Pêche, vaccins, sécurité alimentaire… l’OMC signe des « accords historiques »

Réunis depuis dimanche, les 164 États membres de l'OMC sont parvenus à s'accorder sur plusieurs textes dont un sur la lutte contre l'insécurité alimentaire. Il a également été question de la pêche avec, pour objectif, d'interdire certaines formes de subventions qui peuvent encourager les prélèvements illégaux ainsi que de la levée temporaire des brevets protégeant les vaccins anti-Covid. Des victoires obtenues au prix de longues négociations tant les divergences sont nombreuses entre les États.
C'est « un ensemble de résultats sans précédent. Il y a longtemps que l'OMC n'avait pas obtenu un nombre aussi important de résultats multilatéraux. Les résultats démontrent que l'OMC est capable de répondre aux urgences de notre époque », a déclaré Ngozi Okonjo-Iweala, devant les chefs de délégation, à l'issue de cette 12e ministérielle.
C'est « un ensemble de résultats sans précédent. Il y a longtemps que l'OMC n'avait pas obtenu un nombre aussi important de résultats multilatéraux. Les résultats démontrent que l'OMC est capable de répondre aux urgences de notre époque », a déclaré Ngozi Okonjo-Iweala, devant les chefs de délégation, à l'issue de cette 12e ministérielle. (Crédits : DENIS BALIBOUSE)

C'était un texte très attendu. Ce vendredi, les 164 Etats membres de l'Organisation mondiale du commerce (OMC), réunis à Genève pour la 12e conférence ministérielle, sont parvenus à s'accorder sur un paquet de mesures avec pour sujet dominant : l'insécurité alimentaire.

Cette dernière s'est imposée comme une priorité ces derniers mois du fait de la guerre en Ukraine qui prive le monde de céréales et d'engrais. D'une part, une grande partie reste bloquée dans les ports de la mer Noire faisant baisser les volumes des exportations mondiales au grand dam des pays très dépendants de ces dernières. D'autre part, depuis l'invasion de l'Ukraine par la Russie le 24 février dernier, les prix des matières premières n'ont eu de cesse de grimper faisant planer la menace de la faim sur des millions de gens dans le monde.

Pour tenter d'éviter une crise alimentaire mondiale, l'Organisation mondiale du commerce a adopté un texte qui souligne l'importance « de ne pas imposer de prohibitions ou de restrictions à l'exportation » qui soient contraires aux règles de l'OMC. Il demande que toutes mesures d'urgence introduites pour répondre à des préoccupations en matière de sécurité alimentaire, comme un gel des exportations, « soient temporaires, ciblées et transparentes », et soient notifiées à l'OMC. Un texte très attendu, bien qu'il ne s'agisse que d'une déclaration ministérielle.

Un second texte a également été adopté afin de protéger les achats de nourriture du Programme alimentaire mondial (PAM) contre les restrictions qui pourraient être imposées par certains pays.

Accord sur la pêche

D'autres sujets étaient au menu de ces négociations qui ont duré cinq jours, notamment la pêche. C'était l'un des sujets phares de cette ministérielle. Les négociations sur le sujet ont été lancées il y a plus de 20 ans et s'inscrivent dans les objectifs du développement durable de l'ONU. Il s'agit en particulier d'interdire certaines formes de subventions qui peuvent encourager les prélèvements illégaux. Pour aider les pays en développement, l'OMC veut mettre en place un fonds permettant d'apporter une assistance technique et aider leurs pêcheurs à se tourner vers une pêche plus durable.

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Même si le texte est édulcoré par rapport aux ambitions initiales, la directrice de l'OMC Ngozi Okonjo-Iweala, n'en a pas moins revendiqué un succès. De leurs côtés, plusieurs ONG ont critiqué le texte, estimant qu'il se trompait de cible.

Un accord malgré des divergences

Jusqu'à la dernière minute, cet accord est resté incertain notamment du fait du blocage de l'Inde, en particulier sur les subventions qui contribuent à la surpêche. Le pays s'est montré intransigeant sur plusieurs dossiers. Mais, le ministre indien du Commerce, Piyush Goyal, présenté comme l'empêcheur de tourner en rond par de nombreuses délégations, a soutenu que son pays « ne fait pas obstacle à quoi que ce soit » mais est un « bâtisseur de consensus ».

Preuve de l'intensité des négociations, la ministérielle a duré pratiquement 36 heures de plus que prévu. En effet, lorsque la réunion a débuté dimanche, l'espoir de conclure sur les différents sujets au programme était mince, tant les divergences entre délégations restaient importantes. C'est finalement aux alentours de 5 heures (heure de Paris) que le marteau qui marque l'adoption formelle des textes a été abattu.

C'est « un ensemble de résultats sans précédent. Il y a longtemps que l'OMC n'avait pas obtenu un nombre aussi important de résultats multilatéraux. Les résultats démontrent que l'OMC est capable de répondre aux urgences de notre époque », a déclaré Ngozi Okonjo-Iweala, devant les chefs de délégation, à l'issue de cette Ministérielle.

De son côté, Valdis Dombrovskis, commissaire européen chargé du commerce, a salué « un résultat important et de portée mondiale », mais « les profondes divergences ici confirment que l'organisation a besoin d'être réformée en profondeur ». Katherine Tai, son homologue américaine, a préféré, elle, souligner « la rapidité » de l'OMC dans le dossier des vaccins.

Levée temporaire des brevets sur les vaccins anti-Covid

Les 164 États membres sont également parvenus à s'accorder sur la facilitation du commerce des biens médicaux nécessaires à la lutte contre les pandémies, après deux ans et demi de lutte contre la pandémie de Covid-19. Un sujet d'importance pour éviter que le commerce des ingrédients et matériels ne soit restreint au moment où on en a le plus besoin.

Autre victoire pour cette 12e ministérielle de l'OMC : un accord sur la levée temporaire des brevets protégeant les vaccins anti-Covid destinés aux pays en développement. Ce sujet a fait l'objet d'âpres batailles entre le lobby pharmaceutique, des pays en développement et de nombreuses ONG.

L'idée est de faciliter la production de sérums. « Ce fut un long combat, mais c'est fait », s'est félicitée Ngozi Okonjo-Iweala en conférence de presse. Mais l'ONG Médecins sans frontières s'est montrée moins satisfaite de ce texte dont elle estime qu'il « échoue à garantir aux gens un véritable accès aux matériels médicaux dont ils ont besoin, il ne lève pas les brevets de façon adéquate et il ne concerne pas tous les pays ».

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Les États membres ont aussi reconduit le moratoire sur les transactions électroniques, malgré les réticences de l'Inde à nouveau mais aussi de l'Afrique du Sud, qui regrettent de voir une potentielle manne douanière de ces échanges leur échapper.

(avec AFP)

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