PODCAST Bruno Le Maire fait-il du Thatcher ou du Schröder ?

HISTOIRES ECONOMIQUES. Le livre du ministre de l’Economie, Bruno Le Maire, « La voie française », provoque des réactions assez vives. Écoutez chaque mardi 6h48 la chronique "Histoires Economiques" de Philippe Mabille dans le 5/7 de France Inter présenté par Mathilde Munos.
Philippe Mabille
(Crédits : Benoit Tessier)


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Il faut dire que Bruno Le Maire ne prend pas de gants dans ce nouveau livre très différent du précédent. Pour reprendre la maîtrise de finances publiques qu'il juge incontrôlables, il y dénonce notre Etat providence dont « le but ultime est la gratuité de tout, pour tous tout le temps ».

On n'est plus du tout dans le quoi qu'il en coûte. L'indexation des retraites, l'indemnisation du chômage, le remboursement des frais de santé, tout ce qui fonde la générosité du modèle social français est jugé « intenable » par Bruno Le Maire qui appelle à des réformes radicales.

Qu'en disent les syndicats ?

Sophie Binet, la secrétaire générale de la CGT a porté la charge la plus rude, comparant le ministre à Margaret Thatcher. Rien de moins. Dans une tribune publiée hier dans Le Monde, les cinq leaders syndicaux ont surtout appelé « à cesser la stigmatisation populiste des chômeurs ».

Marylise Léon, la patronne de la CFDT, juge « incohérente » la position du gouvernement qui, moins d'un an après avoir fait adopter une réforme qui lie le niveau de l'indemnisation du chômage à la conjoncture, veut tout d'un coup en durcir encore plus les règles, notamment pour les seniors, alors même que la conjoncture se dégrade. Pour les syndicats, la cause est entendue, la seule motivation du ministre est budgétaire : il s'agit, en reprenant la main sur les comptes de l'Unédic, de lui imposer des économies, au risque d'accroître la précarité.

Bruno Le Maire affirme que cette politique est nécessaire pour atteindre le plein emploi

Soyons clairs, le ministre de l'Économie est en campagne pour l'après Macron. Ce qu'il propose ressemble à la politique qu'a menée Gerhard Schröder en Allemagne au début des années 2000 avec les réformes Hartz.

Ces mesures très dures ont certes conduit à une chute du chômage, à moins de 5%, mais au prix d'une explosion des mini-jobs et de la précarité. L'Allemagne a d'ailleurs dû revenir partiellement en arrière.

Pour la France, suivre le même chemin vingt ans plus tard est risqué, car le monde a changé. D'autant que d'autres sources de financement sont possibles. Le patronat craint que le gouvernement ne vienne taper dans les 170 milliards d'euros d'aides aux entreprises, plutôt que de risquer un conflit social à l'approche des JO.

Le débat se déporte aussi vers la hausse des impôts. La piste d'une hausse de la TVA pour financer la protection sociale fait son chemin. Cette TVA sociale appliquée par l'Allemagne de Merkel en 2007 ne s'était pas à l'époque traduite par une flambée de l'inflation.

Pour l'heure, cela reste à Emmanuel Macron, pas à Bruno Le Maire, de trouver la voie. Ce qui est sûr, c'est qu'elle est de plus en plus étroite.

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Philippe Mabille
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