Inflation : l'ordonnance de la Banque de France à Macron

Face à l'envolée des prix, le gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau exhorte le gouvernement à mettre fin aux baisses d'impôt non financées et à couper le robinet des aides du « quoi qu'il en coûte ». Le banquier central a également déroulé un programme de réformes dans l'énergie, le numérique, le travail et les services publics.
Grégoire Normand
Le gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau.
Le gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau. (Crédits : Reuters)

L'économie française est encore plongée dans un épais brouillard. Plus d'un an après l'éclatement du conflit en Ukraine, les indicateurs macroéconomiques sont loin d'être tous passés au vert. La croissance tricolore du produit intérieur brut (PIB) continue d'accélérer modestement de 0,1% au premier trimestre et 0,2% au second trimestre selon la dernière note de conjoncture de l'Insee. En zone euro, les moteurs économiques dans les grandes puissances tournent à faible régime.

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L'envolée des prix a mis sous pression les ménages et les entreprises dans de nombreux Etats européens déjà secoués par les longues années de pandémie. « La dynamique de l'inflation est au coeur de notre scénario car elle est le reflet de la hausse des prix de l'énergie et de l'alimentaire et du resserrement des politiques monétaires », a déclaré l'économiste de l'Observatoire français des conjonctures économiques (OFCE), Christophe Blot, lors d'une récente réunion avec les journalistes. Dans ce contexte tendu, le gouverneur de la Banque de France, François Villeroy de Galhau, a adressé sa traditionnelle lettre au président de la République Emmanuel Macron ce lundi 24 avril sur le thème « Comment la France et l'Europe vont vaincre l'inflation »Il s'agit d'une tradition républicaine depuis 1945. Elle est également adressée à la présidence de l'Assemblée nationale et au Sénat. Dans son intervention, le banquier central a déroulé une liste de remèdes face à l'inflation considérée comme « une maladie économique et sociale ».

Une inflation à 4% fin 2023

L'inflation en France et en Europe « a changé de nature ». « Cela a commencé par un choc d'offre puis cela s'est poursuivi par le choc provoqué par la guerre. Cette inflation s'est diffusée aux prix des services et l'ensemble des autres biens », a déclaré François Villeroy de Galhau lors d'un point presse.

Pour rappel, l'indice des prix à la consommation a culminé à 5,7% en mars et à 6,7% pour l'indice harmonisé en zone euro. Il a pointé les risques « d'une inflation persistante ». Les prix des biens et services, qui composent l'inflation sous-jacente, représentent près de 70% du panier de consommation en France.

A l'opposé, les prix de l'énergie et de l'alimentaire pèsent 30% du panier moyen. Les économistes de la Banque de France tablent sur un pic d'inflation au premier semestre et une inflation à 4% d'ici à fin 2023. « Elle reculerait plus fortement en 2024 autour de 2,5% et autour de 2% en 2025. Le délai de transmission de la politique monétaire est d'environ deux ans », a ajouté François Villeroy de Galhau.

Mettre fin aux baisses d'impôt non financées

Emmanuel Macron a mis l'accent sur la baisse des impôts dans sa politique économique depuis son premier mandat. Entre la suppression de l'impôt sur la fortune et sa transformation en impôt sur la fortune immobilière (IFI), la baisse de l'impôt sur les sociétés (de 33% à 25%) et des impôts de production, la fin de la taxe d'habitation, de la redevance sur l'audiovisuel, le chef de l'Etat a multiplié les gestes envers les entreprises et les ménages.

Mais ces choix parfois non financés ont des répercussions sur les finances publiques. Il s'agit de « stabiliser la fiscalité en arrêtant les baisses d'impôt non financées. La stabilité fiscale donne de la visibilité aux acteurs économiques, c'est-à-dire les entreprises et les ménages », a déclaré François Villeroy de Galhau.

Cette recommandation risque de faire grincer des dents à Bercy. La semaine dernière, les ministres de l'Economie et des Comptes publics, Bruno Le Maire et Gabriel Attal ont réaffirmé, lors de la présentation du programme de stabilité envoyé à Bruxelles pour période 2023-2027, leur volonté de poursuivre la baisse des impôts jusqu'à la fin du quinquennat.

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En revanche, Bercy a annoncé qu'il voulait continuer de fermer le robinet des aides du « quoi qu'il en coûte » pour « accélérer le désendettement de la France ». Ce qui devrait satisfaire le gouverneur de la Banque de France. Ce dernier soutient que « la réponse à l'inflation est plus monétaire que budgétaire. L'outil budgétaire a des limites dans le temps. Toujours et partout, l'arme des taux d'intérêt a toujours été efficace pour lutter contre l'inflation sous-jacente ». La Banque de France estime que le resserrement de la politique monétaire de la BCE ne provoquera pas de « récession » en zone euro.

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Un programme de réformes structurelles sur l'énergie, le numérique, les services publics et le travail

Lors du point presse, le gouverneur de la Banque de France a exhorté le gouvernement à prolonger « des réformes structurelles ». Parmi les leviers évoqués par la Banque centrale tricolore figure en premier lieu la transformation énergétique et climatique « afin de réduire notre dépendance ». L'ancien directeur général de BNP Paribas a aussi évoqué la transformation numérique de l'économie. Il a également pointé la crise des services publics, « pas toujours imputable à un manque de moyens »« Il y a un enjeu de management public (autonomie des managers, recrutement des agents publics). Il y a aussi un enjeu de qualité et d'efficacité des dépenses », a asséné François Villeroy de Galhau.

S'agissant du travail, la France souffre encore « d'une double peine »« Beaucoup d'entreprises ont des difficultés à recruter alors qu'on est encore loin du plein emploi ».  Les problèmes d'emploi se concentrent « aux deux bouts du spectre démographique ». Il faut « augmenter l'emploi des jeunes et des seniors (succès de l'apprentissage), mener la bataille des compétences (éducation nationale, améliorations de l'offre de formation professionnelle), et renforcer l'attractivité du travail (télétravail, autonomie, sens et mobilité) », considère François Villeroy de Galhau. En plein débat sur la loi travail actuellement en préparation au gouvernement, la Banque de France espère être entendue après les longs mois de crise sociale sur la réforme des retraites.

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Grégoire Normand
Commentaires 8
à écrit le 25/04/2023 à 9:51
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que fait la cours des comptes ,,,,,, LE FMI toutes ces personnes nommées par MR MACRON

à écrit le 25/04/2023 à 8:22
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Pompiers pyromanes ! Rappelez nous qui a ouvert en grand le robinet de l'argent gratuit qui vient de nulle part? Qui a dit quoi qu'il en coute en premier ? Ils ont fait tout ce qu'on a appris qu'il ne fallait pas faire et maintenant donnent des le...

le 25/04/2023 à 13:10
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Les francais ils ont bien profites en refusent les reformes necessaires.

à écrit le 25/04/2023 à 7:14
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Cherche gouvernement du centre de gauche de droite capable d appliquer ce programme de bon sens Depuis 40 ans. Attendons la prise en main de nos finances par la BCE et le FMI

à écrit le 25/04/2023 à 7:04
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M le gouverneur de la Banque de France François Villeroy de Galhau allez vous respecté le principe du Livret A en alignant son taux de rémunération sur celui de l'(inflation?

à écrit le 25/04/2023 à 5:31
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Le "quoi qu'il en coûte" était une immense ânerie qui a été instaurée sous le prétexte fallacieux de la Covid-19, en plus, il a fait croire aux français que l'argent était gratuit. Bonne chance, maintenant, pour revenir à la réalité économique, on le...

à écrit le 24/04/2023 à 22:14
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Déchiffrons en bon français. Nos finances publiques dérapent et sont entre les mains d'irresponsables qui dépensent sont compter et accordent des cadeaux sans contreparties. En seront-ils un jour comptables devant la nation ?

le 25/04/2023 à 1:54
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La reponse est non.

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