Contrainte par l'inflation, la Banque d'Angleterre remonte ses taux à 5%, un record depuis 2008

Au Royaume-Uni, l'inflation peine à diminuer. En mai, la hausse des prix se situait toujours au niveau d'avril, à 8,7% sur un an. Face à ce constat, la Banque d'Angleterre a annoncé ce jeudi un nouveau relèvement de ses taux de 0,5 point de pourcentage qui pourraient grimper jusqu'à 6% d'ici la fin de l'année. Un resserrement monétaire qui n'est pas sans conséquence sur l'économie britannique qui voit le coût de l'emprunt s'envoler.
L'inflation s'est maintenue en mai au Royaume-Uni à son niveau d'avril : 8,7% sur un an.
L'inflation s'est maintenue en mai au Royaume-Uni à son niveau d'avril : 8,7% sur un an. (Crédits : Reuters)

[Article publié le 22 juin 2023 à 08h56 et mis à jour à 14H43] Alors que la hausse des taux semble ralentir aux Etats-Unis, où la Réserve fédérale américaine (Fed) a renoncé à relever une nouvelle fois des taux du fait d'un ralentissement de l'inflation, au Royaume-Uni elle est bel et bien toujours d'actualité. Et pour cause, l'inflation s'y est maintenue en mai à 8,7% sur un an, comme en avril, soit le niveau le plus élevé des pays du G7.

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En conséquence, la Banque d'Angleterre a procédé ce jeudi à un nouveau relèvement de ses taux, le 13e consécutif et le premier de 0,5 point de pourcentage depuis février. Au total, les taux de la BoE atteignent donc 5%, un sommet depuis octobre 2008 et la grande crise financière.

Une inflation qui recule moins vite que prévu

« L'inflation mesurée par l'indice des prix à la consommation (CPI) est de plus en plus alimentée par des facteurs nationaux », s'est inquiété le gouverneur de la BoE Andrew Bailey dans une lettre au ministre des Finances, correspondance obligatoire quand l'inflation dépasse l'objectif de 2% de la BoE.« Les données récentes montrent que l'inflation est plus persistante que prévu, avec un marché du travail tendu et une demande qui résiste », explique le comité de politique monétaire (MPC) dans son communiqué.

Andrew Bailey, a, en effet, reconnu à plusieurs reprises que l'inflation reculait moins vite que ses économistes ne l'espéraient. En particulier l'inflation sous-jacente qui exclut l'énergie, l'alimentaire, l'alcool et le tabac, et qui a atteint 7,1% sur un an en mai, soit un sommet depuis mars 1992. Or, même si les effets de la flambée des prix de l'électricité et des carburants en 2022, après l'invasion russe de l'Ukraine, commencent à s'estomper, c'est bien l'inflation sous-jacente que les banques centrales tentent de juguler, pour éviter un cercle vicieux de hausse des prix et des salaires.

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Vers des taux à 6% ?

De quoi laisser présager de nouvelles hausses de taux ? « Quelle que soit la décision [qui sera prise jeudi], le MPC (comité de politique monétaire de la BoE) a encore beaucoup de travail à faire pour ramener l'inflation sous-jacente sous contrôle », a estimé, en effet, Matthew Swannell, analyste à BNP Paribas, dans une note. Sur le marché, les investisseurs anticipent que les taux britanniques remonteront jusqu'à 6% d'ici la fin de l'année, alors qu'ils estiment que la Fed ne va pas remonter les siens et que ceux de la Banque centrale européenne (BCE) vont bientôt atteindre leur sommet. Si le 15 juin dernier, sa présidente, Christine Lagarde a annoncé un nouveau relèvement de ses taux, son ampleur était limitée à 25 points de base. De son côté, la BoE s'est contentée, comme lors de ses dernières réunions, de prévenir que « s'il y avait plus de preuves de persistance des pressions [inflationnistes, ndlr], plus de resserrement de la politique monétaire serait nécessaire ».

Envol du coût de l'emprunt

Les hausses des taux de la Banque d'Angleterre commencent, néanmoins, à avoir des effets néfastes sur l'économie britannique. À commencer par le rendement des emprunts d'Etat à deux ans qui est monté lundi dernier à plus de 5%. Un sommet depuis 15 ans, preuve que le marché s'attend à ce que l'inflation persistante force la Banque d'Angleterre (BoE) à de nouveaux tours de vis. En outre, l'envol du coût de l'emprunt au Royaume-Uni pèse sur les finances du gouvernement. Il fait aussi monter les taux des crédits pour les entreprises et les particuliers, dont de nombreux crédits immobiliers à taux variable. Dans un marché britannique dominé par des emprunts de particuliers aux taux renégociés tous les deux à cinq ans, de nombreux propriétaires vont donc voir leurs versements mensuels s'envoler cette année.

Or, selon des analystes de Berenberg, « alors que l'économie britannique stagne presque depuis le printemps dernier, il faut s'attendre à ce que l'inflation des services et l'inflation sous-jacente » commencent bientôt à reculer. Selon eux, la BoE prend donc le risque d'aller trop loin dans le relèvement des taux. Deux membres sur neuf du MPC ont d'ailleurs voté contre une hausse des taux, jugeant plus opportun de les laisser inchangés. « Le délai pour que la politique monétaire prenne effet signifie que les effets les plus importants des hausses passées n'ont pas encore été actés », s'inquiètent ces deux membres dans les minutes.

Un avis que ne semble pas partager le gouvernement britannique :  « Notre détermination à (faire baisser l'inflation) est inébranlable car c'est le seul moyen à long terme de soulager la pression » qui pèse sur les Britanniques, a réagi ce jeudi le ministre des Finances Jeremy Hunt. « Si nous n'agissons pas maintenant, ce sera pire plus tard ».

La Norvège et la Suisse remontent leurs taux

Deux autres grandes banques centrales se réunissaient ce jeudi aboutissant pour la banque de Norvège à la onzième hausse de ses taux depuis septembre 2021. Comme la BoE, elle espère ainsi endiguer une inflation toujours élevée en relevant de 0,5 point son taux directeur, à 3,75%, tout en laissant entrevoir un nouveau tour de vis en août.

De même, la banque centrale suisse a relevé, ce jeudi, son taux directeur de 25 points de base pour le porter à 1,75%, malgré la récente décélération de l'inflation. « Au cours des derniers mois, l'inflation a sensiblement ralenti », a reconnu la BNS. Pourtant, l'institution a laissé la porte ouverte à de futures hausses de taux. Elle observe cependant que « la pression inflationniste s'est de nouveau accentuée à moyen terme ».

(Avec AFP)

Commentaire 1
à écrit le 22/06/2023 à 12:24
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Et oui, faire la guerre et l'entretenir ca coute un poignon de dingue. Aucune economie n'echappe a ce constat, meme les usa commencent a reguimber. L' Angleterre, n'a pas les moyens, elle s'enfonce, tout comme l'europe qui refuse la realite. Tant pi...

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