Les relations entre la Pologne et l’Ukraine volent en éclats : Varsovie cesse de fournir des armes à Kiev

La Pologne, accusée par Kiev d'aider indirectement la Russie en interdisant l'importation de céréales ukrainiennes, a annoncé mercredi soir qu'elle ne fournirait plus d'armes à l'Ukraine. Une déclaration qui illustre les tensions de plus en plus vives entre les deux alliés, à un moment clé de la riposte de Kiev à l'invasion russe.
Dans plusieurs villes polonaises, comme à Varsovie, le drapeau ukrainien flotte à côté de celui de la Pologne.
Dans plusieurs villes polonaises, comme à Varsovie, le drapeau ukrainien flotte à côté de celui de la Pologne. (Crédits : AGENCJA WYBORCZA.PL)

 [Article publié le mercredi 20 septembre à 8H00 et mis à jour à 12H30

Alors que la Pologne est le pays qui a accueilli le plus de réfugiés ukrainiens depuis le début de la guerre entre la Russie et l'Ukraine et qu'elle était en pointe dans le soutien à son voisin de l'Est et dans la lutte contre le régime de Moscou, la bonne relation entre Varsovie et Kiev est en train de voler en éclats. « Nous ne transférons plus aucun armement à l'Ukraine », a déclaré ce mercredi le Premier ministre polonais Mateusz Morawiecki, sur la télévision privée Polsat News.

Néanmoins, on a appris ce jeudi que des négociations avec Varsovie auront lieu « dans les prochains jours » pour régler la dispute sur les exportations ukrainiennes de céréales en Pologne, a affirmé jeudi le ministère ukrainien de l'Agriculture, assurant que les deux voisins gardaient « des relations étroites » malgré les vives tensions. « Les négociations suivantes auront lieu dans les prochains jours, » a indiqué le ministère dans un communiqué, à l'issue d'un entretien téléphonique entre le ministre Mykola Solskiï et son homologue polonais, Robert Telus. Dans le même temps, la Pologne a réaffirmé jeudi qu'elle n'assurerait que les livraisons d'armes à l'Ukraine « convenues antérieurement » avec Kiev, après avoir dit la veille vouloir désormais « se concentrer principalement sur la modernisation et l'armement rapide de l'armée polonaise. » Le porte-parole du gouvernement polonais, Piotr Muller, a par ailleurs déclaré récemment que la Pologne pourrait mettre fin l'année prochaine à son aide fournie aux réfugiés ukrainiens dont elle accueille près d'un million.

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Une riposte de Varsovie après des déclarations hostiles de Kiev

Le Premier ministre n'a pas précisé quand la Pologne, l'un des plus grands fournisseurs d'armes à l'Ukraine, avait cessé d'en fournir, ni si cela avait un lien avec le conflit sur les céréales ukrainiennes, dont Varsovie a interdit les importations pour protéger les intérêts de ses agriculteurs. Mardi à l'ONU, Volodymyr Zelensky, le président ukrainien, a déclaré que « certains pays feignent la solidarité en soutenant indirectement la Russie ».

Ce qui avait valu le lendemain une convocation « d'urgence » par Varsovie de l'ambassadeur ukrainien pour protester contre les propos du président à l'ONU. Le vice-ministre polonais des Affaires étrangères, qui a reçu le diplomate ukrainien, a dénoncé cette « thèse fausse » et « particulièrement injustifiée concernant la Pologne qui soutient l'Ukraine depuis les premiers jours de la guerre ».

La veille, lundi, l'Ukraine avait déposé plainte devant l'Organisation mondiale du Commerce (OMC) contre les cinq pays à refuser les importations de céréales ukrainiennes (Pologne, Hongrie, Slovaquie, Bulgarie, Roumanie). Devant la saturation des silos et l'effondrement des prix locaux, ces cinq pays avaient au printemps décrété un embargo unilatéral. Bruxelles avait ensuite formellement approuvé les restrictions, à titre temporaire et sous réserve de maintenir le passage des céréales vers d'autres destinations. Mais l'accord a expiré vendredi et la Commission a décidé de ne pas le renouveler, évoquant « la disparition des distorsions » et l'amélioration des conditions d'acheminement. Kiev a promis en échange des mesures pour mieux contrôler ses flux d'exportation. C'est insuffisant pour les pays concernés. La Hongrie avait immédiatement riposté, annonçant une extension des restrictions à 24 produits au lieu de quatre, suivie par la Pologne. Idem pour la Slovaquie, qui a décrété un embargo jusqu'à la fin de l'année, tandis que la Roumanie s'est dite prête à faire de même pour une durée d'un mois. En réaction à la plainte de l'Ukraine devant l'OMC, le chef du gouvernent polonais a averti mercredi qu'il élargirait la liste des produits ukrainiens interdits d'importation.

La Slovaquie et l'Ukraine ont néamoins convenu jeudi d'un mécanisme basés sur des licences et destiné à remplacer dans l'avenir l'embargo slovaque sur les céréales, a indiqué jeudi à l'AFP le porte-parole du ministre slovaque de l'Agriculture, Andrej Wallner. « Jusqu'à ce que ce système soit lancé et que sa pleine fonctionnalité soit testée, l'interdiction d'importer quatre produits d'Ukraine (...) reste valable jusqu'à la fin de l'année 2023, a-t-il déclaré.

« Faire pression sur la Pologne dans les forums multilatéraux ou envoyer des plaintes aux tribunaux internationaux ne sont pas des méthodes appropriées pour résoudre les différends entre nos pays », avait averti la diplomatie polonaise dans un communiqué.

« Nous appelons nos amis polonais à mettre l'émotion de côté », avait de son côté réagi de son côté le porte-parole de la diplomatie ukrainienne, Oleg Nikolenko, après l'annonce par Varsovie de la convocation de l'ambassadeur ukrainien. Dénonçant « le caractère inacceptable pour l'Ukraine de l'interdiction unilatérale par la Pologne des importations de céréales ukrainiennes », le diplomate a ajouté que « la partie ukrainienne a proposé à la Pologne une solution constructive au problème des céréales ». Il a également déploré « le caractère incorrect » des propos tenus par le président polonais Andrzej Duda lors d'une rencontre avec les médias à New York. Le chef de l'Etat a notamment comparé l'Ukraine à un homme qui se noie, risquant d'entraîner au fond et de noyer aussi celui qui cherche à le sauver.

La France a déploré mercredi les tensions entre les deux pays

La France, par la voix de Catherine Colonna, a déploré à l'AFP « des tensions regrettable », y voyant le reflet de « considérations de politique intérieure ». La cheffe de la diplomatie française, qui s'exprimait après un Conseil de sécurité exceptionnel à l'occasion de la visite à l'ONU de Volodymyr Zelensky, a insisté sur le fait que la décision de Bruxelles de mettre fin à l'interdiction d'importer des céréales ukrainiennes n'entraînait « pas de rupture de concurrence » ou de perturbation des marchés des céréales.

Le bond des importations de poulets ukrainiens en Europe irrite les éleveurs français

Le récent bond des importations de poulets ukrainiens en Europe irrite les éleveurs français, qui se plaignent d'une concurrence à bas coûts venant d'un pays invoquant de son côté la solidarité et le respect des règles du libre-échange. Officiellement, les importations de viandes de volailles ukrainiennes en France ont bondi de 74% au premier semestre sur un an, tout en restant négligeables. Elles représentent 8,1 millions d'euros sur cette période, soit moins de 1% des importations totales de viandes de volailles en France (1 milliard), selon les douanes françaises. Mais ces chiffres « ne reflètent pas la réalité », affirme Yann Nédélec, directeur de l'interprofession de la volaille Anvol: le poulet ukrainien repasse souvent par des usines en Europe - en Belgique, aux Pays-Bas ou en Pologne notamment - qui ne sont pas obligées d'en indiquer l'origine. Selon la Commission européenne, les importations de volailles ukrainiennes en volume représentaient sur les cinq premiers mois de l'année 27% des importations totales de l'Union européenne - après le Brésil (36%) et avant la Thaïlande (19%)-, contre 13% en 2021.

 (Avec AFP)

Commentaires 8
à écrit le 21/09/2023 à 21:08
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Je ne confirme rien du tout. Je constate et j'encourage tous ceux qui pensent que le Bien est dans la Russe de Poutine, dans la Chine de Xi Jin Ping, chez les Mollahs d'Iran où encore dans la merveilleuse Corée du Nord d'aller un temps y vivre. Marre...

à écrit le 21/09/2023 à 12:34
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et que fait l'Europe? elle attend que les problèmes explosent et de faire semblant de réparer les dégâts en bavardant de réunion en réunion stérile et inutile. Pauvres Ukrainiens, ils me font penser à ces Arméniens qui depuis plus de 100 ans se font...

à écrit le 21/09/2023 à 10:35
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L'Ukraine comme à son habitude faits des reproches aux pays qui l'aide La Pologne comme d'habitude joue son intérêt, on le voit avec l'europe où elle tente de réécrire l'histoire ou de perturber son equilibrem (demande d'indemnisation de guerre à l'...

le 21/09/2023 à 17:51
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À la suite de l'agression par l'Allemagne nazie, une grande partie de la Pologne fut soumise à d’énormes destructions, de son industrie (dont 62% fut détruite), de ses infrastructures (à hauteur de 84 %) et de ses habitants (16,7% de ses citoyens fur...

à écrit le 21/09/2023 à 9:43
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On dirait que la magistrale contre-offensive de zelensky, promue par les otaniens...prend l'eau ! MDR ! 🤣

à écrit le 21/09/2023 à 8:12
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"à un moment clé de la riposte de Kiev à l'invasion russe" Ben justement, maintenant que vous en parlez sachez bien que les opérations militaires en Ukraine sont incompréhensibles, nous ne savons pas du tout où ils en sont, les médias de masse sont d...

le 21/09/2023 à 10:06
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@Dossier51 Il n'y a rien à comprendre parce que c"est la guerre. Rien de ce qu'on nous dit n'est fondé parce que nous ne connaissons pas les buts ultimes de cette guerre. Le combat n'a en réalité jamais cessé entre l'Est et l'Ouest. Il est resumable...

le 21/09/2023 à 10:37
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"Il est resumable au combat entre le Bien et le Mal. Le Bien étant à l'Ouest évidemment." LOL ! Franchement t'as pas trouvé mieux !? Ben merci de confirmer mon commentaire alors hein. :-)

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