Dans un Japon vieillissant et en panne de croissance, sa vision de l'économie était devenue mondialemement connue. Elle avait même donné le nom à une nouvelle approche, privilégiant la relance par l'assouplissement monétaire assumé : les "Abenomics". Shinzo Abe, ancien Premier ministre de l'archipel a succombé à ses blessures ce vendredi 8 juillet, à la suite d'une agression alors qu'il participait à un meeting électoral dans l'ouest du pays.
L'ancien chef de l'exécutif, âgé de 67 ans, prononçait un discours en fin de matinée près d'une gare à Nara lors d'un rassemblement de campagne électorale en vue des élections sénatoriales de dimanche, lorsque des coups de feu ont été entendus, ont indiqué la chaîne nationale NHK et l'agence de presse Kyodo.
M. Abe "prononçait un discours et un homme est arrivé par derrière", a déclaré à NHK une jeune femme présente sur les lieux.
"Le premier tir a fait le bruit d'un jouet. Il n'est pas tombé et il y a eu une grosse détonation. Le deuxième tir était plus visible, on pouvait voir l'étincelle et de la fumée", a-t-elle ajouté.
Selon la chaîne de télévision publique NHK, M. Abe a été emmené à l'hôpital et semblait être en arrêt cardio-respiratoire - un terme utilisé au Japon indiquant l'absence de signe de vie, et précédant généralement un certificat de décès officiel.
Ancien chef du PLD, M. Abe était le Premier ministre japonais à être resté le plus longtemps au pouvoir. Il a été en poste en 2006 pour un an, puis de nouveau de 2012 à 2020, date à laquelle il avait été contraint de démissionner pour des raisons de santé.
Un suspect arrêté
Sur les lieux, un homme d'une quarantaine d'années a été désarmé et arrêté pour tentative de meurtre, selon la NHK, citant des sources policières. Selon plusieurs médias locaux, le suspect serait un Japonais de 41 ans ayant par le passé appartenu à la Force maritime d'autodéfense japonaise, la marine nippone.
Les réactions affluaient du monde entier après l'attaque.
"C'est un moment très, très triste", a déclaré vendredi le secrétaire d'État américain Antony Blinken, ajoutant que les Etats-Unis étaient "profondément tristes et profondément préoccupés" par l'attaque.
"Nos pensées, nos prières sont avec lui, avec sa famille, avec le peuple japonais", a-t-il ajouté.
Le président du Conseil européen Charles Michel s'est dit "choqué et attristé" par l'attaque "lâche" contre M. Abe, qu'il a décrit comme un "véritable ami, farouche défenseur de l'ordre multilatéral et des valeurs démocratiques".
Une législation stricte sur les armes à feu
Le Japon n'a rien connu de tel "depuis plus de 50 à 60 ans", a déclaré à l'AFP Corey Wallace, maître de conférences à l'université de Kanagawa et spécialiste de la politique nippone.
Le pays dispose de l'une des législations les plus strictes au monde en matière de contrôle des armes à feu, et le nombre annuel de décès par ce armes dans ce pays de 125 millions d'habitants est extrêmement faible.
L'obtention d'un permis de port d'arme est un processus long et compliqué, même pour les citoyens japonais, qui doivent d'abord obtenir une recommandation d'une association de tir, puis se soumettre à de stricts contrôles de police.
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(Avec AFP)