La croissance mondiale a dépassé son niveau d'avant crise selon l'OCDE, mais reste inégale

La croissance du produit intérieur brut (PIB) mondial devrait bondir de 5,7% en 2021 et 4,5% en 2022 selon l'OCDE. L'institution a révisé très légèrement à la baisse ses prévisions pour 2021 (-0,1 point) par rapport au printemps. Malgré des avancées dans les campagnes de vaccination, la reprise inégale se confirme entre les pays du G20 et les pays émergents.
Grégoire Normand
(Crédits : Reuters)

La reprise économique mondiale se confirme. Près de 20 mois après l'arrivée du coronavirus sur le sol chinois, l'économie mondiale a retrouvé le chemin de la croissance. D'après la dernière livraison de l'OCDE dévoilée ce mardi 21 septembre, le produit intérieur brut (PIB) devrait accélérer de 5,7% en 2021 et 4,5% en 2022.

L'institution internationale a légèrement révisé à la baisse ses prévisions pour 2021 et à la hausse celles pour 2022 par rapport au mois de mai dernier (5,8% en 2021 et 4,4% en 2022) mais ces variations restent marginales. "Un fort rebond en Europe, la probabilité d'un soutien fiscal supplémentaire aux Etats-Unis l'année prochaine et une consommation de l'épargne pourraient booster les perspectives de croissance dans les économies avancées", indique l'OCDE.

Au-delà de ce rebond important en 2021, il faut rappeler que la propagation de l'onde de choc de la pandémie a plongé l'économie internationale dans une profonde récession en 2020. L'effet de base lié à ce violent plongeon doit être pris en compte dans l'appréciation de la reprise. En outre, les capacités de reprise dans chacun des pays sont loin d'être les mêmes partout sur le globe. Les économistes insistent particulièrement sur le caractère inégal du rebond entre les pays du G20 et les économies émergentes.

Le pic de la reprise est passé

"L'impact économique du variant Delta a été jusqu'à présent relativement modeste dans les pays où les taux de vaccination sont élevés, mais il a pesé sur la dynamique à court terme dans les autres et, au niveau mondial, il a accentué les tensions sur les chaînes d'approvisionnement et les coûts", expliquent les experts.

Il semblerait que le pic de la reprise économique soit déjà passé selon les indices PMI des directeurs d'achats. Ces indicateurs avancés dans les grandes puissances, très observés par les économistes, montrent des signes d'essoufflement.

Concernant l'inflation, ils notent que "la hausse des prix à la consommation dans les pays du G20 devrait revenir de 4,5% à la fin de 2021 à environ 3 ,5%  à la fin de 2022, soit un niveau tout de même supérieur aux taux observés avant la pandémie. Les tensions du côté de l'offre devraient s'atténuer progressivement, la progression des salaires demeure modérée et les anticipations d'inflation restent bien ancrée, mais les risques à court terme sont ceux d'une révision à la hausse de ces projections".

Les Etats-Unis dopent la croissance mondiale en 2021

Après avoir connu une année 2020 catastrophique, les Etats-Unis, ont retrouvé le chemin de la croissance. Les économistes de l'OCDE tablent désormais sur une accélération du produit intérieur brut (PIB) du pays de 6% en 2021 de la première puissance économique mondiale. C'est 0,9 point de moins qu'au printemps dernier. Pour 2022, ils font le pari d'une croissance de 3,9% ; c'est 0,3 point de plus que lors de la précédente édition des perspectives économiques. Si la campagne de vaccination a démarré sur les chapeaux de roue à la fin de l'année 2020, elle connaît de sérieux signes de ralentissement. Face à cet essoufflement, l'administration Biden a décidé de durcir le ton en obligeant une partie des travailleurs fédéraux à se faire vacciner.

Sur le plan économique, l'arrivée de Joe Biden représente un changement de paradigme au pays de l'Oncle Sam. Le président démocrate a annoncé de gigantesques plans de relance destinés à verdir l'économie, soutenir la demande des ménages américains et relancer l'investissement dans les infrastructures. Il compte financer ces dépenses par une hausse de la fiscalité sur les plus fortunés et les grandes entreprises multinationales.

Même s'il a révisé ses ambitions à la baisse, son gouvernement reste confronté à de fortes oppositions au Congrès et le marché du travail n'a pas retrouvé son niveau d'avant-crise après des destructions de postes colossales en 2020. Sur le plan monétaire, le gouvernement peut s'appuyer sur un changement de doctrine de la réserve fédérale (FED). En effet, l'institution monétaire a révisé son objectif d'inflation fixé auparavant à 2% pour le porter à "2% en moyenne au cours du temps". Ce qui signifie que cette cible peut être dépassée de manière temporaire.

Pour l'administration Biden, ce changement de politique monétaire plus accommodante va permettre au plan de relance de se déployer "sans être contrecarré par un resserrement prématuré des conditions financières", rappelle l'économiste et directeur du CEPII, Sébastien Jean, dans le dernier ouvrage "L'économie mondiale en 2022" (Editions La Découverte). Reste toutefois le risque d'un "shutdown"
lié au plafond de la dette américaine qui a été atteint. Sans vote au Congrès pour le relever, le pays serait alors à court de liquider mi-octobre. Les Etats-Unis pourraient ainsi faire face à "une crise financière historique", a estimé dimanche la secrétaire américaine au Trésor Janet Yellen.

Une croissance révisée à la hausse en Europe

Sur le Vieux continent, les moteurs de la reprise ont retrouvé un rythme soutenu en 2021. Après un début de campagne de vaccination jugé laborieux par de nombreux observateurs et un manque de coopération des Etats, l'économie européenne devrait rebondir de 5,3% en 2021 (+1 point par rapport à mai) et 4,6% en 2022 (+0,2 point). Cette reprise survient néanmoins bien après celles observées en Chine et aux Etats-Unis. Les grandes puissances du Sud de l'Europe, c'est-à-dire l'Espagne (+6,8%) et l'Italie (5,9%) devraient booster la croissance européenne après avoir été frappées de plein fouet lors du pic de la crise sanitaire en 2020.

En France, les conjoncturistes du château de la Muette, le siège de l'OCDE à Paris, prévoient que la croissance française devrait accélérer de 6,3% en 2021 (+0,5 point par rapport à mai) et 4% en 2022 (projection inchangée). L'OCDE s'aligne ainsi avec les projections de la Banque de France et celles de l'Insee. Quant à l'Allemagne, la croissance de la valeur ajoutée devrait augmenter de 2,9% en 2021 et 4,6% en 2022. Là encore, beaucoup d'Etats espèrent profiter du plan de relance de l'Union européenne de l'ordre de 750 milliards à la fois sous la forme de prêts et de subventions. Les débats vifs sur la révision des règles budgétaires issues du traité de Maastricht enflamment actuellement les institutions bruxelloises. La Banque centrale européenne n'a pas annoncé de changement de cap majeur de sa politique monétaire dans les semaines à venir même si la propagation de l'inflation inquiète de plus en plus les milieux financiers.

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Une croissance à 8,5% en Chine

En Asie, la Chine devrait profiter d'une très forte croissance en 2021 de 8,5% avant de ralentir à 5,8%. L'OCDE n'a pas changé ses prévisions pour le géant économique. A l'échelle mondiale, Pékin est l'un des rares pays à avoir enregistré une croissance positive en 2020 (2,3%). Les experts de l'OCDE expliquent que "le niveau de la  croissance chinoise devrait rester proche de son niveau d'avant-crise et les entreprises exportatrices de marchandises devraient profiter des prix élevés à l'export et d'une forte demande pour les biens".

Si la puissance chinoise a pu redémarrer plus tôt que la plupart des autres grandes économies mondiales, de nombreuses inquiétudes subsistent sur la solidité de son système financier après l'électrochoc de 2020. La dernière affaire du géant immobilier chinois Evergrande fait trembler actuellement les marchés mondiaux déjà confrontés à des doutes sur les perspectives de croissance et d'inflation.

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Grégoire Normand
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