Baisse de l'inflation en Turquie : vers la fin d'une politique à rebours de toutes les théories économiques ?

Après avoir dépassé les 85% à l'automne dernier, l'inflation est repassée sous la barre des 40% en mai en Turquie, une première en seize mois. Une baisse qui s'explique par un « effet de base », et par la gratuité du gaz pour les ménages instaurée par le président réélu le 28 mai dernier pour un troisième mandat. Ce dernier devrait d'ailleurs être marqué par un changement dans la politique économique du pays, marquée par des taux d'intérêt bas, entraînant une flambée de l'inflation et une dévaluation de la monnaie nationale.
Erdogan a nommé un nouveau ministre de l'Economie, Mehmet Simsek, qui aura pour mission d'endiguer l'inflation et de ramener la confiance des investisseurs.
Erdogan a nommé un nouveau ministre de l'Economie, Mehmet Simsek, qui aura pour mission d'endiguer l'inflation et de ramener la confiance des investisseurs. (Crédits : VIOLETA SANTOS MOURA)

Un peu de répit sur le front de l'inflation. Alors que cette dernière avait dépassé les 85% à l'automne dernier en Turquie, elle ralentit progressivement depuis le mois de novembre. En mai, elle est même repassée sous la barre des 40%, une première en seize mois. La hausse des prix à la consommation s'est, ainsi, élevée à 39,6% sur un an et est quasi stable à +0,04% sur un mois, a indiqué l'institut statistique turc (Tuik) ce lundi 5 juin.

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Une baisse qui est à attribuer d'une part à un « effet de base ». En effet, les prix ont continué à augmenter mois après mois, mais moins fortement qu'un an plus tôt. D'autant que ces chiffres officiels sont contestés par les économistes indépendants du Groupe de recherche sur l'inflation (Enag). Selon eux, l'inflation annuelle s'établit entre 105% et 109%, en prenant en compte ou non la gratuité du gaz.

D'autre part, la baisse de l'inflation est due à l'une des mesures de campagne de Recep Tayyip Erdogan réélu le 28 mai dernier pour un troisième mandat. Le président turc avait, en effet, annoncé la gratuité du gaz pour les ménages en mai, qui continueront de bénéficier de 25 mètres cubes de gaz gratuits par mois jusqu'en mai 2024.

Des « mesures rationnelles » pour redresser l'économie

Dans la foulée de son élection, le chef de l'Etat a nommé un nouveau ministre de l'Economie, Mehmet Simsek, qui aura pour mission d'endiguer l'inflation et de renouer la confiance avec les investisseurs. Déjà ministre des Finances (2009-2015), puis vice-Premier ministre chargé de l'Economie (jusqu'en 2018), cet ancien économiste de la banque américaine Merrill Lynch, cherchera à rétablir une politique économique orthodoxe. Lors de sa prise de fonction, Mehmet Simsek a d'ailleurs déjà averti qu'il faudrait revenir à des « mesures rationnelles » pour redresser l'économie.

Ces mesures pourraient consister en un relèvement des taux directeurs de la banque centrale turque, à l'instar du resserrement monétaire opéré par de nombreuses banques centrales - européenne et américaine notamment - pour lutter contre l'inflation même au détriment de la croissance du pays. À l'inverse, Erdogan n'a eu de cesse d'imposer à la banque centrale turque de les abaisser. L'an dernier, ils sont ainsi passés de 19% en septembre 2021 à 14% en décembre. Restés stables entre janvier et juillet 2022, ils ont à nouveau été abaissés par la banque centrale chaque mois depuis août. Le principal taux turc a notamment été ramené à 9% en novembre, contre 10,5% précédemment. Ce choix de politique monétaire hétérodoxe a également contribué à faire chuter la livre turque de 31,91% depuis le 1er janvier 2022, sachant que la devise avait déjà dévissé de 44% en 2021.

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Le chef de l'Etat n'a, pourtant, pas hésité à défendre sa politique, à rebours des théories économiques classiques, pendant sa campagne. Erdogan estime, en effet, que les taux d'intérêt élevés favorisent l'inflation. Mais pour compenser les effets de l'inflation galopante qui a largement amputé le pouvoir d'achat de la population turque, il a annoncé plusieurs mesures destinées à renforcer ce dernier, notamment le relèvement du salaire minimum le 1er janvier dernier. Il a ainsi été revalorisé à 8.500 livres turques net (environ 455 euros), pour la troisième fois en un an. Plus de 40% des Turcs vivent avec le salaire minimum.

Reconstruction après le double séisme meurtrier

Autre chantier prioritaire pour Erdogan durant son troisième mandat : la reconstruction des zones touchées par le double séisme survenu le 6 février dans le sud-est du pays et qui a causé la mort d'au moins 50.000 personnes et fait plus de trois millions de déplacés. Le président Erdogan a promis de reconstruire au plus vite 650.000 logements dans les provinces affectées. Selon le chef de l'Etat et l'ONU, le coût total des dégâts du désastre s'élève à plus de 100 milliards de dollars.

(Avec AFP)

Commentaires 5
à écrit le 07/06/2023 à 7:11
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Bonjour, n'importe comment les votes ons parler.... mr le president est en place , l'economie devra s'adapter a volonté du president... Et le peuple turque devra profiter de la prospérité economique future... Pour le reste ce n'est plus notre pro...

à écrit le 05/06/2023 à 23:11
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"Erdogan estime, en effet, que les taux d'intérêt élevés favorisent l'inflation." Qu'est-ce qu'il ne faut pas entendre, plus c'est gros, plus ça passe. Même s'il a la flemme d'ouvrir un manuel d'économie, voir une inflation à + de 100% devrait lui...

à écrit le 05/06/2023 à 14:13
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Au regard de la chute de la livre Turque depuis 5 ans qui s'approche du zero (0,047 pour 1 Euro)! la Turquie ne se prépare pas à des jours heureux .

à écrit le 05/06/2023 à 12:50
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Aucune larme pour les Turcs, ils ont voté !!!!!!!!!! La priorité, les voir hors de l'Europe !!!!!

le 05/06/2023 à 20:20
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Ouiaip, qu'ils aillent avec POUTINE et les chinois. Dehors, dehors !!! Dieu a bien viré Adam et Eve.

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