G20 : le chef de l'ONU déplore une famille mondiale « dysfonctionnelle »

A la veille du sommet du G20, le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, tire la sonnette d'alarme, estimant que le monde court le risque de conflits, alors que les divisions entre Etats se multiplient.
De profonds désaccords sur la guerre menée par la Russie en Ukraine, l'abandon progressif des combustibles fossiles et la restructuration de la dette, au menu de ce sommet de deux jours, rendront de facto difficile une déclaration finale dimanche.
De profonds désaccords sur la guerre menée par la Russie en Ukraine, l'abandon progressif des combustibles fossiles et la restructuration de la dette, au menu de ce sommet de deux jours, rendront de facto difficile une déclaration finale dimanche. (Crédits : RALPH TEDY EROL)

Les discussions au sommet du G20 seront-elles vaines ? Les dirigeants du groupe - qui rassemble 19 pays, ainsi que l'Union européenne, représentant 85% de l'économie et les deux tiers de la population mondiale - sont plus déchirés que jamais, au point que les présidents chinois et russe ont décidé de snober la réunion. La famille mondiale est « dysfonctionnelle », a affirmé sans détour le secrétaire général des Nations unies, Antonio Guterres, ce vendredi 8 septembre, à la veille du sommet du G20.

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 « Si nous sommes effectivement une famille mondiale, nous ressemblons aujourd'hui à (une famille) plutôt dysfonctionnelle, a déclaré Antonio Guterres à des journalistes à New Delhi. Les divisions s'accroissent, les tensions explosent et la confiance s'érode - ce qui, (mis) ensemble, fait planer le spectre de la fragmentation et, à terme, de la confrontation. »

Divergences sur le conflit en Ukraine

De profonds désaccords sur la guerre menée par la Russie en Ukraine, l'abandon progressif des combustibles fossiles et la restructuration de la dette, au menu de ce sommet de deux jours, rendront de facto difficile une déclaration finale dimanche.

« Cette fracturation serait profondément inquiétante dans la meilleure des époques. Mais à notre époque, c'est une catastrophe, a ajouté le chef de l'ONU. Notre monde se trouve dans un moment difficile de transition. L'avenir est multipolaire, mais nos institutions multilatérales reflètent une époque révolue. »

Le G20 apparaît divisé sur l'invasion de l'Ukraine par la Russie, de nombreux pays en développement étant plus préoccupés par les prix des céréales que par les condamnations diplomatiques de l'attitude de Moscou. A cet égard, Charles Michel, président du Conseil européen, a déclaré à la presse vendredi à New Delhi, qu'il était « franchement scandaleux que la Russie, après avoir mis fin à l'initiative céréalière de la mer Noire, bloque et attaque les ports maritimes ukrainiens ».

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Pas d'avancées sur le climat

La question climatique promet également de révéler, une fois de plus, les divisions au sein du groupe. Dans les faits, trois questions clés sont sur la table à New Delhi : le triplement des capacités mondiales en matière d'énergies renouvelables, la réduction progressive de l'utilisation des combustibles fossiles comme le charbon, mais aussi le financement de la transition verte dans les pays en développement.

En juillet, les ministres de l'Energie des pays du G20 n'avaient cependant ni fourni de feuille de route pour réduire les émissions, ni même mentionné dans leur déclaration finale le charbon, pourtant l'un des gros contributeurs au réchauffement climatique.

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Le sommet du G20 est pourtant particulièrement crucial pour espérer réaliser de véritables avancées. La pollution par habitant liée au charbon a d'ailleurs augmenté de 9% dans les pays du G20 depuis 2015, selon un rapport publié cette semaine, notamment du fait de l'Inde, de l'Indonésie ou encore de la Chine.

Le financement de la transition énergétique pourrait constituer un autre point d'achoppement. Le Premier ministre indien Narendra Modi, qui présente son pays comme le leader du « Sud global », a souligné en amont du sommet que les ambitions en matière climatique « doivent s'accompagner d'actions en matière de financement du climat et de transfert de technologies ».

Les pays riches n'ont pas tenu leur promesse de verser 100 milliards de dollars par an d'ici 2020 aux pays pauvres pour les aider à lutter contre le changement climatique. Les Etats africains ont par ailleurs appelé cette semaine à une restructuration et un allègement de la dette, ainsi qu'à la mise en œuvre rapide d'un fonds pour compenser les « pertes et dommages » des nations du Sud vulnérables face au changement climatique, pour lequel un accord de principe a été trouvé à la COP27 mais dont les modalités de fonctionnement restent à décider.

Biden présent, Poutine et Xi Jinping snobent le G20

Le G20 sera aussi révélateur des tensions persistantes entre certains pays, à l'image de la Chine et des Etats-Unis. Ces derniers, eux, resserrent leurs liens avec l'Inde. Objectif, tenir tête à la Chine, New Delhi cherchant de son côté à asseoir un rôle international de premier plan. Et ce, malgré leurs différends sur la Russie, l'Inde n'ayant pas adhéré aux sanctions contre Moscou après l'invasion de l'Ukraine, ou le respect des droits humains. En l'absence de ses homologues chinois Xi Jinping et russe Vladimir Poutine, le déplacement du président américain intervient à un moment clé dans le jeu des alliances, tandis que la Chine accroît son influence et conteste de plus en plus la superpuissance américaine.

Les Etats-Unis « surveillent de près » les défis que rencontre la Chine, que ce soit la consommation moins vigoureuse que prévu, les problèmes d'endettement dans le secteur immobilier ou les défis démographiques, a déclaré à la presse la secrétaire au Trésor, Janet Yellen, ce vendredi à Delhi.

« Nous sommes conscients des risques qui pèsent sur la croissance mondiale », a-t-elle confessé, en soulignant que « l'influence négative la plus importante vient de la guerre de la Russie contre l'Ukraine ». Elle s'est toutefois dite « surprise de la force de la croissance mondiale et de la résilience de l'économie mondiale. »

Signaux positifs sur une intégration de l'Union africaine

L'Union africaine (UA) semble bien partie pour devenir membre permanent du G20, ont laissé entendre plusieurs responsables vendredi. Le Premier ministre indien Narendra Modi a affiché ces derniers jours sa volonté d'élargir ce groupe avec « l'inclusion de l'Union africaine en tant que membre permanent ». Un haut responsable du ministère indien des Affaires étrangères, Vinay Kwatra, a dit s'attendre à une décision samedi matin au sommet.

Il est toutefois toujours possible qu'un membre du G20 mette son veto. Le président de l'archipel des Comores, Azali Assoumani, qui est actuellement à la tête de l'Union africaine, a atterri vendredi à New Delhi et doit participer aux discussions du week-end. L'Union européenne, qui dispose d'un siège au G20, a affiché son soutien à l'initiative vendredi.

« Je me réjouis d'accueillir l'Union africaine en tant que membre permanent du G20, a déclaré le président du Conseil européen Charles Michel à des journalistes à New Delhi. Attendons de voir quelle sera la décision. Mais une chose est claire: l'UE soutient l'adhésion de l'Afrique au G20. »

En décembre, le président américain Joe Biden avait déjà émis le souhait que l'UA rejoigne le G20 en tant que membre permanent. Un position réaffirmée cette semaine par son conseiller à la sécurité nationale, Jake Sullivan, lors d'un briefing sur les priorités américaines au sommet. Seul un pays africain, l'Afrique du Sud, est actuellement membre du G20.

Basée à Addis Abeba, capitale de l'Ethiopie, l'UA compte 55 membres (dont six suspendus), totalisant trois mille milliards de dollars de PIB. L'octroi à l'Union africaine d'un siège permanent au G20 permettrait de « réparer une "injustice », avait encore fait valoir en juillet le président sénégalais Macky Sall. « L'Afrique réunie est à la huitième place mondiale en termes de produit intérieur brut », avait rappelé ce dernier, qui intervenait en visioconférence dans le cadre des Rencontres économiques d'Aix-en-Provence, dans le sud de la France.

(Avec AFP)

Commentaires 4
à écrit le 09/09/2023 à 15:45
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Bonjour, comme cela nous sommes une famille mondiale aux dysfonctionnement importants... Vous savez des que l'ons dois partager, les problèmes arrives. Maintenant, la question est de savoir si nous pouvons nous entendre sans en venir au mains... (...

à écrit le 08/09/2023 à 18:47
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"Elle s'est toutefois dite « surprise de la force de la croissance mondiale et de la résilience de l'économie mondiale. »" Une phrase qui n'exprime rien.

à écrit le 08/09/2023 à 18:37
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"Divergences sur le conflit en Ukraine" Il évoque les propos de Sarkozy ?

à écrit le 08/09/2023 à 17:24
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Comme si Antonio Guterres avait ignoré les prémisses d'un nouvel ordre économique et monétaire mondial. Après les accords de Bretton Woods, l’économiste Robert Triffin portera un regard critique et avisé à l’égard de ce système dans son ouvrage “Gold...

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