Comment rendre plus efficaces les sanctions sur les exportations de pétrole russe? C'est ce dont discuterons les ministres des Finances des pays du G7 lors d'une rencontre à Washington, ce vendredi, où l'administration Biden va proposer un mécanisme de plafonnement du prix du pétrole russe vendu sur le marché international.
Concrètement, la Russie vendrait son pétrole à aux pays du G7 à un prix inférieur à celui auquel elle le cède aujourd'hui, mais qui resterait supérieur au prix de production, afin qu'elle ait un intérêt économique à continuer à leur en vendre, et ainsi qu'elle ne coupe pas ses livraisons.
« Il y a une marge importante entre le prix de la production et ce que la Russie fait aujourd'hui, dans laquelle nous pouvons fixer le plafond qui créera des incitations économiques pour que la Russie continue à produire du pétrole, tout en leur refusant les revenus excédentaires qu'ils obtiennent aujourd'hui », avait indiqué fin juillet un responsable du G7.
Jusqu'à maintenant, les embargos imposés par les pays occidentaux sur les exportations d'or noir russe en rétorsion de l'invasion de l'Ukraine décidée par Moscou le 24 février n'ont pas eu l'effet escompté, c'est le moins que l'on puisse dire.
Moscou a gagné 97 milliards de dollars grâce aux ventes de pétrole et de gaz jusqu'en juillet de cette année, dont environ 74 milliards de dollars grâce au pétrole, selon l'Institut international de la finance. « Le pétrole russe continue à couler librement », soulignait mercredi dans un tweet, son économiste en chef adjointe de l'Institut, Elena Ribakova. Elle estime que l'excédent commercial de la Russie pourrait atteindre 300 milliards de dollars en 2022, largement en partie grâce aux ventes d'hydrocarbures qui profitent largement des prix élevés du baril depuis mars dernier.
Troisième mois consécutif de baisse
Les prix du pétrole, qui ont dépassé les 130 dollars le baril au cours des premières semaines de la guerre, se sont stabilisés autour de 100 dollars ces dernières semaines. Bien qu'il soit encore plus élevé qu'il y a un an, le prix du baril s'est affiché en baisse sur le mois d'août, pour le troisième mois consécutif. Celui de Brent évoluait ce jeudi autour de 95 dollars, celui du WTI, la référence américaine, autour de 88 dollars. Des reculs qui s'expliquent surtout par une probabilité plus élevée que les économies occidentales connaissent une récession en raison d'une politique monétaire beaucoup plus restrictive des banques centrales qui donnent la priorité à la lutte contre l'inflation élevée.
En effet, les sanctions à l'égard des hydrocarbures ont également alimenté une hausse des prix de l'énergie qui ont provoqué une hausse des prix de l'essence à des niveaux historiques aux Etats-Unis et une flambée des prix du gaz en Europe qui continue à fragiliser les économies de l'Union européenne.
D'autant que même en volume, la Russie a été finalement peu sanctionnée. Elle a exporté 7,4 millions de barils de brut et de produits tels que le diesel et l'essence chaque jour en juillet, selon l'Agence internationale de l'énergie (AIE), en baisse d'environ 600.000 barils par jour depuis le début de l'année. Moscou a pu compenser la chute des ventes vers l'Europe, les Etats-Unis et le Royaume uni par les achats de la Chine, dont elle devenue le premier fournisseur supplantant l'Arabie saoudite, et l'Inde, qui lui achète aujourd'hui près de 1 million de barils par jour, alors que le géant asiatique n'était qu'un client très marginal en début d'année.
Enjeu limité
L'enjeu de la réunion des ministres des Finances du G7 reste donc limité, avec ce mécanisme de plafonnement des prix. « Il s'agit, selon nous, de la meilleure façon de peser sur les ressources de Poutine. Ce faisant, ce ne sont pas seulement les recettes que perçoit Poutine sur les ventes de pétrole russe qui baisseront, mais aussi les prix de l'énergie au niveau mondial », a résumé Karine Jean-Pierre, la porte-parole de la Maison blanche, lors d'un point de presse mercredi.
C'est ce subtil équilibre gagnant pour les pays du G7 qu'il s'agit de trouver. Et selon la secrétaire américaine au Trésor, Janet Yellen, les recherches avancent bien. Mercredi, elle s'est, dite « vraiment optimiste quant aux progrès substantiels qui ont été réalisés par nos équipes et l'ensemble du G7 pour que nous arrivions à plafonner les prix », lors d'une rencontre à Washington avec son homologue britannique, le Chancelier de l'Echiquier Nadhim Zahawi.