, le perfectionnement de l'automobile à compter de 1890 et plus encore dans la première moitié du XXe siècle, va ouvrir le champ des possibles. Le taylorisme qui se met alors en place permet l'essor d'une industrie à la française et des marques comme Citroën, Peugeot, Delahaye, Delage, Talbot et Renault produiront, pour toutes les bourses, quelque 254 000 véhicules pour l'année 1929. C'est la belle époque de l'industrie, tristement interrompue par la montée des périls et la survenue de la Seconde Guerre mondiale. Un conflit dont la France ressort victorieuse mais à bout de souffle et pour partie détruite. Comment s'en relever ? La question obsède les autorités qui vont tout faire pour rebâtir le secteur industriel. « À la fin de la Seconde Guerre mondiale, la France fait face à un besoin urgent de reconstruire et de moderniser une industrie en ruine, analyse Victor Delage. Les trois décennies qui suivent sont la parfaite illustration d'une politique industrielle volontariste de l'État combinant vision à long terme et détermination sans faille dans l'action, en s'appuyant sur la mise en œuvre rapide de technologies innovantes et l'exploration de nouvelles pistes. Au cours de cette période, l'industrie française se développe dans plusieurs secteurs clés tels que l'automobile, l'aéronautique, la construction navale, la chimie et l'électronique. Comme le montre une récente étude de Jean-Paul Bouttes, intitulée Souveraineté, maîtrise industrielle et transition énergétique (Fondation pour l'innovation politique, mars 2023), les conditions qui permettent le déploiement du programme nucléaire français rendent compte de l'existence d'un modèle spécifique. Dès le début des années 1960, l'État prend la décision de se tourner vers un programme nucléaire civil. Cette transformation a permis d'aboutir à un mix électrique décarboné à 90 % (75 % nucléaire, 15 % hydraulique), à des prix de l'électricité parmi les plus bas du continent, à des coûts d'investissement deux fois moins élevés qu'aux États-Unis au même moment. »

De la désindustrialisation au retour des usines modernes

Les Trente Glorieuses permettent à l'industrie française d'afficher une vitalité sans précédent. En termes de PIB, elle compte pour 41 % en 1973. Plus encore, entre 1952 à 1972, on estime le taux de croissance annuel de l'économie à 5,5 % en moyenne, 6 % pour l'industrie. Ces chiffres racontent bien l'abondance de bien permis par la hausse des volumes de production et plus globalement la « société de consommation » dans laquelle est entrée la France après les années de disette de l'après-guerre. Mais à l'issue des Trente Glorieuse, c'est bien le spectre de la crise qui resurgit et qui va frapper fort une industrie qui ne s'attendait pas à un tel choc. À l'issue de l'année 1973 et du choc pétrolier consécutif à la guerre du Kippour, la dégringolade est sévère : en un an, la production industrielle recule de 12 %. Dans les dix ans, ce seront plus d'un million d'emplois industriels qui auront disparu... À l'âge d'or succède ainsi celui de la désindustrialisation, des cruelles fermetures d'usine et des licenciements. C'est l'époque où le secteur tertiaire, encouragé par le pouvoir politique, supplante le secteur industriel perçu comme un monde fini. Les conséquences sont lourdes. Dans le Nord ou encore l'Est de l'Hexagone, régions les plus sinistrées, le chômage grimpe et des pans entiers de la population sombrent dans une pauvreté que les prestations et autres aides sociales ne parviennent pas à enrayer. Pour raconter cette période sombre, Nicolas Dufourcq[5], directeur général de la Banque Publique d'Investissement (BPI) n'hésite pas à parler de « drame » et fait de la désindustrialisation de la France un « moment majeur de l'histoire », si ce n'est « un bouleversement comparable dans ses conséquences à l'exode rural des années 1960 ». Une séquence qui va durer, s'aggraver même... « Entre 1995 et 2015, le pays s'est vidé de près de la moitié de ses usines et du tiers de son emploi industriel. Des quantités de communes et de vallées industrielles ont été rayées de la carte. D'innombrables savoir-faire ont disparu, les filières se sont désagrégées, la société tout entière s'est détournée de l'industrie, synonyme de défaite. » L'État fait alors mine d'agir mais détourne le plus souvent les yeux. Il faudrait tout changer pour inverser la tendance et l'on rejette souvent la faute sur l'Europe, sur l'Allemagne, sur le Japon, puis sur la Chine. Investir dans le secteur s'avère également compliqué : les coûts salariaux sont jugés abusifs, la compétitivité mauvaise, le Code du travail trop rigide, la méfiance envers les entrepreneurs omniprésente, le climat social défavorable et le soutien du politique trop évanescent... Le résultat est connu et aboutit à la fermeture des usines et aux cruelles délocalisations vers des pays qui promettent mieux, plus rapide et toujours moins cher. Jusqu'à la prise de conscience ! À partir du quinquennat de François Hollande, le mouvement de réindustrialisation s'amorce. Un mouvement qui va s'amplifier sous le double mandat d'Emmanuel Macron. Entre-temps, un changement d'état d'esprit qui s'accompagne également d'un changement des usages : plus que jamais le consommateur est un citoyen qui souhaite acheter une production locale, à la fois plus écologique et profitant à son écosystème social. D'abord discrète, la vague de réindustrialisation, bien aidée par un retour en grâce de l'idée de souveraineté, retrouve une certaine vigueur grâce aux multiples dispositifs de soutien mis en place par l'État et l'Union Européenne. On relocalise donc, on refonde un appareil productif tricolore, on se met même à ouvrir des usines ambitieuses pour permettre la production des machines de demain. Pour Nicolas Dufourcq, pas de doute : « Le défi est en train d'être relevé ». Et avec un peu d'imagination, l'avenir pourrait être synonyme de nouveau départ pour le secteur dans son ensemble : « L'industrie française repart avec des "balles neuves" et elle a toutes ses chances [...] Ce qui démarre, assure le DG de la BPI, peut être une métamorphose ! »

[1] https://quatrecylindres.com/2021/01/15/il-y-a-vingt-ans-toyota-sinstallait-a-valenciennes-pour-y-fabriquer-la-yaris/

[2] France Culture, « La Grande Table Idées », mai 2017.

[3] Entretien mené avec l'auteur.

[4] Entretien mené avec l'auteure.

[5] Nicolas Dufourcq, La désindustrialisation de la France (1995-2015), éd. Odile Jacob, 2022.

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T16

Commentaires 2
à écrit le 24/09/2023 à 10:22
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L'industrie aujourd'hui ce n'est plus des centaines d'ouvriers spécialisés ( os ) sur des chaines de montage mais des robots, automates programmables, machines outil à commandes numériques et sur les chaines des "opérateurs de ligne" !!! reste à att...

le 24/09/2023 à 15:53
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"L'industrie aujourd'hui ce n'est plus des centaines d'ouvriers spécialisés ( os )" C'est encore le cas pour les Dacia, les bas salaires n'incitant guère à moderniser l'outil de production...

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