Tensions commerciales : la Chine au centre des discussions du G7... et des divergences franco-allemandes

Réunis en G7 à Stresa, au nord de l’Italie, les ministres des Finances des pays les plus industrialisés de la planète vont tenter d’adopter une position commune pour faire face à la Chine qui inonde l’économie européenne de produits manufacturés bon marché. Une voie difficile, alors que l’Empire du Milieu reste un partenaire commercial majeur de l'Allemagne quand la France pousse pour davantage de fermeté à l'égard de Pékin.
Au centre des tensions commerciales, les produits manufacturés à bas coût qui inondent le marché européen.
Au centre des tensions commerciales, les produits manufacturés à bas coût qui inondent le marché européen. (Crédits : CHINA STRINGER NETWORK)

La Chine ne fait pas partie du G7, mais la superpuissance sera au centre des discussions à Stresa, au nord de l'Italie, jusqu'à samedi, où sont réunis les ministres des Finances des principales économies de la planète. Pour ces pays - la France, les Etats-Unis, le Canada, le Japon, le Royaume-Uni, l'Italie et l'Allemagne - l'enjeu n'est pas mince... Il s'agit ni plus ni moins que de trouver une position commune pour forcer la Chine à suivre les règles du commerce mondial. Et ce, alors que le pays inonde l'Europe de produits manufacturés à bas coûts. À l'instar des panneaux photovoltaïques dont les prix de marché particulièrement attractifs ont mis à terre la filière française.

Dans cette guerre commerciale, les Européens peuvent compter sur leur allié américain, membre du G7. Jeudi, la Secrétaire d'Etat au Trésor, Janet Yellen, a plaidé pour former « un front clair et uni » face aux surcapacités industrielles de la Chine qui génèrent des « déséquilibres macroéconomiques » appelant à des « réponses » des pays occidentaux inondés de produits subventionnés à bas prix.

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Paris veut rétablir des règles commerciales plus équitables

Et Paris ne dit pas autre chose. Dans un échange avec la presse, mercredi 22 mai, Bercy a dressé le même constat : « Nous estimons qu'il existe des surcapacités chinoises (véhicules électriques, batteries, éoliennes, panneaux photovoltaïques...). Face à ces surcapacités chinoises, il est indispensable que le G7 et l'Europe fassent bloc pour que l'Europe affirme sa puissance économique et rappelle que son marché intérieur est le premier marché commercial de la planète », a indiqué le ministère de l'Economie.

Cette position, Emmanuel Macron a pu l'exposer au président chinois Xi Jinping, en visite dans l'Hexagone début mai. Le président de la République a notamment défendu auprès de son hôte le principe de réciprocité, qui permettrait de mieux protéger les intérêts économiques et industriels de la France. Car, la relation économique avec l'Empire du Milieu est particulièrement dégradée.

Selon le bilan réalisé par les douanes en 2023, le déficit commercial de biens s'est établi à 40 milliards d'euros, pour une balance commerciale négative totale de 100 milliards d'euros. À titre de comparaison, ce déficit s'établissait à 5 milliards d'euros au début des années 2000 au moment de l'entrée de la Chine dans l'Organisation Mondiale du Commerce (OMC). L'année dernière, l'Hexagone a exporté pour 31 milliards d'euros de biens et importé pour 72 milliards d'euros.

La Chine est ainsi le premier déficit commercial de la France. Et ce phénomène est loin d'être nouveau. Entre 2008 et 2020, la balance commerciale de la France est restée largement déficitaire à l'égard de la Chine selon un bilan des douanes. Ce déficit commercial « est ainsi depuis 2008 le déficit bilatéral le plus élevé de la France. Sa croissance, vigoureuse pendant la décennie 2000-2010, a ralenti nettement entre 2011 et 2019. Le dynamisme des importations deux fois supérieur à celui des exportations entre 2000 et 2019 explique cette croissance », souligne l'administration.

La pandémie du début des années 2020 avait d'ailleurs mis en lumière l'extrême dépendance de la France à l'égard de la Chine pour se fournir en masques de protection ou en médicaments. À l'époque, les importations massives de masques avaient plongé le déficit commercial tricolore à un niveau abyssal.

Vers une hausse des droits de douane ?

Pour protéger le marché européen de l'ogre chinois, la réponse pourrait passer par une hausse des droits de douane à l'instar des Etats-Unis qui ont annoncé, le 14 mai dernier, une augmentation marquée des droits de douane appliqués à l'équivalent de 18 milliards de dollars de produits chinois. Ceux concernant les voitures électriques passent ainsi de 25% à 100%. Or, elles commencent également à affluer en masse sur le Vieux Continent, ce qui constitue une crainte forte pour les milieux industriels européens. A ce sujet, « ce sera la Commission européenne qui fera une proposition aux Etats membres », a indiqué Bercy.

Mais augmenter les droits de douane n'est pas forcément une solution privilégiée par tous les pays du G7. Même si Emmanuel Macron avait reçu le chancelier Olaf Scholz en amont de la visite de Xi Jinping à Paris pour « aligner leurs positions », on sait Berlin plus réticent à des mesures coercitives contre la Chine. Et pour cause, la Chine reste un partenaire commercial majeur de l'Allemagne.

Signe néanmoins que l'Europe souhaite hausser le ton, Bercy a précisé « qu'il y a 15 enquêtes en cours contre la Chine du côté de la Commission européenne ». En avril, l'UE a, notamment, ouvert une enquête sur les marchés publics chinois de dispositifs médicaux, soupçonnant des pratiques « discriminatoires » contre les entreprises du Vieux Continent. De même, en septembre 2023, la présidente de la Commission européenne, Ursula von der Leyen, avait annoncé une même mesure concernant les subventions chinoises aux voitures électriques.

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Mais la Chine n'est pas en reste. Elle a annoncé, dimanche 19 mai, avoir entamé une enquête antidumping sur un produit chimique d'ingénierie, importé de l'UE, des Etats-Unis, de Taïwan et du Japon. Cette enquête concerne le copolymère de polyoxyméthylène, un plastique d'ingénierie utilisé dans les téléphones, les pièces détachées automobiles ou encore les équipements médicaux, a indiqué le ministère chinois du Commerce.

Malgré ces tensions croissantes, Emmanuel Macron avait néanmoins remercié son homologue chinois Xi Jinping, lors du passage de ce dernier en France, de ne pas imposer de taxes douanières « provisoires » contre le cognac français - après lui en avoir offert des bouteilles à l'occasion de cette visite - malgré l'ouverture, cinq mois plus tôt par la Chine, d'une enquête antidumping sur les eaux-de-vie de vin, comme le cognac, importées de l'UE.

Les avoir russes également au menu des discussions

Outre la question chinoise, le sujet des avoirs russes gelés par les pays occidentaux pour aider l'Ukraine sera également au programme. « Nous soutenons la décision de l'UE d'utiliser les bénéfices exceptionnels générés par ces actifs, mais nous devons aussi poursuivre nos efforts collectifs en faveur d'options plus ambitieuses (...) en agissant ensemble », a ainsi indiqué Janet Yellen, la Secrétaire d'Etat au Trésor américain.

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Par ailleurs, les membres du G7 devraient aussi aborder les opportunités et les risques de l'intelligence artificielle, la fiscalité internationale, et le soutien aux pays en développement.

Commentaires 3
à écrit le 24/05/2024 à 9:20
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La Chine comme la Russie, ne comprend que le rapport de force. Commercer avec la Chine, c'est lui donner les moyens de développer son appareil militaire qui sera un jour utilisé contre nous. Contenir la Chine est vital pour nos libertés, la justice...

à écrit le 24/05/2024 à 8:50
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C est aux industriels occidentaux qu ils faut forcer la maîn ce sont bien eux les commanditaires des produits chinois … ou autres ! ou est leur patriotisme économique ? S ils ne le sont pas , interdiction de la commande publique pour eux , frais de d...

à écrit le 24/05/2024 à 8:05
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Vous êtes marrant vous mais l'Allemagne c'est Van Leyen ! Le renard est déjà dans le poulailler. Soit il faut que l’Allemagne quitte l'UE soit nous devons la quitter nos deux pays ne osnt pas compatibles.

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